
"Un rendu visuel sans précedent" nous a seriné James Cameron. Ce n'est pas faux. Et on s'immerge bien vite dans la 3D et on a le plus souvent l'impression de se retrouver devant un final fantasy n - de dernière génération bien sûr - et pas dans un film humano resconstitué. Bref, première constatation, c'est un dessin animé. Superbement animé - on dépasse sans peine Final Fantasy silent children pour ceux qui connaissent - avec une richesse de détails impressionnantes, on en prend certes plein la vue. Le design des vaisseaux et divers méchas et autres dispositifs et technologies futuristes, tout comme celui des personnages, a reçu, c'est visible à chaque instant, un soin méticuleux et inventif, garantissant un dépaysement et une immersion des plus totales ! Un bonheur absolu sur cet aspect là.
La musique est grandiose et épique à souhait, et le son excellent du reste. Les scènes sont impressionnantes, et souvent auréolées d'une certaine poésie (dans la veine de FF donc). Le scénario est complexe, source de nombreux clifhanger (trop sans doute, les deux derniers sombrant je trouve dans un n'importe quoi très handicapant ...) .
Première constatation, l'histoire est un reboot total et bien qu'on y perde sans doute toute la précision et la démesure du projet original (ou plutôt des projets originaux puisque le premier - le deuxième en France, sous le nom d'Albator 84, se focalise sur la révolte d'Albator contre les humanoïdes, là où le deuxième - le premier en France avec le nom d'albator 78 - étudie l'invasion sylphidres ..), l série est coutumière du fait, en témoigne le fameux rôle passerelle de Tadashi (signifiant "la voie juste"), nommé ici Logan en VF, et mieux connu chez nous sous le nom de Ramis (dans Albator 78). Ce rôle est présent dans chaque saga, avec un âge identique, mais un background différent. Ce qui rend délicat l'idée même d'une continuité réaliste des événements. Bref, s'y retrouver dans les différentes chronologies de Matsumoto est une gageure impossible.
Retour au film de cette fin d'année 2013. C'est à la société Océans films qu'on doit le bonheur d'une sortie sur grand écran en France trois mois à peine après la sortie officielle au Japon.
Je ne vais pas vous spoiler trop l'histoire mais quand même vous présenter les différents partis et personnages.

Pour des raisons que vont dévoiler l'histoire Albator est tout seul - avec son équipage classique dans l'Arcadia (le death shadow en VO, les sous-titres étant hélas remis à moitié à la sauce de la vf d'origine - ce qui est gênant car on entend Captain Harlock - le vrai nom d'Albator - à tout bout de champ), tout en gardant la moitié des personnages en version original, composé notamment de son amie extra-terrestre Miimay (Mim en français), de sa seconde Kei (Nausicaa) - disposant d'un magnifique moment en position foetale nue comme un ver lorsqu'elle prend sa douche, fan service oblige mais moment absolument magnifique car le chara design de Kei est ici à tomber - et de son autre second Yattaran (Alfred) - contre la fédération Gaïa, dans un monde où toute l'humanité est disséminée dans des planètes stériles de l'univers.
Gaïa détruit tout vaisseau cherchant à reprendre pied sur la Terre, et ne rencontre qu'un seul obstacle sur sa route : Albator.
Et son vaisseau-fantôme de l'Espace : le Death Shadow en vo (L'Ombre de la Mort= l'Atlantis en français ou l'Arcadia en VF ici ) (difficile à suivre, hein)


Voilà en gros, l'histoire de base, rajoutez-lui 1 but révélé d'Albator, 1 but caché d'Albator, 1 secret concernant la Terre, 1 cliffhanger sur ce secret, 1 cliffhanger sur les révélations faite au nouvel arrivant dans l'équipage de l'Arcadia, 1 autre cliffhanger sur ces mêmes révélations, 1 cliffhanger sur la réaction d'Albator, 1 cliffhanger sur le début de l'attaque finale, 1 cliffhanger sur ce cliffhanger, 1 autre cliffhanger sur ce deuxième cliffhanger de combat, 1 troisième cliffhanger concernant la Terre, et 1 dernier cliffhanger sur la vraie nature de l'Arcadia et de Harlock.
Oula, faudra que je revois le film - notez que je n'ai parlé que des clifhangers principaux - il y a trois autres cliffhangers du côté du parti Gaïa et 2 du côté de Tadashi ... mais ils concernent plutôt les ennemis d'Albator, bien que ceux-ci aient pour conséquence deux cliffhangers dans l'histoire principale.
Bref, ce film est une succession de cliffhangers tout le long. Mais pas que - heureusement car les derniers cliffhangers sont comme je le disais je trouve légèrement abusé ! surtout les deux derniers concernant la nature d'Albator et de l'Arcadia ... - car c'est aussi une étude de caractères très réussi, mais uniquement pour les rôles principaux qui sont pour être exhaustif : Albator, sa muse Miimay avec un rôle dépassant largement celui de harpiste ici, Tadashi, son frère Erza, la femme d'Erza, et ma foi c'est tout, avec Yattaran dans le rôle de la grande gueule et de Kei de la beauté fatale idéaliste. Je regrette fortement que Kei et Yattaran n'ait pas ici eu le droit à un arc digne de ce nom, tout comme Miimé d'ailleurs ... Bref, c'est le principale reproche que je ferais à cette adaptation : un manque d'approfondissement des personnages.
Par contre, le développement des rapports entre Albator et Tadashi - Logan en vF - , avec là encore plusieurs cliffhangers, est une histoire dans l'histoire, et une réussite scénaristique totale et magnifique.

Un autre gros reproche que je ferais est qu'ici Albator et son équipage n'ont jamais été aussi impitoyables. Oubliez le gentil Albator qui écoutait longuement la petite Mayu jouer de l'okarina pour lui avec un air mélancolique ... Et saluez l'Albator idéaliste, disant se battre pour la liberté, en fait en combat contre ses propres démons le rendant finalement insensibles à beaucoup de chose. On apprend cela dit à la fin la véritable nature d'Albator, et pourquoi il semble ainsi errer, psychorigide et en apparence impassible, dans son vaisseau. Le personnage reste extraordinaire, heureusement, et sans doute d'avantage qu'il ne l'a jamais été.Mais ce n'est pas un enfant de chœur en tout cas, n'hésitant pas à génocider à tout va tout ceux qui s'opposent à lui, flirtant sans arrêt avec le terrorisme interplanétaire, matérialisant dans sa rage calme et transie le dogme qui nous envoie annihiler l'essence même de ce qu'on aime au nom de la liberté pure et idéale, ici la brillance d'une idée surgie du passé comme une fleur qui éclot où elle ne le peut plus...
Albator est un ange de la mort, implacable, souvent injuste, impitoyable et sans pardon pour ceux qu'il combat.Mais c'est aussi un ange de la rédemption, voire ici de la regénérescence sensu stricto. Sa quête est LA quête de l'Homme dans l'Univers.Pas moins. Avec tout le dérisoire et la désillusion que cela suppose.
Bref, je ressors de cet avant première au grand rex avec une impression mitigée : superbes images, intrigue vibrant de la poésie dépressive et mélancolique de Square Unix, et incontestablement de celle de Leiji Matsumoto, le créateur originel du personnage, mais scénario maladroit et déstructurateur d'un mythe, heureusement d'une richesse conséquente, voire excessive. C'est heureux, on s'attache très fort aux personnages qu'on a tant de plaisir, même tous trahis les uns après les autres, à retrouver, quasiment intacts. On assiste à des affrontements spatiaux homériques - bien que mal introduits et quasiment brouillon dans le détail, ce qui n'empêche nullement d'épiques stratégies - Et on sort de la séance avec dans sa tête, trônant comme il le fait en son Arcadia, l'homme énigme de la soirée : Albator. Qui est-il ? Où va-t'il ensuite ? Son destin est sa légende.

Garçon.
"N'avez-vous donc point d'espoir ?" dit Finrod.
"Qu'est-ce que l'espoir ?" dit-elle. "Une attente du bien, qui, bien qu'incertaine, se fonde sur ce qui est connu ? Alors nous n'en avons pas."
"C'est là une chose que les Hommes appellent 'espoir'... "Amdir l'appelons-nous, 'expectation'. Mais il y a autre chose de plus profond. Estel l'appelons-nous.