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L'Esquive

phoenlx
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L'Esquive

Messagepar phoenlx » lun. oct. 29, 2012 6:01 pm

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Wesh je crois que j'ai kiffé grave !!! Je me cherchais un film à visionner tout à l'heure et j'hésitais, j'hésitais, jusqu'à me décider pour ce petit film français qui avait fait quelque peu sensation à l'époque ( plusieurs récompenses à la clé dont le rôle de meilleur espoir féminin pour Sarah Forestier ) ; J'avais un peu peur que ça me déplaise vu le thème, la banlieue et d'avoir affaire à un film un peu politisé et "bien pensant" ( sous certains côtés il l'est d'ailleurs sans doute mais j'y viens après ) mais je m'étais souvenu que j'avais beaucoup aimé La graine et le mulet, du même réalisateur et donc, j'ai lancé le visionnage et hop c'est parti !!!

Autant annoncer la couleur tout de suite, c'est un film très déroutant, qui peut choquer ! Vous l'adorerez ou vous le détesterez mais j'ai l'impression que la demi mesure est difficile et je crois faire partie de ceux qui l'ont beaucoup aimé. L'histoire suit un groupe de jeunes de banlieue , des garçons , des filles, qui au milieu des HLM, au milieu de la grisaille du quotidien ( bien soulignée par la météo d'ailleurs, c'est bien étudié aussi :lol: ) lesquels vivent des choses somme toute banales et qui pourrait-on dire, résument l'adolescence : Les histoires d'amour , l'ennui du quotidien qu'on cherche à tuer , les cours , de plus ( et c'est le fil rouge de l'oeuvre ) certains des personnages de cette histoire s'essaient au théâtre en répétant une pièce de Marivaux inlassablement ( ce qui donne lieu au passage à bon nombre de belles scènes qui font un peu "poupée gigogne" avec une belle illustration de l'exercice du comédien , en plus d'aborder certaines thématiques comme la fracture sociale , l'amour entre personnes de classes sociales différentes etc.

L'histoire suit plus particulièrement un jeune banlieusard du nom de Krimo ( qui au début du film se fait un peu larguer par sa copine et qui par la suite va tomber amoureux d'une autre fille - Lydia / sarah Forestier - laquelle s'entraine justement pour cette fameuse pièce de théâtre. Par amour pour elle il va se laisser embarquer dans l'aventure des répétitions. Jusqu'à ce que l'amour fasse tout déraper ! ( j'en dis pas plus pour pas spoiler ! :mrgreen: )

Durant tout le film, on voit ces ado discuter entre eux, se brouiller ( c'est fréquent :lol: ) avec le parlé de banlieue si caractéristique , et qui contraste d'ailleurs fortement avec le parlé de la pièce de théâtre qui émaille aussi le film ; Difficile de décrire ce film avec des mots je crois qu'il faut le voir pour en saisir justement tous les jeux de contrastes, et la manière dont le réalisateur s'amuse à marier des registres différents ; A titre perso j'ai beaucoup aimé , à mon avis pour plusieurs raisons : Déjà pour avoir grandi (et être encore ) en banlieue, avoir côtoyé des jeunes dont ceux du film ressemblent aux portraits archétypaux, forcément, ça ne manque pas de me titiller quelque peu :mrgreen: Le parlé ( bien que vulgaire , très souvent ) amuse parfois fait rire ; A certains moments j'avoue que je m'amusais du jeu plein de vérité de ces jeunes acteurs, et d'autres fois aussi le film verse plus dans la tristesse. Des petites choses banales finissent par dériver et prendre des proportions dingues ; ceci est typique de beaucoup d'ado, mais avec ce parlé très codé de banlieue, les résonnances prennent encore une autre dimension , un peu tragi-comique. La violence est très présente, dans les mots, parfois physique, pourtant, tous sont attachants, à leur manière.

C'est très très bien joué, et les acteurs sont tous très bons dans leur rôle, en particulier Sarah Forestier qui crève l'écran mais aussi Osman Elkharraz qui incarne ce jeune Krimo complètement désabusé et dont le père est en prison, ou encore, son "grand frère" Erik, sans oublier Carole Franck qui incarne très très justement la prof. La réalisation se veut réaliste, un peu à la manière d'un documentaire , point de grands artifices de caméra ici , l'esprit du film c'est de parachuter le spectateur au milieu de ce groupe de jeunes de banlieue et de les voir vivre, se chamailler, s'entredéchirer pour des histoires de coeur au quotidien, et répéter cette fameuse pièce. Dès l'entrée en matière on est "dedans" et , pour ma part en tout cas, le film a capté mon attention jusqu'au dénouement.

Je regretterai juste une scène d'arrestation par des flics qui verse dans les gros clichés ( les flics évidemment agressifs, fouillant sans ménagement nos jeunes auxquels on a eu le temps de s'attacher durant plus d'une heure de film avec leurs grands et leurs petits côtés ) le gros flic méchant face au jeune de banlieue évidemment attachant, on connait cette musique, et elle m'agace vraiment, mais je ne m'étendrai pas car le film est très loin de se résumer à cette scène qui dure à peine 5 minutes. Je retiendrai la justesse sous bien des points du portrait de certains jeunes de banlieue, la justesse des comédiens, le parlé et certaines situations truculentes, les histoires d'amour surtout touchantes et en même temps un peu délirantes et abracadabrantesques, mais comme souvent à cet âge, ainsi que l'utilisation du théâtre pour exprimer certaines thématiques. Abdellatif Kechiche nous sort là un petit bijou, je le conseille vraiment pour sa fraicheur mais pas sûr non plus que ça plaise à tous ( j'aurai prévenu :mrgreen: )

quelques captures des protagonistes

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Re: L'esquive de Abdellatif Kechiche

Messagepar phoenlx » lun. oct. 29, 2012 6:02 pm

En fait ce genre de films ça me rappelle ma jeunesse, chacun ses références :lol:
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Meleor
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L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar Meleor » mar. nov. 26, 2019 3:23 am

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L'Esquive est un film français réalisé par Abdellatif Kechiche, sorti en 2004. Le titre provient d'une réplique d'Arlequin dans Le Jeu de l'amour et du hasard de Marivaux, à l'acte III, scène 6.

Synopsis

Un groupe d'adolescents d'une cité HLM répète, pour leur cours de français, un passage de la pièce Le Jeu de l'amour et du hasard de Marivaux. Abdelkrim, dit Krimo, qui initialement ne joue pas dans la pièce, tombe amoureux de Lydia. Pour tenter de séduire celle-ci, il obtient le rôle d'Arlequin et entame les répétitions. Son caractère timide et maladroit s'avère être un frein à sa participation à la pièce ainsi qu'à l'aboutissement de ses projets avec Lydia.





Cinéma "L'esquive"
99 712 vues•2 juil. 2012

Ina Culture

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8 janvier 2004
C'est l'événement cinématographique inattendu de la semaine , le film "L'esquive" qui a pour thème une cité de banlieue où les jeunes ont à étudier Les jeux de l'amour et du hasard de Marivaux pour un spectacle de fin d'année. Extraits du film en alternance avec des interviews des acteurs Nanou BENAHMOU, Sabrine OUAZANI, Sara FORESTIER et du réalisateur Abdellatif KECHICHE. Images d'archive INA
Institut National de l'Audiovisuel


https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Esquive


Analyse:

Fils d'un détenu et d'une mère négligente, Abdelkrim dit Krimo est un jeune de banlieue attachant, mais qui traverse une crise d'adolescence. Il commence à esquiver sa bande de potes, des ados comme lui qui jouent les caïds, ainsi que sa petite amie Magalie, amoureuse folle de lui. C'est qu'enfermé dans la routine de sa vie de quartier, il aspire à autre chose, comme en témoigne, symboliquement, la fascination qu'il nourrit pour les voiliers (il en collectionne les dessins de son père).
Suite à une énième rupture avec Magalie, il assiste à une scène qui va peu à peu le bouleverser : Sa camarade de classe Lydia, aussi extravertie et loquace que lui-même est réservé, négocie avec culot l'achat d'une robe pour sa pièce de théâtre auprès d'un homme d'affaires asiatique. Dès lors, Krimo se sent attiré par cette mordue de théâtre, qu'il croyait, pourtant, connaître depuis toujours ; jusqu'à s'inviter dans son groupe de spectacle scolaire, en passant outre, ainsi, sa timidité naturelle, son aversion pour la lecture et l'interprétation, et les codes de son entourage qui tiennent le théâtre pour un loisir de "bouffons", de "pédés".
Mais n'est pas comédien qui veut, surtout lorsqu'il s'agit d'interpréter une comédie classique du XVIIIe siècle, Le Jeu de L'Amour et du Hasard de Marivaux. Affublé d'un costume à carreaux, le jeune caïd tente de jouer Arlequin, le prétendant d'une Lisette interprétée par Lydia. Si cette dernière néglige (ou feint de négliger) leur amour naissant alors mis en abyme par la pièce, et parvient à tenir son rôle en faisant fi de ses vrais sentiments, Krimo s'en montre incapable pour sa part, allant jusqu'à embrasser Lydia contre son gré, avant de renoncer piteusement à la scène.
Son amour pour Lydia n'est pas condamné pour autant. En effet, Magalie, qui menaçait jusqu'ici sa rivale de représailles si elle répondait aux entreprises de Krimo, en vient, pour de bon, à rompre avec lui. Lydia, que le jeu d'acteur de Krimo n'est pas parvenu à rebuter, n'a, semble-t-il, plus de raison d'esquiver ses avances.
Elle ne manquera pas de le faire une dernière fois pourtant, mais qui peut l'en blâmer ? Certainement pas les piètres organisateurs de leur tête-à-tête (ses amies Frida et Nanou, et surtout Fathi, le meilleur ami de Krimo) : ils ont arrangé une rencontre dans des conditions rocambolesques, en absence de toute intimité, dans une voiture volée de surcroît.
Finalement, la pièce se joue et obtient un franc succès. Sans Krimo, amer, qui ne l'aura observée que partiellement, à l'écart, avant de repartir comme il est venu. Ravie pour sa part, délestée de la pression du jeu et de la représentation, ainsi que d'un sentiment de culpabilité à l'égard de Magalie, Lydia semble disposée à s'entretenir désormais avec son prétendant ; sitôt le spectacle terminé, elle cherche à le joindre, mais c'est au tour de Krimo de l'esquiver.
Ce film s'inscrit dans la tradition du cinéma de Kechiche : Prédominance de la caméra portée, prédilection pour le cadrage intime ; tentative d'effacement du narrateur au profit du jeu des acteurs et de la signifiance de menus détails ; longues séquences, plans homogènes, simplicité du décor, intelligence et/ou économie de la musique de fond ; sujet sociétal, scènes de la vie ordinaire, transformation psychologique du héros restituée sobrement (mais avec une science des propriétés expressives du langage et de l'image, tant au niveau des dialogues, que dans la mise en scène ou le travail de montage)... En s'inspirant des codes thématiques, narratifs et stylistiques du film documentaire, le travail de réalisation obtient un effet de réalisme étonnant pour une œuvre de fiction.
L'Esquive se construit autour du personnage de Krimo. Les lieux du récit le concernent directement (son quartier, son école, son appartement) ou indirectement à travers ses amis. Le temps du récit est celui de son premier amour (au sens biologique, psychologique et culturel du terme). L'action se développe à partir de sa vie affective et de ses sentiments pour Lydia (désordre affectif, puis naissance et évolution du sentiment amoureux) ; concrètement, la transformation comportementale de Krimo au cours du film, qu’il est lui-même incapable de comprendre et d’expliquer, fait l’objet d’analyses et de ragots de son entourage qui alimentent et dynamisent l’action. Les différents thèmes (l'amour, l'adolescence, la vie de banlieue, le langage, le théâtre, la violence...) rendent compte de la situation psychologique et sociale du héros (sensibilité propre, type de personnalité, nature et degré de conversation, niveau de maturité psychologique et sociale, type et niveau d'éducation, valeurs sociales...) et de celle de l'entourage avec qui il interagit. Krimo est à l'origine ou partie prenante de nombreuses scènes tragi-comiques du film (garçon introverti qui s'essaie au théâtre, caïd de banlieue interprétant un personnage burlesque, zonard de cité dont l'argot contemporain tente de se concilier avec le marivaudage classique, macho amoureux fou malgré lui, adolescent qui se cherche sans se trouver…)
Les séquences tendent à raconter, à partir de rapports de force, de petites histoires dans la grande histoire. Ces rapports de force semblent voués à une explosion de violence, mais, à la surprise du spectateur, trouvent une issue tempérée (sauf la fois où, à l’étonnement du spectateur là encore, Fathi finit par frapper Frida). C'est que le langage verbal et corporel des jeunes de la cité (filles comprises) reste machinalement empreint de vulgarité, de phallocratie et d'agressivité, même quand il s’agit d’exprimer de la tendresse et de partager de bons moments. Le spectateur en vient à le constater par lui-même, au fur et à mesure qu’il fait connaissance de Krimo et de ses amis, de sorte qu’il apprend à déceler, derrière la violence conventionnelle des jeunes du quartier, la réalité d'une universalité humaine. Le point d’orgue de la transformation intellectuelle du spectateur survient lors de l’arrestation des adolescents : S’ils sont bien coupables du vol de la voiture, le spectateur peine toutefois à porter sur eux le même jugement que celui des policiers, plein d’incompréhension et de mépris ; ceux-ci ont beau être issus des cités également, comme on le devine, ils restent incapables de voir la délinquance autrement que comme un fait de racaille. C'est l'une des forces du film de convaincre le spectateur que les débordements des jeunes, livrés à leur sort, ne déprécient en rien, au fond, l'humanité et les idéaux qu'ils portent. (A noter également que, dès la première scène, où s'élabore un règlement de comptes entre jeunes, les potes de Krimo invoquent la compassion, le sentiment d'injustice, pour légitimer leur désir d'en découdre).
De ce film qui se veut réaliste et soucieux de traiter nombre de problèmes des banlieues, il ressort chez le spectateur un optimisme inattendu, une envie d’y croire et d’espérer (à la différence d'autres films produits dans les années 2000 sur la vie des cités). La réalisation du film façon documentaire sert, paradoxalement, un parti pris de Kechiche sur la jeunesse des quartiers. Kechiche tente d’amener le spectateur à se faire une autre idée de la cité, à lui restituer, au-delà des apparences et des clichés, son irréductible humanité. Passé le choc de la violence formelle, on découvre des jeunes de banlieue dans leurs diversités, leurs contradictions, leurs bons et mauvais côtés, leurs singularités (Krimo est un caïd romantique, Lydia, dont la faculté de manipulation contraste avec une hypersensibilité, se perd entre séduction et pudeur, témérité et anxiété, Fathi est un authentique voyou mais dont le sens de l’amitié se révèle sans faille, Frida témoigne une capacité tant de compassion que de cruauté…) Du film documentaire, Kechiche en exploite la vocation pédagogique ; l’effacement du narrateur a pour résultat de permettre aux jeunes de la cité de se présenter eux-mêmes (quelques plans, à cet égard, laissent volontairement voir les failles du travail cinématographique, les maladresses de comédiens recrutés en banlieue pour une bonne partie). Et les jeunes semblent prendre la parole pour dire au spectateur : « Nous voici tels que nous sommes ; sommes-nous les monstres terrifiants que vous vous représentiez ? » Dès lors, le titre polysémique de l’Esquive - inspiré d'une réplique d'Arlequin dans la pièce de Marivaux - suggère, dans son sens général, l’idée d’une réalité complexe dont on se refuse à admettre (plus ou moins lâchement) la véritable nature, la valeur existentielle même.
Une question développée à partir de la pièce de Marivaux restera finalement non tranchée dans le film. Elle se pose en ces termes : Est-ce que les hommes sont fatalement prisonniers de leur condition sociale ? La révolution française nous a appris à répondre par la négative. En laissant la question en suspens, en faisant précéder la représentation finale de la pièce par la parabole des oiseaux en quête de sens existentiel et de paix sociale (une parabole jouée par la génération suivante d’enfants de la cité dont un petit Abdelkrim qui ne sait pas son texte), Kechiche interpelle directement le spectateur et la société française de son temps sur le statut des cités, en termes de pacte républicain (liberté, égalité, fraternité).



Récompenses

Festival du film Entre vues de Belfort 2003 : Grand prix du long métrage français, Prix du public

César du cinéma 2005:

César du meilleur film
César du meilleur réalisateur
César du meilleur scénario original ou adaptation
César du meilleur espoir féminin pour l'actrice principale, Sara Forestier.


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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar Meleor » mar. nov. 26, 2019 3:59 am

http://salon-litteraire.linternaute.com ... e-a-la-rue

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Confessions d’un acteur déchu : De l’Esquive à la rue

Editeur Stock
Thèmes Arts Autobiographie Cinéma Culture
Brigit Bontour 23/05/2016 Commenter Ecrire une critique


En 2004, Osman Elkharraz était l’espoir cinéma de l’année. Il venait de tourner l’Esquive d’Abdellatif Kechiche, son visage se retrouvait en grand sur les bus et au fronton des salles obscures. Lui, le jeune beur sorti de nulle part éblouissait par son jeu et sa fraîcheur face à Sara Forestier en récitant du Marivaux.


Repéré à la Défense par une directrice de casting, il obtient le premier rôle masculin de l’Esquive. Le tournage est une parenthèse plutôt heureuse même si les heurts avec l’équipe et surtout le réalisateur sont légions. Le garçon qui a vécu une enfance heureuse mais sans normes, a perdu ses parents quelques années plus tôt et a du mal avec l’autorité. Complètement désorienté, seul, sans appui, il réagit à ce qui lui paraît injuste, ne supporte pas de refaire cinquante fois la même scène.

A treize ans il ne gère pas plus le gouffre qu’il y a entre un plateau de tournage et son cadre de vie qu’il retrouve le soir, le pavillon de banlieue dépourvu d’électricité, et qui finit par flamber, mettant au jour un trafic de mobylettes stockées dans la cave ; la cohabitation avec une partie de sa famille presque aussi jeune que lui.
Très vite, une fois le film terminé il retourne aux trafics, à la débrouille. Son orientation en fin de troisième en électrotechnique ne lui convient pas. Il devient guetteur, vendeur, squatte par ci par là. Quand le film sort enfin, il connaît un répit. A nouveau, il est invité, fêté, même si là encore il se sent à la fois stigmatisé et balloté d’un monde à l’autre. Après les Césars, les flashs des photographes, dans le taxi du retour, il voit « le paysage qui se dégrade au fur et à mesure » antre le centre de Paris et la banlieue.

Grâce au soutien d’une bonne âme, il a la possibilité de commencer le cours Florent, d’avoir un ou deux petits rôles mais, happé par l’argent facile, il ne poursuit pas avec de plus ou moins bonnes raisons : "le cinéma et moi on n’était pas dans la même réalité et dans la mienne on faisait pas semblant".
Au final, à vingt sept ans, le seul titre de gloire du garçon, après son rôle dans l’Esquive est de ne pas avoir connu la prison. Miracle ? Oui sans doute, car à ce jour, entre deals et petits boulots, promesses vaines et codes qu’il n’a jamais acquis, Osman est plus précaire que jamais.
A la lecture de ce témoignage touchant écrit à quatre mains avec Raymond Dikoumé, il est difficile de se faire une idée de la personnalité d’Osman entre déterminisme social et flemme caractérisée.
Tout est allé trop vite dans sa vie, la perte de ses parents, le film, les opportunités loupées les unes après les autres et le retour perpétuel dans sa zone de confort, la banlieue. Mais surtout, il y a la solitude du gamin. Il est seul quand il se présente au casting, seul pour décider de la façon dont il doit se conduire et c’est incontestablement son impulsivité adolescente qui l’emporte. Il n’a aucun adulte référent autour de lui. Ni ses oncles et tantes qui ne l’aident beaucoup, ni des éducateurs croisés de temps à autre ne lui donnent la marche à suivre. Le voudraient-ils d’ailleurs qu’ils ne le pourraient pas.
Car ce qui émerge en creux à la lecture de acteur déchu est le fait que le cinéma est avant tout un monde de privilégiés, de bobos qui ont une culture classique et les moyens de sortir, d’aller au théâtre, ce que n’a pas Osman.
Pour un acteur d’origine non européenne, qui a réussi, combien se sont fracassés sur l’autel des espoirs brisés et sont revenus à leur misère intellectuelle et pécuniaire ? Grâce à ce livre poignant, le jeune comédien tient peut-être là une nouvelle chance de s’en sortir. On le lui souhaite.

Brigit Bontour

Osman Elkharraz avec Raymond Dikoumé, Confessions d’un acteur déchu : De l’Esquive à la rue, Stock, mai 2016, 229 pages, 18,50€
Brigit Bontour 23/05/2016






https://fr.wikipedia.org/wiki/Osman_Elkharraz

Osman Elkharraz est un acteur français né le 9 décembre 1989.


Biographie:

Osman Elkharraz, d'origine marocaine, grandit à Colombes (Hauts-de-Seine) dans un milieu très défavorisé[évasif]. Sa mère meurt alors qu'il a neuf ans. Son père, qui est incarcéré au Maroc, meurt à son tour trois ans plus tard. Livré à lui-même avec son grand frère, il sombre dans la petite délinquance et commet son premier cambriolage à onze ans1.
En 2002, il est remarqué par hasard à Auchan par des responsables de casting qui cherchent des jeunes acteurs non professionnels. Il est alors engagé pour tenir le rôle principal masculin du film L'Esquive d'Abdellatif Kechiche, où il joue Krimo, un jeune adolescent qui vit dans une logement social. Le film reprend le thème de la pièce de Marivaux Le Jeu de l'amour et du hasard1.
Le tournage du film est difficile pour Osman Elkharraz qui, rétif à l'autorité du metteur en scène, finit par injurier ce dernier devant toute l'équipe. Lors de la sortie, il est largement écarté de la promotion du film, qui lui vaut cependant une nomination au César du meilleur espoir masculin. En dépit du succès commercial remporté par L'Esquive, il ne touche pour son rôle que 2800€, versés plusieurs années plus tard lors de sa majorité1.
Après L'Esquive, il tente de poursuivre une carrière d'acteur et s'inscrit au cours Florent. Mais contrairement à Sara Forestier et Sabrina Ouazani, également révélées par le film, il ne parvient pas à s'intégrer dans le milieu du spectacle. Il retombe dans les difficultés dont le tournage l'avait momentanément sorti, vend du cannabis à La Défense, travaille comme coursier ou éboueur et est, pendant un temps, SDF. En 2016, il publie un livre témoignage intitulé Confessions d'un acteur déchu : De l'Esquive à la rue, relatant comment le cinéma l'a « oublié et rejeté » aussitôt après le succès du film de Kechiche2,1.

Filmographie:

2004 : L'Esquive d'Abdellatif Kechiche
2006 : SOS 18 (un épisode)
2008 : Nés en 68 d'Olivier Ducastel et Jacques Martineau



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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar phoenlx » mar. nov. 26, 2019 10:21 am

je l'ai vu ce film il y a un certain temps, j'avais beaucoup aimé !! les personnages, les acteurs, l'interprétation, les dialogues ... du très bon Kechiche

En revanche le dernier que j'ai vu de lui (son film le plus récent) pourra diviser plus :mdr:
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Messagepar Bombur » mar. nov. 26, 2019 12:34 pm

Je l'ai téléchargé récemment...

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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar phoenlx » mar. nov. 26, 2019 1:04 pm

par contre je vous préviens ça parle beaucoup dans ce film :mdr:
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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar Scarabéaware » mar. nov. 26, 2019 7:16 pm

Wesh y aura de quoi voir que z'y va j'y compte bien m'en occuper à un moment :mdr:.

Et sinon Pho tu voulais dire : beaucoup ou pas beaucoup ? :mrgreen:
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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar phoenlx » mar. nov. 26, 2019 7:44 pm

non il y a beaucoup de dialogues c'est très présent, ça parle énormément, ça fait un moment que je l'ai vu mais de mémoire ils répètent pour une sorte de pièce de théâtre en plus donc il y a beaucoup de répliques associées en plus des autres dialogues.

J'avais trouvé Sarah Forestier très impressionnante dans ce film (et en même temps impertinente, mais elle marque l'esprit)
alors que dans les autres films ce n'est pas une actrice qui m'enthousiasme tellement (il faut dire que j'en vois pas des masses non plus) mais c'est la force de Kechiche, je trouve qu'il sait magnifier certains acteurs (notamment féminins) il arrive à leur donner une vraie présence à l'écran.
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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar Meleor » mer. nov. 27, 2019 10:33 am

Sinon l'acteur qui joue le héros lui aussi s'est pas du tout entendu avec Kechiche et il nous a révélé des trucs qui en rajoutent au passif du réal pour l'idée qu'il prend ses acteurs comme des objets! Comme quoi la mère du héros lui crache dessus et il a dit à l'actrice n'hésite pas vas-y à fond et l'acteur nous a dit que ça l'avait choqué à mort, car il avait 13 ans de se faire cracher dessus comme ça comme si c'était rien! :shock: :shock: :shock: :shock: :transpire:

Bon sinon oui j'avais beaucoup aimé ce film et en grande partie pour ce fameux bla bla littéraire lol! :PTDR: :PTDR: :PTDR: Et l'acteur principal était trop mignon! :mrgreen: :saute: :saute: :saute: :saute: :saute:

Bon faut que je retrouve mon dvd pour le revoir mais aussi avant ça que je découvre le premier film de Kechiche "La Faute à Voltaire"! :saute: :saute: :saute: :saute: :saute: :saute: :saute:

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Messagepar Bombur » mer. nov. 27, 2019 3:41 pm

et l'acteur nous a dit que ça l'avait choqué à mort, car il avait 13 ans de se faire cracher dessus comme ça comme si c'était rien!
Bah là c'est de l'orgueil mal placé, c'est un acteur, il joue un rôle.

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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar Scarabéaware » mer. nov. 27, 2019 6:00 pm

Oui c'est clair, je suis d'accord avec Bombur. Après on peut comprendre qu'à 13 ans il l'ait mal pris mais en grandissant ça aurait du évoluer dans sa tête. Bien sur il se sera retrouvé dans la merde mais il s'agissait de toute façon de jouer, donc Kechiche aura poussé pour le réalisme j'imagine, c'est pas le premier réalisateur à violenter un peu ses acteurs :siffle:. Et puis c'est moins grave que d'avoir été possiblement abusé sexuellement, là par contre je dis pas. Mais lui faut qu'il s'en remette.

Sinon le fait que ça parle beaucoup, oui donc y a de quoi se douter vu le fait de répéter et tout lol.

Ah pis Sara Forestier j'ai pas encore trop vu de films avec elle, ça me permettra de la découvrir plus amplement et puis faudra que je tente d'autres films avec elle.
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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar phoenlx » mer. nov. 27, 2019 7:12 pm

justement dans les autres je la trouve tout à fait banale voire chiante
mais dans ce film elle m'avait impressionné

bon mais j'ai pas vu des masses de films avec elle non plus faut dire
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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar Scarabéaware » mer. nov. 27, 2019 7:45 pm

Bah en fait je voulais vérifier mais je vais plutôt te poser la question. Est ce que t'as vu les films suivant avec elle ?
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Re: L'Esquive (Abdellatif Kechiche, 2004)

Messagepar phoenlx » mer. nov. 27, 2019 8:36 pm

non mais le nom des gens le trailer ne m'emballait pas plus que ça :lol:
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Re: L'Esquive

Messagepar phoenlx » ven. févr. 28, 2020 3:32 pm

au fait Meleor je viens de me rendre compte que j'avais déjà créé un topic en 2012 sur l'esquive, j'ai fusionné ton topic avec le mien du coup !
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