Ayant reçu ce livre en milieu de journée et l'ayant finit dans le courant de l'après-midi (livre trop peu long), je vais m'attarder à vous présenter comment j'ai perçu cette "étude sur Tolkien".
Photo de Monsieur Marc-Louis Questin, pour que vous puissiez voir à quoi ressemble cet illuminé.
Au premier aspect, je vais abordé l'enveloppe du livre. Le livre présente en page de couverture l'image postée ci-dessus, représentant l'assaut d'une cité (Gondolin ou Minas Tirith ?). Aucune idée, puisque l'illustration perçue comme très "bordélique" (c'est un ancien étudiant en histoire de l'art qui vous parle), n'aide aucunement quant à savoir quel passage chez Tolkien est représenté. Admirez donc l'aspect fouillis, qui est déjà le prélude de ce qui va suivre à l'intérieur. En quatrième page de couverture, l'auteur du livre nous présente la thèse de son ouvrage résumée en une phrase : il n'est pas indécent de qualifier Tolkien de sage visionnaire qui possède une vaste mémoire des civilisations perdues, mais qui donne également à son oeuvre une dimension prophétique et démiurge.
L'auteur nous propose donc de nous faire découvrir tout au long de son livre que le génie de Tolkien lui a permit de créer en outre le Silmarillion, un mythe fantastique.
Une fois cette lecture faite, me sentant alléché par ces mots, je me lance de la lecture de l'ouvrage, et attention à vos yeux, vous en prenez plein la vue.
L'auteur aborde Tolkien en vingt-deux chapitres. Pour un livre de 230 pages environ, édité sous une police atteignant facilement le nombre 16, vous vous apercevrez en réalité que vous lisez non pas un livre de 230 pages, mais bien au contraire la moitié, soit environ 160 pages. Divisez 160 par 22, et vous obtiendrez un chiffe avoisinant 7, ce qui est totalement risible. Comprenez donc au combien il fut facile pour moi de finir ce livre en si peu de temps.
La critique du premier livre de M. Questin que je n'ai pas lu cela dit en passant, publiée sur le site JRRVF sous ce lien : http://www.jrrvf.com/essais/CR_Monde_Legendaire.html annonce déjà la couleur de ce qui suivra dans ma critique.
Citation de JRRVF : Comment en effet ne pas déjà sursauter d'indignation quand on lit que Le Seigneur des Anneaux est qualifié, je cite, de « classique de la littérature ésotérique ». Depuis des années, de nombreuses personnes travaillent à défaire l'ouvre de Tolkien des préjugés qui pèsent sur elle, or voilà que M. Questin prend le contre-pied de cette démarche en donnant au Seigneur des Anneaux ce qualificatif d'ésotérique.
Et comme par le plus grand des hasards me direz-vous, il se trouve que je m'y connais quelque peu en matière ésotérique. Et en effet, je dois dire qu'une fois son livre achevé, je trouve que ce monsieur psychote un peu trop sur la notion d'ésotérisme, alors que pour moi, il n'y a pas vraiment de cela dans l'oeuvre de Tolkien. Un tel hermétisme se retrouverait bien plus aisément dans l'oeuvre de Dante (que d'ailleurs l'auteur rapproche de Tolkien je ne sais plus quand, tant les références à tout et n'importe quoi se font sentir à la lecture). En parlant de référence, quelle grossière erreur de publier un livre sensé être une étude, alors que nous n'avons nulle note à laquelle nous référer lorsque que monsieur avance des arguments. La crédibilité de son étude joue énormément là-dessus. Du coup nous nous retrouvons avec des extraits de textes balancés sur le papier, dont l'auteur s'entête à ne fournir qu'un copié-collé, sans rien expliquer de convainquant (je fais en particulier référence au chapitre cinq qui parle de la relation en le Kevala et l'histoire de Turin Tumanbar. Il ne s'agit que de la publication d'un vulgaire résumé. Or dans une étude, on attend la base de ce qu'est une étude, à savoir de produire une étude, un approfondissement de ce que nous avançons. Alors quant à se montrer érudit, autant le faire de manière subtile). Je saignerai à ce propos le troisième chapitre qui atteint péniblement les deux pages d'étude, dont le titre est "la fleur d'écume". Merci la traduction quenya qui n'est pas forcément perceptible au premier abord. Surtout quand on voit que ce chapitre porte sur un très court passage concernant le Vingilot et sur Elwing. Admirable. On arrive même à un chapitre traitant de Beowulf qui est tout simplement l'oeuvre par excellence en ce qui concerne l'inspiration de Tolkien. On notera six pages d'études. Misérable.
Chose intéressante, est fournie avec le livre une carte de l'éditeur. Je remarque au dos de la carte une série de case à cocher si on aime tel genre de livre. Je me rends compte bien vite que cet éditeur centre ses livres sur des sujets précis que je vais vous citer : spiritualité, radiesthésie, sociétés initiatiques, sciences occultes, magie, paranormal, art divinatoires, chamanisme, orientalisme, religion, etc. Bref un tas de domaines d'études prompt à être très orienté vers l'ésotérisme. Et on se permet de qualifier Tolkien d'ésotérisme ? A croire que les livres de Tolkien auraient dû être publiés chez cet éditeur et non chez Christian Bourgois. Mais bizarrement, cela ne s'est pas trouvé. Étrange non ? Il n'y que cette étude qui adopte une visée ésotérique, et encore, je dirais pseudo-ésotérique tant l'illumination de monsieur est puissante. Cela me rappelle quelqu'un qui avait analysé le nom de Rackham le Rouge, personnage de Tintin, et en avait déduit que la racine du nom de ce personnage si l'on analysait, se rapprochait de l'arabe et signifiait tel concept métaphysique. Vous comprenez donc où je veux en venir, certaines comparaisons entre l'oeuvre de Tolkien et certains textes ésotériques sont décevantes à lire, voire choquantes. Exemple : chapitre 3 Les voiles de ce navire étaient argentées comme la lune, vermeilles étaient ses rames et les bouleaux de Nimbrethil servirent à tailler ses flancs d'une blancheur immaculée. (Saut de ligne) le bouleau, pour les chamanes mongols et sibériens, est un arbre qui est lié à la lune et au monde souterrain. Voyez donc comment il est choquant de voir qu'un bouleau issu de la pensée de Tolkien, soit soudainement comparé à la blancheur de la lune selon les chamanes mongols. On est à la limite du ridicule. Alors après qu'on vienne me dire qu'il faut comprendre que les voiles évoquant la lune, plus le bouleau qui évoque la lune chez les mongols a en fait un rapport, puisque la lune est un tout qui se figure dans le Vingilot-même, etc. On approcherait des théories fumantes et prise de tête. Mais c'est là tout le problème de cet auteur, c'est qu'il va trop loin dans ses délires, si loin qu'il n'en vient même plus à parler de Tolkien mais à parler de lui en réalité, de comment il perçoit Tolkien (chose évidente quant à la teneur des réflexions dont bon nombre non certainement pas effleurées l'esprit du Professeur, je vous renvois à la théorie fumeuse ci-dessus), et nous cherche en réalité à nous présenter son érudition qu'autre chose. Il faut apprendre que si nous voulons expliquer un auteur dans une quelconque étude, il vaut mieux se référer à l'auteur même, et non à sa propre subjectivité. Quand bien même il s'y réfère, monsieur Questin ne bronche pas plus de quelques pauvres lignes sur le papier à son propos. Fainéantise ou plutôt volonté de se mettre en avant plus que l'auteur lui-même.
Je m'attarde dès à présent sur le style d'écriture. Comme vous le savez maintenant, l'auteur est du genre à vendre sa petite personne. Et quel est le moyen de vendre au mieux son mérite ? Une écriture à la perception métaphorique. Jamais, je dis bien jamais, je n'ai lu une étude qui recherche plus la qualité des mots comme le faisait l'ami Flaubert, qu'à présent aujourd'hui. Des grandes et belles pompeuses. On croirait lire une sorte du poète qui intègre en plus de cela des concepts de philosophie et de métaphysique, dont il pêne à unir, si bien qu'on se retrouve avec des phrases très lourdes, du moins si vous n'avez pas en tête quantité de notion philosophique, le livre sera pour vous une dure épreuve. En plus de cela, ses références à certains auteurs sont parfois douteuses. Je citerais avec honneur, l'heureuse surprise de voir mentionné le nom de René Guénon qui est pour mon père un très grand savant (pas étonnant qu'il est spécialiste de cet homme). A un moment, il citait donc ce métaphysicien, et j'ai accouru vers mon père pour lui demander ce qu'il pensait de ce passage en question. Il m'a sorti un grand "Mouais, je ne sais pas où il est allé pêché ça". C'est dire à quel point, venant même d'un "spécialiste", l'auteur apparaît en réalité moins convaincant qu'il n'en a l'air. Malgré tout il a tout de même cerné quelques concepts philosophiques "bateaux" comme le concept du non-retour nietzschéen qui se fait la joie de nous rappeler plusieurs fois, le livre ne comportant pas assez de contenu, on fait de la répétition, ça bourre les pages. Bravo monsieur l'érudit, une fière prouesse intellectuelle.
Voilà, j'espère que cette critique sera pour vous une lumière pour vous prémunir de cet ouvrage unique en son genre. J'ai voulu en faire une critique car ce livre m'intéressait tant à ce qu'on m'a dit à son propos. Du coup je l'ai lu, et je vous ai posté mon avis sur la question. Maintenant à vous de juger.
D'autres livres seront bientôt en ma possession, en particulier un livre de Léo Carruthers sur Tolkien et le Moyen-Age, et la biographie de Humphrey Carpenter, qui sont je pense, des études plus sérieuses, plus précises, plus constructives que ne le laissait croire l'auteur critiqué aujourd'hui.