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La Grande Encyclopédie des Lutins

Les univers médiévaux-fantastiques et de fantasy hors récits de Tolkien :
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Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar alexdelaLothlorien » dim. déc. 23, 2012 11:53 am

féond une fois tous les cent ans avec très peu d'éclosion de ses oeufs ==> en gros voué à la disparition :peur:
"Le Seigneur des Anneaux
Est une de ces choses :
Si vous l'aimez c'est bien,
Sinon vous criez bah !"

- Tolkien.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » dim. déc. 23, 2012 4:34 pm

alexdelaLothlorien a écrit :féond une fois tous les cent ans avec très peu d'éclosion de ses oeufs ==> en gros voué à la disparition :peur:

Oui je pense aussi, ils devaient pas être bien ,nombreux non plus

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Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar alexdelaLothlorien » lun. déc. 24, 2012 11:28 am

oui :lol:
"Le Seigneur des Anneaux
Est une de ces choses :
Si vous l'aimez c'est bien,
Sinon vous criez bah !"

- Tolkien.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » jeu. juin 27, 2013 1:10 pm

Les Akkas
Les dieux eux-mêmes disent les histoires de la création...
( Kathleen Raine )

Image

Taille :
Trente-quatre centimètres selon les Grecs.

Aspect :
Épiderme recuit et poreux. Médiocre corps grêle aux épaules plus étroites que le bassin. Poitrine plate. La tête volumineuse et bosselée se tient penchée sur un cou aussi mince que celui d'un poulet. Pieds tournés vers l'intérieur. Désavantagés par une constitution chétive, l'Akka s'est forgé par l'effort et les épreuves une carapace cornée qui lui a permis de traverser les millénaires et les multiples dangers des savanes sauvages.

Vêtements :
Nu à l'exception d'un pagne souvent décoré de coquillages ou d'un étui pénien. Parures de plumes et d'os dans les cheveux. Quelques Akkas d'Amazonie se peignent en vert des pieds à la tête et s'ornent de fleurs et de lianes. Les Kossobalas s'habillent avec le manteau de leur barbes.

Habitat :
Petites cases, refuges troglodytes ou paillotes tressées dans les arbres, suivant les ressources des lieux. Homère, Aristote, Hérodote les signalent aux sources du nil. Plus tard Stanley et je présume Livingstone croisent au Congo la population Vaoutas. Quant aux Akkas, "les Premiers Pères", le voyageur allemand Georges Schweinfurth ( 1836-1925 ) va les rencontrer lors de ses incursions en Arabie du Sud, dans le pays du Nil et l'Erythrée.

Nourriture :
Fruits, gibier, tout ce qui pousse à "l’extérieur" de la terre. Rejettent ce qui provient ou s'abrite dans les "entrailles d'Ymir" : patates douces, racines, larves, serpents...bien que depuis trois cent ans cet interdit semble levé chez ceux qui se sont installés à proximité des hommes.

Mœurs :
Les Akkas des premiers ages ne sont plus qu'un souvenir. Des unions avec des démons anthropophages ont donné naissance à de redoutables engeances. Les Achantis du Ghana craignent des petits génies à tête énorme. Au centre de l'Oubangui, les chasseurs mandjias disent qu'ils rencontrent parfois un nain difforme accompagné de chiens. Dans le golf de Guinée les indigènes redoutent de minuscules nains rouges à barbe blanche. les indigènes des forêts du nord du Brésil fuient devant les Sacis noirs à bonnet rouge capables de tuer à distance.

Activités :
Les Akkas ne sont guère impressionnés par les grands fauves, les crocodiles, ni même les éléphants qu'ils chassent à l'arc et au javelot. Très soucieux de perpétuer l'espèce, les Akkas du Congo préfèrent quant à eux, chasser les jeunes naïades s'ébattant dans les rivières. Celles-ci, effrayées de mettre au monde des rejetons de démons, portent un pénis factice sur le ventre pour détourner l’intérêt des suborneurs.

Pics et pioches piquent et piochent dans la chair du géant Ymir devenu terre, roche, foret. Les Alfes à peine sortis de leur état d'ébauche avancent dans le noir. Ils frappent maladroitement mais rudement les blocs de granit. Les gestes sont gauches, saccadés. Hier encore ils n'avaient pas de bras et rampaient ainsi que des larves aveugles. C'est Odin qui les a pétris, et certains portent encore sur la peau la marque des doigts divins.
Le regard est trouble, le génie derrière la prunelle n'est qu'une vague étincelle : qu'importe, les nains ont l'éternité pour apprendre ! Déjà mûs par un incontrôlable instinct, ils avancent, creusent, se décollent de la glaise initiale, attirés vers une irrésistible lueur pressentie par eux seuls.
Au cours des "sphaëles" - sortes de siècles - de leur cheminement souterrain, quelques différences se discernent : les uns issus de Niflheim ( monde du froid et de l'obscur ) cherchent l'ombre, ceux de Muspelheim ( monde de la chaleur et du feu ) la lumière.
Les Akkas ont germés si près du brasier de Muspelheim qu'ils sont tous carbonisés. Ils n'ont pas eu la chance, comme les Alfs blancs exposés à l'irradiante clarté, de devenir des fuseaux vivants de lumière. C'est le projection inopinée d'un piton glacé de Niflheim qui les a libérés et sauvés in extremis de la crémation.
Le fait d'avoir frôlé de près la mort renforcé le courage de ces nains plus boucanés que les autres, et ils se mirent les premiers à forer des galeries. S'ils tenaient à s'éloigner si rapidement des lieux qu'ils occupaient alors, c'est qu'Odin, après leur cuisson, les avait enfouis au frais sous la calotte arctique et qu'habitués aux radiations du feu, ils ne pouvaient rester une seconde de plus à se geler le fondement dans la banquise. Ils redoublèrent donc de pelletées, se réchauffant uniquement par leur ardeur au travail...ce qui, une fois installés chez eux, les dégouta à jamais des efforts intensifs.
Tandis que passaient les "sphaëles", les Akkas étaient les seuls encore à creuser. Ils creusaient. Creusaient toujours. Traversaient des mines de plomb, de charbon, de sel. Dédaignaient les diamants, acharnés qu'ils étaient à découvrir quelque part au-delà des couches terrestres sans cesse renouvelées un nouveau Muspelheim.
Enfin, à force de précautions, à mesure qu'ils avançaient, la terre se fit tiède aux talons, puis chaude, et, tandis qu'ils remontaient vers le sommet, presque brulante !...Ils se hissèrent hors du tunnel sous un soleil torride. Des eaux lentes et lourdes baignaient des rives craquelées avant de s'évaporer vers des déserts de torpeur. Ce paysage brûlé les mit en joie, - ils s'évanouirent dans la savane, sous les baobabs, disparurent des les mirages des dunes...
Les Akkas s’apprêtent à fonder les grandes races pygmées encore vivantes de nos jours. Ils sont arrivés aux porte de l'Eden ! Ils en sont l'âme. Bâtards plus ou moins méprisés des dieux nordiques, ils deviennent les enfants chéris de ceux du Sud. Les indigènes à la fois respectueux et craintifs ne cesseront jamais de les vénérer et de leur offrir rituellement bétail et jeunes vierges. Que résonnent les tam-tams pour annoncer par toute l'Afrique l'arrivée de ces petits maîtres des éléments qui ne tiennent pas en place et s'éparpillent le long du Niger, du Congo, recherchent les touffeurs équatoriales des jungles, les étendues du Cameroun, du Gabon. Ils traversent les mers chaudes jusqu'au Bengale, aux Philippines ; se laissent dériver vers les villages incarnadins dans les couchers des soleil des Amériques, sur le Rio Grande, les cendres du Colorado...
Ils ont épousés en route des filles à la peau sombre, aux yeux d'amadou qui enfanteront Oknas, Bouhouas, Watta, Datouas, Altas, Mincopies et autrees coriaces ramification échappées aux recensements des explorateurs.
Leur "survivance" est aujourd'hui menacée en même temps que les derniers paradis équatoriaux.
Modifié en dernier par Náin le ven. juil. 12, 2013 6:30 pm, modifié 2 fois.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » jeu. juin 27, 2013 2:52 pm

Les Pitikos et autres Pygmées
Sur des corps qui ressemblent à l'esprit fugitif de la nature jamais immobile.
( Kathleen Raine )

Image

Taille :
Harmonieux. Peau cuivrée, cheveux bouclées et dorés, profil grec. Ils enlaidirent tout au long de leur déclin jusqu'à devenir de vilains nabiots contrefaits.

Vêtements :
Parés d'étoffes blanches et légères, chitons et péplums soyeux, ils s’arnachèrent ensuite de petites armures de bronze qui hélas éclataient comme des carapaces de gambas dans les tenailles des becs et l'étreinte des serres ennemis.

Habitat :
Se contentaient avant la guerre de Dënoe de bâtir de légères cabanes fleuries sur les pentes parfumées de Thrace. Ils ont dû ensuite s'enfoncer sous les roches de la Bulgarie.

Nourriture :
Ne dédaignaient pas la chair des grues avant d'en devenir la pâture principale et favorite.

Mœurs, activités :
Cette civilisation autrefois riche, joyeuse et intensive, une fois frappée par les déesses, ne connut plus jamais de jours heureux et dégénéra. Obsédés par les piqués meurtriers des oiseaux, les Pitikos s'acharnaient à détruire les couvées de grues nichées sur les aplombs déchiquetés des cotes ou tentaient d'inventer d'inefficaces machines de guerre. Parallèlement aux Pitikos, les lutinologues gréco-latins mentionnent aussi les Mirmidons ou Myrmidons.

Les Spithamiens :
Nains insaisissables que Pline situe le long du Gange après avoir déserté Chio, chassés par des chouettes alliées aux grues.

Les Oreillards :
Une autre espèce de nains aux grandes oreilles, dont on a perdu le nom exact car également réfugiée dans des contrées sauvages, fuyant les persécutions de volatiles revanchards. C'est au XVIe siècle que Pigafetta, compagnon de Magellan, décrit leur rencontre avec ces menus troglodytes aux oreilles si grandes que lorsqu'ils se couchent, l'une leur sert de matelas et l'autre de couverture.

"Ainsi monte jusqu'au ciel la voix éclatante du peuple ailé des grues, lorsque, fuyant les torrents et les tempêtes célestes, elles traversèrent à grand cris l’impétueuse mer et, portant la destruction et la mort à la race des Pygmées, livrèrent en descendant des airs un combat terrible", chante Homère. "Les grues, nuages sonores d'oiseaux de Thrace, fondent subitement sur les Pygmées qui, munis de leurs petites armes, courent aux combats inégaux. Incapables de résister, ils sont enlevés dans les airs par les impitoyables grues qui les serrent entre leurs ongles recourbés", ajoute le caustique Juvénal décrivant l'affrontement cruel des grues et des Pitikos. Lutte interminable et absurde née, comme souventes fois à l'époque, d'un caprice des dieux...
La belle Dënoe file le parfait amour avec le doux mais petit Pitikos Nico Damas. Ils se marient sous les oliviers fleuris et se calichonnent un poupon : Mopsos. En ces décors de péplum kitsch des temps mythologiques, on ne lésine ni sur les moyens, ni sur le spectacle, ni sur la figuration : la foule des héros, des déesses, des demi-mondaines, des demi-dieux, des dieux se pressent en grande pompes au baptême, autour du berceau ; on mange des moutons aux poivrons, du méchoui, des dolmas, du taram et des baklavas. Mais soudain, pareillement à la Fée Carabosse surgissant au mitan de la fête, étranglant les gais chants aux gosiers des invités de la Belle au bois dormant, apparaissent, voilés de courroux et d'éclairs, les oubliés de la liste : Artémis et Héra ! L’acariâtre et tellement susceptible Artémis, déesse de la chasse, et la Maitresse Héra, épouse de Zeus, et reine des cieux dans toute sa splendeur ulcérée ! A peine la pauvre Dënoe a-t-elle le temps de bredouiller une excuse, d'évoquer la lenteur du courrier, une erreur d'adresse, que déjà son jolie filet de voix croasse et caquette, que son profil de médaille s'allonge en bec, que ses cuisses rondes se perchent en pattes d’échassier, que son royal fessier se croupionne en plumet et que ses bras battent gauchement le ciel !
Nico Damas désespéré se rue vers son épousée de grue qu'un vent soufflé par les déesses oblige à étrenner ses nouvelles ailes, mais Dënoe, dont le cerveau s'est du même coup réduit à la taille d'un pois chiche, n'a plus qu'une seule idée en tête : récupérer son bien, le fruit de ses entrailles ! D'un coup de serre elle renverse son nain de mari et fonce vers le berceau aussitôt protégé par un armée de Pitikos. Ils font face avec ce qui leur tombe sous la main, fourchettes, louches, couteaux, et l'oiseau criblé, blessé, est obligé d'abandonner sa proie !
C'est cependant mal connaitre le cœur d'une mère et l’entêtement d'une grue. Elle est partie à tires d'ailes par les cimes, chercher du renfort parmi ses sœurs échassières et dès lors une guerre sans merci est déclarée...Ce ne sera plus que haines, attaques et massacres. Même après que le temps eut fini par effacer le souvenir du couple belliqueux et la raison de cette vendetta, les grues et les Pitikos ne cessèrent jamais leur combat.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » jeu. juin 27, 2013 5:07 pm

Le Petit Peuple des Mousses
Il est juste que la mousse des lieux ombreux et des creux des rochers appartiennent au peuple souterrain des nains. Livrée à leurs soins, on la voit bientôt se lustrer, se renouveler, s'imbiber de jeunes eaux et d'averses naissantes.
( Marie Gevers, L'Herbier Légendaire )

Image

Taille :
Microscopique...jusqu'à trente centimètres.

Aspect :
Il y en a de toutes les apparences : des microbiens aérophobes tout gris, des acrocéphales menus, des souriquets alifères, des corpuscules aigrettés, de chétifs homoncules moussus. A la fois végétal, animal, Fée et Nain, il peut être recouvert de duvet, d'herbe, d'une carapace de coccinelle, porter des ailes de papillon, un museau de belette, une queue d’écureuil, ressembler à un petit vieillard verdâtre aux cheveux et à la longue barbe de lichen. Le Kientibakori que redoutent les Jivaros Machiguenga se présente comme une tête plantuleuse portée par un "gros tas de racines gélatineuses et d'intestins". Le çipbelu est "un morceau presque invisible de l'arbre qui le porte". Les ramasseurs de mousse sont de "petits êtres gracieux pas plus grands qu'un capricorne".

Vêtements :
La plupart n'en ont pas besoin ; certains, de type Finzweiberl ou Verdier s'habillent de robes, de vestes, de manteaux, de bonnets de mousse, de lichens, de feuilles cousues, de plumes, de peaux ; le Champignonnaire Sabatéus de cuir roux afin de passer inaperçu parmi les teintes automnales et luisantes des champignons.

Nourriture :
Herbivores, insectivores, carnassier. Les plus minuscules butinent rosée et pollen ; les Sans-Bouches se nourrissent des parfums du sous-bois et des vapeurs de l'aurore.

Mœurs, Activités :
Reveuses et obscures. Ils se réunissent souvent autour de la Buschogrossmutter Huedren, de la Vieille Mère, des Arbres-Fays à Dryades. Une fois par mois, à la pleine lune, les Petites Femmes des mousses, Moss Maidens, Moswyfje, Lohjunfern, vont visiter les tertres des Huldres. Sinon tous les elficologues s'accordent à dire qu'ils ne savent pas ce qu'ils font. Leur plus grand ennemi est le "Chasseur Sauvage".

Le familier des forets, grâce à son sens aigu de l'écoute et de l'observation silencieuse, ainsi qu'à sa façon de se comporter avec le royaume sylvicole, aura tôt fait d'entendre, de voir, d'approcher le monde secret de l'Invisible animal.
Une fois les "Barricades Mystérieuses" franchies et le regard dévoilé, l'étendue forestière devient vivante. L'invité constate qu'en se retournant les guirlandes de lierre révèlent un essaim de nymphes ailés ; que ces parqueteries de jacinthes sont autant de fées azurales ; que les libellules ne sont pas libellules mais tourbillons de Fusaylles graciles ; qu'une fois leurs larges bonnets ôtés ces bogons de Spalliotes se dénoncent armée trognoneuse de Fijn ; qu'il en est de même des troupes casquées ou enjuponnées de "Coprines disséminée, et Micace...", des fougères, des papillons, crapauds, bouquets d'armillaires , pelotons de Mycène...Que le grand mimétisme coalescent se défige pour libérer de l'apparence ces visages couronnés d'antennules, ces épaules dentelées d'élytres : soies, ailes, cuisses, échinesn froufrous, capillaires, Fujole sybarique, Fée-raisonette, nain-Bucane, Argoulet minuscule, asperule siffleuse Caraquinet cendré, Cascaret des Hypnes toute la faune naine des collines minuscules des "sous-bois inférieurs" des mousses.
Le Petit Peuple sylvestre a mis de très nombreuses années avant de s'établir en certaines places déterminés par son caractère : les formations arborescentes liées au terrain, en limitant la lumière et dosant l'air, conditionnent des associations dites "aéricoles" ou "alf-aéricoles". Ceux qui restent attachés au sol sont dits "terricoles", adaptés à la vie de surface ( épigée ) ou à la vie souterraine ( hypogée ). Le "Pied Fourré" est un type hypogé, le "Verdier" un type épigé. Entre les deux se placent ceux qui se réfugient dans des terriers une partie du jour.
La vie terricole hypogée détermine des gabarits d'adaptation spéciaux. Le fait de creuser des galeries a effilé le corps, et cette existence souterraine, ajoutée à une vie épigée nocturne, influe sur les organes de la vue, qui s'atrophient ou s'hypertrophient.
La forêt abrite de nombreux types terricoles. Mais ce milieu sombre les force à gagner en partie les dehors aérés et lumineux soit par des fuites en plaines, soit par des ascensions vers les frondaisons et des sauts de branche en branche. Cette faune des sous-bois devient grimpeuse et planeuse.
Pour gagner les ramures, le Nain rongeur, mangeur de noisettes, d’œufs, de cônes de pins, est claviculé comme un singe, a pris des doigts agiles et griffus, un panache de poils à la queue pour servir de balancier et de parachute : c'est le "Guerliguet", le Silomeel type des forestiers aéricoles grimpeurs.
Les Veluvoltins insectivores, après avoir escaladé, sauté et plané au moyen de parachutes peauciers, se sont affranchis de tout support terrestre et sont devenus semblables à des chauves-souris aéricoles libres. A la période des gels où le plancton aérien qui le nourrit réduit à l’extrême, déjà réfugiés de jour, en été, dans les crevasses et les fissures des arbres d'où ils sortent au crépuscule, ils s'en vont hiverner, enveloppés de leur soyeuse membrane au plus profond des cavernes.
Les Ramasseurs, Hattia, Petits Hommes, Gardenets, Nains Berthes, Moss Manninkins, Sylvains de Mousse, Vert-Capuches, Vergris, Pchwist, Minimes, Mirlurons, Tottus, Roncins, Rododeras, Waldzwerge, Skritek, qui ne voyagent pas dans la forêt dense, se réfugient dans les terriers ou s'immobilisent dans les fourrés impénétrables : les "forts" ou "bastions".
Les Hupitoo et Mushii quittent très rarement la friche hirsute du "Lichen des Vents".
La vie du Petit Peuple des mousses est discrète, réglée sur l'horloge des fleurs, l'emploi du non-temps animal. Ils s'éveillent surtout à "l'heure du vol" - l'instant où passent les canards au-dessus du marais -, et sortent lorsque les effluves crépusculaires qui précédent l'heure bleue des bécassiers font rentrer l'homme au logis, au premier frisson de la nuit...

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » jeu. juin 27, 2013 8:16 pm

Robin Goodfellow
Not Robin Goodfellow, nor Robin Hood,
But Robin the encloser of Hatfield Wood.

( Algernon Cecil, Life of Robert Cecil, Londres, 1915 )

Image

Taille :
Soixante centimètres.

Aspect :
Roux, œil vif, oreilles pointues. On leur attribue exceptionnellement dans quelques contes et croyances deux petites cornes et même une queue de chèvre.

Vêtements :
Bonnet orné d'une plume, tunique et casaque verts. Ils portent un arc et des flèches glissées dans un carquois en peau de daim.

Habitat :
La campagne et les forêts magiques d'Angleterre. Dans les arbres, les rochers et dans les cabanes de fougères.

Nourriture :
Gibier, fromage, bière et cidre.

Mœurs, Activités :
C'est un coquin, en mai très actif à jouer de la cornemuse et à pincer les filles. Il vit en bande. Fréquente les fées des mousses et des sous-bois. Fraceur, aimable, enjoué, il peut prendre les armes si on le provoque. Dévalise et perce de ses flèches les félons et les scélérats. C'est lui, dit-on, qui plante la racine du printemps que le pivert rapporte chaque fois en, mars...

Robin Goodfellow, Robin Bon-Compagnon ou Robin Bon-Enfant, est un Gobelin de la dernière génération. Mais ce petit gaillard que W.Fisher dit "être né sur la pousse du chêne", tout comme son cousin Puck, n'est pas ordinaire, et fera couler beaucoup d'encre chez les chroniqueurs elfiques car c'est un "insaisissable" !
Il apparait dans le Nottinghamshire vers 1200. Son origine est bien fantasque et fait perdre la tête à tous les sages lutinologistes et savants elficologues qui ont tenté de suivre sa trace en zigzag ! Pas un seul ne donne de renseignements précis, chacun s'évertuant à étayer sa propre version de la biographie du "Lutin" vert !
Robin Goodfellow est-il "l'esprit", l'espiègle fantôme de Robin des Bois, mort en 1247 à Kirkless ? Le "bandit au grand cœur" était-il lui-même un Robin Goodfellow ? Son ami ? Un confrère ? Un parent ? Un jumeau ? Et les fameux joyeux compagnons, "les merry men"", étaient-ils des Hobgoblins ? Autant de questions restées sans réponse. Mais les légendes du Gobelin et celle de l'Archer se croisent, se mêlent, s'entrecroisent et s’entremêlent souvent.
En effet, tout comme les Robin Goodfellow, Robin des Bois est partout ! Il y a une butte aux Robin Goodfellow et une butte de Robin des Bois dans le Dorset. Deux croix servant de frontière portent leurs noms au Lincolnshire ainsi qu'une colline près de Gloucester. Ils sont présents surtout dans le Nottinghamshire, le Derbyshire, le Cumberland, le Cheshire et le Staffordshire, et ils ont construit quelques dolmens près de Chard, ainsi qu'à Tilston Fearnall.
Dans sa
Mythologie des Fées, Thomas Keightley nous apprend que Robin Hood est l'un des noms de Robin Goodfellow. Une image de 1638 le montre avec des cornes sur la tête et des pieds de bouc dansant comme un Puck-Gobelin au milieu d'un cercle de sorciers. Lors de son procès en 1316, Dame Alice Noon avoua qu'elle adorait un esprit appelé Robin Artison, sous les auspices duquel elle jetait des sorts en pratiquant la magie noire ! Nyls Wicanton signale que Robin des Bois est parfois connu sous le sobriquet de Robin Round Cap : Robin Capuchon, ainsi nommé parce qu'il porte une coiffe semblable à celle des Gobelins, et ses compagnons et lui-même sont vêtus de vert, couleur traditionnelle du Petit peuple ! Un proverbe anglais, "Passer par la grange de Robin", se traduit par "Prendre le chemin des écoliers" ou "le sentier des lutins".
Même costume, même aspect, mêmes compagnons, mêmes lieux fréquentés, même habilité au tir à l'arc, même agilité, même inclination pour le vol, le rire, la farce !
Joseph Hunter assure que Robin Hood serait né entre 1285 et 1295 et aurait été mis hors la loi pour avoir participé au soulèvement du duc de Lancaster. Les actes de la ville de Wakefield établissent qu'un Robin Hood aurait pris pour épouse une certaine Mathilde en 1316. J.M. Outch le fait naitre en 1225. Dans la
Paleoraphia Britanica,le docteur Stukeley fait remonter son "chêne" généalogique jusqu'à Waltheof, comte de Cumberland et de Huntingdon, qui épousa la nièce de Guillaume le Conquérant. Il existe dans le Staffordshire un bourg de Loxley où Robin aurait perdu ses terres. Robin, qui n'était encore que Robert de Fitzooth, aurait pris le nom de Robin des Bois pour gagner le maquis des forêts.
En 1247, réfugié dans un couvent, affaibli, il se meurt. En un ultime effort, il lance deux flèches par la fenêtre et demande à être enterré à leur point de chute. L'un de ces traits fut entrainé par la rivière Calder. L'autre tomba dans le parc, où l'on montre encore sa tombe.
Une fois Robin enseveli, les Robin Goodfellow disparaissent également. Il faut attendre une centaine d'année pour les voir resurgir, très pâles et le visage marqué par la tristesse.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » ven. juin 28, 2013 12:19 pm

Pipintu, Idsetti-deha et Oneitib
Il entra dans un monde où tout était petit, même la porte qui se referma sur lui...
( Anselme Krook, L’Espace inférieur )

Image

Taille :
De cinq à vingt centimètres.

Aspect :
Les nains sans anus sont très petits. Les Pipintu ont de longues barbes, mais ils sont chauves parce que toutes les ordures des humains vivants au-dessus d'eux leur tombe sur la tête. Les Idsetti-deha ont les cheveux rouges. Certains ressemblent à des paresseux. Contrairement à ces nains sans anus d'Amérique du Sud, les nains souterrains d'Amérique du Nord sont plus harmonieux et légèrement plus grands - de la taille d'un écureuil. Les Cœurs d'Alêne, qui doivent ce nom aux Indiens de langue salishen vivant dans l'actuel État d'Idaho, ont l'apparence de très petits êtres humains, qui grimpent le long des arbres à toute vitesse la tête la première. Ils portent sur leur dos leurs bébés emmaillotés tête en bas. Les Ohdows sont aussi jolis et élégants que les Elfes.

Vêtements :
Habits grossiers et rouges. Ceux d'Amérique du Nord sont généralement vêtus de tuniques semblables à celles des Indiens, taillées dans des peaux d’écureuil.

Habitat :
Claude Lévi-Strauss situe le domaine des nains souterrains sans anus du bassin du Xingu jusqu'en Amérique centrale en passant par l'Amazonie septentrionale.
Les Algonkins, les Sioux, les iroquois, les Creeks, les Cherokees, les Delaware, les Nez-Percé, les Amérindiens du Rio Grande au Canada connaissent plusieurs espèces de nains, assez semblables aux Abatwas d'Afrique du Sud, qui règnent sur toute la surface du dessous.

Nourriture :
Si les "sans anus du Sud" se contentent de humer les vapeurs des aliments, leurs cousins du Nord chassent et pêchent.

Mœurs, Activités
Ils aiment jouer des tours. D'autres cependant peuvent être dangereux : ils égarent les chasseurs dans la forêt ou les tuent à l'aide de flèches qui ne laissent aucune trace de blessure. Ils épousent volontiers des humains ou des Elfes. Leurs femmes ne peuvent accoucher, il faut leur ouvrir le ventre pour extraire l'enfant. Les Nunkui protègent les jardins. Les Ohdows contrôlent les esprits grâce à des pouvoirs magiques qu'ils utilisent toujours à bon escient. D'après les Iroquois ces nains chtoniens sont bons chasseurs. Ils se baignent dans une eau où ils ont fait macérer les rognures d'ongles d'humains pour prendre une odeur d'homme et mieux approcher le gibier.

A sept lieux des Gnomes, Koboldes, Wichtlein, Erdleute et Sidhe, les Mondes Inférieurs abritent d'autres nains très petits, enfants du "Monde de l'envers", dont les plus célèbres sont les Pipintu, que Claude Lévi-Strauss a longuement étudiés dans son remarquable ouvrage La Potière jalouse.
Ils sont minuscules, sortent si peu qu'ils sont restés inconnus durant des années. Lorsque leurs cris aigus fusaient sous l'inextricable végétation de la forêt, on croyait à des couinements de bestioles, quand l'un d'eux fuyait dans le cailloutis d'une falaise on croyait à un trottinement de rongeurs...jusqu'au jour où un Indien pourchassé par un ennemi se cacha au fond d'une excavation. Il se faufila plus avant encore de l'autre côté de la caverne et déboucha au cœur du pays des Pipintu, des nains sans anus, nourris de fumée. Ceux-ci accueillirent si aimablement l'intrus qu'il resta quelque temps parmi eux, fort étonner de les voir s’affairer, s'occuper, chasser en s'y prenant à l'envers...Tout comme ils inversaient le sens des mots : "lourd" pour eux signifiait "léger", "chaud" signifiait "froid" et "jour" "nuit" ; ils entraient pour sortir et sortaient pour entrer. Lorsque la faim les prenait, ils déposaient la nourriture sur leur nuque et la laissait glisser le long du dos ou, assis en cercle, reniflaient le parfum des aliments mijotant dans une marmite. Ils supplièrent alors l'Indien de leur faire un anus pareil au sien. L'homme essaya de les opérer mais les patients moururent l'un après l'autre. Ils étaient dépourvus non seulement d'anus, mais aussi d'intestins, et la nourriture qu'ils avaient cru ainsi possible d'avaler déchira leur intérieur. L'homme rentré parmi les siens raconta son aventure. L'histoire se propagea de bivouacs en villages, de huttes en tipis, et d'autres Indiens nomades y ajoutèrent des récits de semblables expériences.
Un Tukuma parla d'un peuple de nains, habitants du monde souterrain, qui se nourrissaient de l'odeur des mets. Un homme prit femme parmi eux. Elle voulut manger comme son mari mais la nourriture lui causa des douleurs atroces. Il lui creusa un anus avec son couteau afin qu'elle puisse évacuer mais elle mourut après.
Les Apaches Lipan révélèrent l'existence d'une race identique, dont l'anus n'était pas plus gros qu'une tête d'épingles, si petits que les malheureux ne pouvait se soulager et se nourrissait uniquement de la vapeur des mets. A leurs yeux, ces nains étaient des êtres bâclés, qui s'étaient échappés des contrées inférieurs avant que le créateur ait eu le temps de les achever.
Les Tacana rapportèrent qu'un jour un chasseur s'engagea dans un terrier de tatou et ressortit dans l'autre monde. Là vivaient les Idsetti-deha sans anus qui se sustentaient de gouttes d'eau et de l'odeur des mets. Pour eux les guêpes étaient des Indiens hostiles et les lièvres des jaguars. Le chasseur les délivra de ces terribles ennemis mais, bien que reconnaissant, lorsque les idsetti-deha le voyaient déféquer, ils en ressentaient un si profond dégout qu'ils le congédièrent et le reconduisirent à la surface de la terre.
Les Arapaho décrivirent des petits cannibales à voix d'enfant qui laissaient leur cœur accroché dans la maison avant de sortir, les Algonkins des "petits garçons" Makia'wis capables de se transformer en engoulevents, et les Sanema des nains appelés Oneitib, privés d'anus et d'intestins et creux en dedans, ce qui les rendait perpétuellement affamés.
Alors un trappeur qui avait beaucoup voyagé confia qu'il avait vu un Yaanaite qui mangeait par la queue, déféquait par la bouche et copulait par le museau. Mais c'était un Visage Pâle, et personne ne le crut.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » ven. juin 28, 2013 6:02 pm

III Ceux des Landes et des Collines

Les lutins
Negrant serpenz volanz, hisdous Noituns ( lutins ) ne montres perillous.
( Benoît, Roman de Troie )

Quelle chose est ung luiton, dist Estonne. Sire, dist Nascis, c'ets ung esprit qu'on ne peut voir et se délécte à décepvoir les gens.
( Perceforest, T.II, f° 13-XVI )

Ce n'est qu'aux lutins de luicter les morts.
( Montaigne, Essais, III-112 )

Image

En fait, rien n'est plus compliqué que de les décrire mais tout deviens d'une limpide évidence lorsque l'on a compris leur règles.

Taille :
Il est petit et grand à la fois, d'un demi-pouce à trente centimètres.

Aspect :
Il est unique et multiple à la fois, visible et invisible, propret mais sale nez et oreilles pointues. Mince et harmonieux. Œil pétillant et rond comme une petite noisette. Doigts longs, agiles. Cheveux abondants et touffus. Ils commencent à vieillir vers trois cents ans. La barbe pousse et s'allonge en même temps que le crane se dégarnit, et leur menu visage tout en pommette et presque sans menton se fripe comme une veille pomme réjouie. Prend du poids et du bedon avec l'âge.

Vêtements :
Haillons coquets de couleur verte et brune. Trés grand bonnet pointu rouge ou vert. Poulaines rapiécées. Ils aiment courir tout nus dans la forêt. Si en échange de leurs services on leur offre des habits neufs, vexés, ils ne reviennent plus jamais. En été portent des justaucorps teints au suc des feuillages.

Nourriture :
Ils sont gourmands et reprennent dix fois de tout.

Habitat :
Ils vivent dans des lutinières aussi actives et grouillantes que d'immenses termitières, mais où le jeu et les cabrioles remplacent le travail. Elles sont bâties en dur, avec une espèce de torchis à base de glaise, de mousses et d'herbes parfumées, situées sous les collines, les talus, les pierres levées, dans les bois entre les racines de chêne ou d'ifs géants. Ils en sortent rarement, cependant on les trouve ici et là : dans les caves et les greniers, sous les lits, au fond des armoires ou de la boîte à ouvrage.
Les Lutins vivent surtout en France, pourtant certains, attirés par les "verdoyantes féeries", ont gagné le sud-ouest de l'Angleterre, pour s'assimiler aux Pixies. On signale aussi un cousin Brag à grelots dans le Yorkshire, deux ou trois Kwelgeet et Plageert en Flandres et quelques autres en Allemagne, en Italie.

Activités :
Les Lutines, plus précisément Lupronnes, aiment à prendre l'apparence de simples belettes, elles traversent des sentiers devant les promeneurs puis les narguent de loin en faisant mille grâces et couperous. Si on vante leur joliesse, ravies elles se rengorgent et envoient des baisers.
Les Lutins ne tiennent pas en place. S'ils ne travaillent pas, ils s'amusent beaucoup et se reposent rarement. Il est fréquent de les voir glisser au fil des ruisseaux sur les radeaux des nénuphars, mais ils ne plongent jamais dans l'eau, comme le prouve leur visage toujours un peu sale.
Le Bona, lutin d'Auvergne, se plaît à emprunter l'aspect d'un cabrettaïre. Malgré tous ses magiques efforts pour grandir, il n'a jamais réussi à passer la taille d'un pied de quarante-deux centimètres.
Les Chorriquets, Bonâmes, Penettes, Gullets, Boudig, Bon Noz s'occupent surtout du bétail et des chevaux.
Les Lutins sont de très ingénieux teinturiers, ils connaissent les propriétés colorantes des écorces et les petits habitants du royaume forestier viennent fréquemment leurs porter leurs habits pour les teintures de saison...
Mais leur activité principale est d'"enlutiner" !

Mœurs :
Espiègles, farceurs, n peu voleurs, taquins, fripons, lutineurs, ce sont aussi de courageux travailleurs, de redoutables guerriers. S'ils vadrouillent beaucoup derrière les filles et les fées, ils restent fidèles toute leur vie à l'amour de leur Lutine et les suivent dans la mort. Les Lutins ne sont pas tout à fait immortels, ils peuvent succomber de mort violente, accidentelle ou de chagrin.
Grâce à une sorte de chapeau : le Tarnhelm, ils ont la possibilité de disparaître, ou de se transformer en humains ou en bêtes ou mêmes en objets inanimés.
Les Lutins ne sont pas craintifs ; on prétend cependant que si les poils de l'âne ne s'embrouillent jamais c’est qu'ils répugnent à y touche à cause du rôle de cet animal au moment de la Nativité. L'odeur du crin brûlé par un cierge béni les éloignent des écuries.

Les Lutins, l'Utin, Lubins, Lupins, Letiens, Luitons, Luprons, Ludion, Lutinent, taquinent, turlupinent, encoquinent, se faufilent, intriguent, se métamorphosent, grouillent, pincent, s'esclaffent, enfourchent et chevauchent des espèces voisines ; s'éparpillent sous différentes identités, émigrent, prolifèrent, disparaissent dans un trou...et réapparaissent par un autre en cent dissemblables exemplaires. Les Lutins sont inclassables, insaisissables : il semble qu'on en tient un et, à peine les doigts imprudemment entrouverts, il ne reste plus qu'une impression de vivacité fraîche et fluide, et quelques fils verts dans la main.
"Ce sont des esprits singulièrement mixtes. D'une part ils se rapprochent des Elfes et des Lémures, d'autre part des Koboldes et des Lares. Dans ce dernier cas, on les appelle de préférence Follets ou Farfadets", dit Grün qui, comme la plupart des elficologues même les plus anciens, n'ont jamais su très bien par quel bout les épingler ! "Les caractères du Lutin sont difficiles à saisir", entonne désespérément le chœur des lutinologues : à la fois Esprit de l'air et du feu, Génie des bois, des ruisseaux, des dunes, des près, paisible Pénate mais démon des nuits garoues, bandit de grands chemins, détrousseur et trousseur de dentelles, grand maître lutineur, farceur, suborneur, gentil diablotin protecteur des enfants et des animaux.
Les Lutins ne sont ni des Koboldes, ni des Nutons, Brownies, Gobelins, Annequires, Lauru ou Gnomes mais une race à part entière. Si nombreux, si vivaces, qu'en France le mot lutin sert communément pour désigner l'ensemble du Petit Peuple. ils hantent les légendes, les traditions populaires, les récits de veillée depuis la nuit des temps, depuis belle lurette ! Son caractère espiègle et facétieux a laissé le verbe lutiner : taquiner, tourmenter, dans le vocabulaire galant.
Les philologues font dériver lutin de Neptunus. Jean Markale
( L’Épopée celtique en Bretagne ) évoque le dieu Nudd et les variantes Nodons, Nuadu, Nut. "Les uns font dériver le mot lutin de luits, luiton, luicter, lutter", écrit Grün. D'autres admettent pour lutin, luton, nuton, netun, la même racine : nuit. Grandgagnage y voyait la racine du mot anglais little : petit. Le Hutin est aussi un "querelleur". L'Utinet est un marteau de tonnelier et l'Utin le Lutin un esprit frappeur ! Pour Barbygère ce sont les descendants du Roi Lutt, souverain des "Génies Capuchons" ( Geniicucullati ) et de Eyllyn, fée des miracles du matin...
Déjà avant l'an mil, le moine Eon prophétise que "daymons et bestes Noituns ( lutins ) bientôt toutes villes envahiront". Vers 1212 Gervais de Tilbury explique que les Lutins sont des démons ou des êtres d'une nature secrète et inconnue, qui s'entendent avec les gens simples des campagnes, assistent à leurs veillées, les aident dans les tâches domestiques. Dès que les portes sont fermées, ils s'approchent du feu pour se réchauffer et tirent de leur sein de petites grenouilles qu'ils mangent après les avoir fait griller sur les braises. Ils ont l'air vicieux, la face ridée, ils sont de petite taille, pas plus d'un demi-pouce. Ils accomplissent sans effort les plus rudes travaux et transportent les fardeaux plus facilement que les hommes. Il est de leur nature de se rendre utiles et de ne pas nuire, ce qui ne les empêche pas de jouer quelques vilains tours aux mortels.
Der Schretelund der Wazzerbär, un fabliau allemand du XIIIe siècle, insiste sur la puissance herculéenne du Schretel ( lutin ) : "Un Norvégien accompagné d'un ours s'arrête chez un paysan pour y passer la nuit, mais la demeure est hanté par un Lutin ainsi décrit : il mesure trois empans, est d'une force extraordinaire, porte un bonnet rouge et a l'habitude de mettre sans dessus dessous meubles et ustensiles. Au milieu de la nuit, il sort de sa cachette et s'approche du feu pour s'y chauffer, aperçoit l'ours endormi près du foyer, le frappe, et un rude combat s'ensuit. Au matin, le Lutin vient déclarer au paysan qu'il s'en va et ne reviendra pas tant que le gros chat ( l'ours ) sera dans la maison."
En 1402 des dominicains sont obligés d'abandonner leur retraite possédée par un Lutin nommé Bronzet contre qui les prières n'ont eu aucun effet, qu'accroître sa sauvage ardeur.
Le Parlement de Bordeaux, en 1595, prononça un arrêt résiliant un bail, la maison étant manifestement hantée les Lutins. Et quelques temps plus tard une voisine se trouva grosse de l'un d'eux.
Le Lutin du Chateau de Callac lutinait toujours une veille femme qui le gardait en l'absence du maître ; quand elle s'endormait, il roulait de grosses boules dans la pièce au-dessus pour la réveiller ; il brouillait son fil, flambait sa filasse à la chandelle ou mettait force sel dans sa soupe lait. D'autres fois il sa coiffe, nouait ses cheveux ou lui traçait au charbon de belles moustaches noires ; il se permit même un soir de lui rire au nez, en lui passant au cou un grand trépied de fer brûlant.
Dans sa correspondance avec W.Y.Evan Wentz
( The Fairy-Faith in Celtic Countries ) Anatole Le Braz auteur de La Légende de la mort décrit ainsi le Lutin familier de son enfance : "Chaque maison avait le sien. C'était quelque chose comme le petit dieu Pénate. Tantôt visible, tantôt invisible, il présidait à tous les actes de la vie domestique. Mieux encore, il y participait et de la façon la plus efficace. A l'intérieur du logis, il aidait les servantes, soufflait le feu dans l'âtre, surveillait la cuisson de la nourriture pour les hommes ou pour les bêtes, apaisait les cris de l'enfant couché dans le bas de l'armoire, empêchait les vers de se mettre dans les pièces de lard suspendues aux solives. Il avait pareillement dans son lot le gouvernement des étables et des écuries : grâce à lui, les vaches donnaient un lait abondant en beurre, et les chevaux avaient la croupe ronde, le poil luisant. Il était, en un mot, le bon génie de la famille,mais c'était à la condition que chacun eût pour lui les égards auxquels il avait droit. Si peu qu'on lui manquât, sa bonté se changeait en malice et il n'était point de mauvais tours dont il ne fût capable envers les gens qui l'avait offensé, comme de renverser le contenu des marmites sur le foyer, d'embrouiller la laine autour des quenouilles, de rendre infumables la tabac des pipes, d’emmêler inextricablement les crins des chevaux, de dessécher le pis des vaches ou de faire peler le dos des brebis. Aussi s’efforçait-on de ne point le mécontenter. On respectait soigneusement toutes ses habitudes, toutes ses manies. C'est ainsi que, chez mes parents, notre vieille bonne Filie n'enlevait jamais le trépied du feu sans avoir la précaution de l'asperger d'eau pour le refroidir, avant de le ranger au coin de l'âtre. Si vous lui demandiez pourquoi ce rite, elle vous répondait : 'Pour que le Lutin ne s'y brûle pas, si tout à l'heure il s'asseyait dessus.'"
Il était alors d'usage en Bretagne de les appeler respectueusement Nantrou ( Monsieur ) ou Moestre Yan ( Maître-Jean ). Mieux valait ne pas "dépeigner" les crinières ni les queue que le Lutin avait torsadées durant la nuit, de crainte d'avoir à son tour la toison tressée, les juments risquaient d'avorter, et puis, sur les marchés, les "chevaux bouclés", dont l'encolure avait servi de monture aux Lutins, étaient fort estimés.
On raconte qu'autrefois les Lutins, que le sang valeureux du Roi Lutt fouaillait davantage, s'attachait à quelques preux paladins et couraient ainsi l'aventure perchés en croupe du blanc palefroi. Ou bien séduits par une gente damoiselle défendaient ses couleurs sans complexe, leur bras d'acier aux magiques ressources compensant largement le désavantage de leur taille médiocre. Et la belle Locathelye qui épousa en justes noces le Lutin ardennais Nourcine, ironiquement harnaché de noir, n'eut jamais à en rougir.
Hodekin le Scoununck ( Lutin familier des maisons nobles allemandes ) eut en revanche moins de chance avec son pauvre cocu de seigneur. Ce dernier ayant à partir en voyage, il appela son Lutin le page et lui dit : "Mon ami, je te recommande ma femme, aie bien l’œil ouvert sur elle..." Aussitôt que le mari eut franchi le pont-levis, l'épouse adultère, les baleines du corset rougies à blanc, fit venir à tour de rôle ses amants. Il y en avait à attendre des douves au donjon. Mais Hodekin n'en laissa aucun s'approcher d'elle et les repoussa à coup d'épée tout le long du jour jusqu'à la nuit. Lorsque enfin le mari revint, le Lutin accouru de bien loin à sa rencontre tout essoufflé lui dit : "Mon prince, je me réjouis beaucoup de ton retour, car je serais délivré de la lourde besogne que tu m'a confiée. Ce n'est qu'avec une peine infinie que j'ai réussi à empêcher ta femme de tomber dans l'infidélité. Cependant, je te prie de ne plus me charger de la surveiller. J'aimerais mieux garder tous les jours tous les porcs de la Saxe qu'une telle gourgandine !"


Tant qu'herbe poussera
Lutin vivra !

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » ven. juin 28, 2013 7:33 pm

Le Lutin Jeannette et les Lutins Lutteurs
Alors, qui d'entre vous veut se mesurer à moi ?

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Taille :
Quarante-six centimètres.

Aspect :
Jambes courtes et arquées, cuisses grêles, gros mollets. Taille cambrée et fine. Haut du torse avec des épaules très développées. Mains et bras puissants. Front large. Nez grand et crochu. Menton en galoche. Oreilles cornues. Regard plissé et intense. Chauve et ventripotent aujourd'hui.

Vêtements :
Grand cache-poussière de cuir serré à la taille par une série de ceintures vivement colorées. Culottes de peau. Chapeau de mousquetaire. Rapière.

Habitat :
A la mort de sa belle marquise, Jeannette est resté attaché au nid d'amour des Hautes-Bruyères de Proussay, qu'il hante, hante toujours, vêtu d'une vieille robe de chambre cramoisie.

Nourriture :
Tout ce qui est contraire à sa santé : charcuterie, viandes en sauce, pâtés de venaison, andouilles, fromages forts. Bière, alcool. Fume comme un sapeur.

Le premier, au hasard, c'est Fort-Epaule. Tout nabiot qu'il est, si votre tête ne lui reviens pas, il vous balance sur son dos, et crac, vous brise l'échine sur sa nuque aussi facilement qu'un bout de bois.
Le second est un protecteur de la faune et de la flore, un redresseur des torts, si par malheur vous êtes coupable de quelque barbarie envers un animal. Par exemple, si autrefois vous avez gonflé une grenouille en lui soufflant dans le derrière avec un chalumeau, brisé les œufs d'une nichée ou démembré une mouche, vous êtes bon pour une sacrée volée et, ma foi, bien méritée !
Les Sorgues, quant à eux, sont en bande, ce sont des bandits de grands chemins, même les contrebandiers les craignent. Ce sont eux qui les ont baptisés Sorgues, qui signifie "nuit" dans l'argot des mauvais garçons. Tout petits et encagoulés de noir, impossibles à repérer, ils avancent sans bruis dans l'obscurité et hop ! Comment résister à ces Lutins Lutteurs dont les forces sont décuplés dés que leurs pieds touchent terre, dès que leurs mains frôlent un arbre !
Les Spunkies ne s'attaquent qu'aux porteurs d'uniforme et de soutanes.
Le dernier, le Lutin Jeannette. Petit, certes, mais terrible bretteur, imbattable : boxeur, redoutable lanceur de coutelas, remarquable voleur, excellent cavalier et, grâce à toutes ces qualités, implacable séducteur. Cruel et sans peur, ce lutin aventurier du XVIIIe siècle devint grâce à son audace et à son autorité naturelle chef d'un groupe de renégats des plus sanguinaires. Ayant entendu parler, comme toute la populace tremblante de la contrée, de leurs épouvantables méfaits, il se rendit un beau matin dans la grotte qui leur servait de repaire.
"Que veux-tu donc, cancrelat ?" ricana leur chef du haut de sa taille de géant hirsute, tout étonné de voir ainsi surgir ce bout d'avorton aveuglément téméraire. "Je vais teeeee..." Paf ! déjà arraché de terre, jeté en l'air, assommé d'un rude direct et crachant ses dents, il n'eut pas le temps de terminer sa menace que le lutin vainqueur s'était bel et bien nommé chef à sa place !
"Allez ! debout ! au travail !" commanda le lutin Jeannette, et tous de le suivre d'un bond à galoper partout à travers le pays. Agrippé à la crinière d'un robuste cheval noir, il conduisait la bande de gueux masqués d'Est en Ouest, du Nord au Sud toutes les nuits, attaquant les diligences, détroussant les voyageurs, prenant d'assaut les fermes fortifiées...
Y a-t-il plus versatile qu'un Lutin Lutteur sans suite dans les idées ?
Sûrement pas, et celui-ci, au bout de sept années fructueuses de brigandages, en eut, d'un seul coup, assez de jouer les malandrins ! Las de chevaucher les landes, il dénonça ses compagnons, les fit pendre et, séduit par une jeune et jolie marquise des environs, s'installa auprès d'elle dans le coquet manoir des Hautes-Bruyères à Proussay.
Désormais esprit familier et chevalier servant, Jeannette prit grand soin de la maison qu'il entretint grâce aux écus amassés durant ces années folles.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » ven. juin 28, 2013 9:40 pm

Le Pixie
Pisky fine and Pisky gay
Pisky now will fly away

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Taille :
Une soixantaine de centimètres.

Aspect :
Tête volumineuse, épaisse chevelure rousse. Yeux bigles et phosphorescents, nez retroussé, bouche large et moqueuse, oreilles pointues. Le corps est grêle, vif, tressaillant.

Habitat :
Le sud-ouest de l'Angleterre, la Cornouaille, le Dartmoor, l'Exmoor. Il pullule autour des fondrières de Granmere, tout le long de Bodmin à Launceston, dans la vallée de la Doone. On le rencontre entre Moretonhamstead et Tavistock, à Widecombe, Princetown, Bovey Tracey où il chevauche la jument de Tom Pearce, et les poneys qui y abondent. Le Pixie vit à l'air libre et se contente au plus fort de l'hiver d'un abri de bruyères ou d'un trou sous les tors. Parfois se pelotonne dans le chaud pelage du bétail sauvage des moors. Exceptionnellement il peut occuper un coin de grange.

Nourriture :
Cidre, lait des brebis de la lande. S'empiffre du produit de ses maraudes au jardin, au verger, au garde-manger, et en été de platées de whortleberries ( airelles pourpres ) dans de la crème du Devon.

Mœurs :
Irascible et ombrageux, il fuit ses voisins féeriques et déteste la plupart des humains. Les tristes romances peuvent cependant l'émouvoir, il protège les malchanceux, les désespérés, les laissés-pour compte et ne manque jamais d'aller fleurir, chaque matin, la tombe abandonnée de la pauvre Kitty Jay qu'un chagrin d'amour poussa à se pendre. Certains enfants peuvent aussi l'attendrir, il dépose alors à leur intention quelques menus cadeaux sur les chemins qu'ils empruntent : pièce de monnaie, œufs colorés de teintes vives...Charlotte, Bean, Charles Lacey, fermiers à Doddiscombleigh, ont pu le vérifier plusieurs fois. Souvent en pure perte, les petits Anglais du Sud-Ouest, afin d'attirer ses faveurs, ne manquent pas de porter son effigie en bronze à leur cou.
Si d'aventure une tocade lui prend de s'attacher à une maison, ce n'est guère à l'avantage du propriétaire qui se voit contraint, en échange de travaux bâclés, de se confondre en débordements de reconnaissance et de se fendre de couteux présents.
Les Pixies débarrassèrent les falaises de Lydford George des Gullins, tribu des Petits Hommes cannibales aux cheveux rouges, et chassèrent le mauvais esprit de Benjamin Grayer, qui "revenait" sous la forme de Binjie le Lutin noir, en le condamnant à vider l'étang avec une passoire.
La meute infernale du Squire Richard Cabell, qui hante toujours la lande et inspira Conan Doyle pour Le Chien des Baskerville, fit de grands ravages parmi les nichées pixies.

Robert Hunt dans ses Popular Romances of the West of England classe le petit peuple fée des Cornouailles en cinq grandes espèces : le Small-People, les Spriggans, les Buccas, Bockles ou Knockers, les Brownies et les Piskies...
Les Piskies, Pisgy, Pixy, Pix, Piks, Pics, Picky, Picts, Pixies sont-ils les descendants, les esprits, les ombres des divinités de Pictes mythiques ? Tant de savantes théories se sont érodées aux vents trompeurs des moors, se sont embourbées dans les vasières sans fond !
Son nom sonne comme un sobriquet, évoque la vivacité "maligne"...Il y a de l'espièglerie et de la cruauté dans ce lutin nuisible des prairies et moors du Devon, des combes du Somerset, des pentes du Brown Willy. Sa tignasse rousse couverte d'un bonnet rouge dense entre les taillis et sur les roches ainsi qu'un feu follet dont il a la fluidité fusionnelle. Infatigable, il bat la campagne laissant derrière lui lait tourné, vaches malades, poulaillers vides, vergers dégarnis. Il vole, pince les dormeurs, bouscule les faneurs et jette les filles au beau milieu des mares. Le Pixie se moque des braves gens, les houspille, les insultes, les fait tourner sots par le vacarme de sa flûte discordante, le fracas de ses gigues endiablées que des concerts de choucas, grenouilles, chouettes accompagnent...Mais il est plus redoutable encore pour les prisonniers de Dartmoor ! Enfoui sous les bruyères galeuses qui cernent à l'infini les murailles grises de la célèbre geôle, il attend qu'un détenu tente la belle pour son malheur. Car mieux vaut la corde, les crocs des chiens de garde, le fouet que le jeu du Pixie ! Aucun témoin n'a jamais pu rapporter de détails sur cette chasse à l'homme, mais les cris inarticulés, s'étranglant dans le bourbier de Grimpen, suffisent à deviner en quoi consistent ses "agaceries" !
Le Pixie est d'autant plus dangereux qu'il n’est pas palpable. On croit l'avoir acculé dans le coin d'une grange. On se précipite, on le tient, on se retrouve les mains vides. Il est déjà loin.
De nombreuses légendes le font descendre des Têtes Rouges. Si ses ancêtres présumés étaient bien les surgeons des bâtisseurs de la Cornouaille, il a bien changé au cours des siècles. Pareillement aux Elfes et à d'autres races lutines, sa taille "normale" s'est mise à régresser sans jamais cesser de décroître. Si ce rapetissement s’arrête en chemin chez la plupart de ses cousins, chez le Pixie le phénomène a continué, jusqu'à l'effacer complètement...
Disparu bel et bien ? Hum...c’est mal le connaître, mal juger de son inépuisable résistance. Une fois réduit au néant, confondu au cosmos, aux éléments, aux forces invisibles, il se mit à gober toutes les formes d'énergie puisables sur la lande : animaux, voyageurs, bergers, âmes errantes, feux follets, spectres d'enlisés, auras des rois païens gisant sous les tumulus ou les cercles de pierres. Il se remagnétisa à même la tourbe et les tors sans âge ( pic rocheux en dialecte régional ), se revitalisant au foudroiement de l'éclair...il resurgit alors, rabougri et minuscule mais cent fois plus puissant, "diabolique" et combatif...
Aujourd'hui le rire du Pixie affole à nouveau les échos des collines !

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » sam. juin 29, 2013 12:07 pm

Colin Rosset
Il est un nain perdu dans les nuages.
( Robin Yerby )

Image

Taille :
Variable. Petit lorsqu'il attaque la lune, grossit et enfle au fur et à mesure de son repas.

Aspect :
Sorte de chiffon flasque et pâle, il gonfle comme un ballon vide et vire au cramoisi de bouchée en bouchée. Légèrement lumineux en fin de mois.

Vêtements :
Manteau indescriptible confectionné de plantes et fleurs de Magonia. Porte un bicorne galonné, bordé de glands d'or.

Habitat :
Une île cachée sur la planète voisine de Magonia.

Nourriture :
La lune. Boit l'éther, l'eau gazeuse et alcoolisée des lacs astraux.

Mœurs :
Le Cloin Rosset reste une énigme, même pour les grands elficologues qui ne purent jamais l'approcher. On a fini par le perdre au fin fond des bestiaires extraterrestres au même titre que les petits êtres verts venus d'ailleurs, et les silhouettes floues des "rencontres du troisième type".

Activités :
Dévore mensuellement la lune.

"Les Êtres qui évoluent dans l'espace, voguent sur les cieux et au-delà, ne sont pas tous des Fées, Sylphes, Séraphins ou Esprits de l'air. C'est une grossière erreur de limiter le Grand Répertoire des Lutyns, Elfes et Nains à notre seule planète et système solaire" nous dit Barbygère dans l'introduction de son
Répertoire des Invisibles.
Dans une partie du ciel "couleur de temps", dans la fabuleuse contrée de Magonia que Grimm cite en sa Teutonishe Mythologie, le firmament est composé de montagnes et de vallées couvertes d'herbe et de forêts. Les astres ne sont pas suspendus mais posés sur le ciel où ils marchent comme des bêtes broutant dans une prairie : l'air tu temps qui sort de la terre et monte jusque là-haut les y maintient et les empêche de tomber.
Autour de ces rivages un bel océan bleu permet aux navires des tempestaires d'y voguer et faire commerce de grains hachés par les orages. Gervais de Tilburty en confirme l'existence par la description de la chute d'une encre sur le sol d'Angleterre dont le câble se perdait au fond des nuées.
Nombreux animaux, lutins, fées, nains et prodigieuses créatures inconnues y prolifèrent, mais nous n'en connaissons que très peu car seul Colin Rosset se risque encore de nos jours à fréquenter notre système solaire. Si de vieux récits du "Peuple de l'Oubli" retrouvés en Rovergue expliquent que : "la luna era un veilh sourel autre cops : quand valé par res per lou jour, la metterou per la nioch" ( la lune était un vieux soleil autrefois : quand il ne valut plus rien pour le jour, on le mit pour la nuit ), qu’incapable de remplir son office diurne il était tout juste bon à éclairer la nuit, les légendes elfiques plus récentes affirment que notre lune proche de Magonia est en fait une grande tarte de lumière confectionnée par la Reine-fée, pour ses filles, avec le lait luminescent de la voie lactée et la farine des nébuleuses. Or un lutin magonesque nommé Colin Rosset, posté sur un îlot astéroïde et lorgnant avidement la préparation mensuelle de la pâtisserie dorée, se rue dessus et la dévore goulûment dès que terminée elle luit et resplendit aux cieux. Les miettes qu'il laisse alors retomber de son festin forment étoiles et petites constellations. Cependant, jamais découragée malgré l'inévitable empiffrerie du nain goinfre, la bonne pâtissière féerique, chaque mois, remalaxe et recuit son resplendissant gâteau que le Colin Rosset grignote quartier par quartier, tantôt d'un côté, tantôt de l'autre. Une fois rassasié, il retourne digérer sur son roc, contemplant ravi et repu les beautés galactiques, les phénomènes stellaires jouant sur les eaux musicales de l'infini.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » sam. juin 29, 2013 3:40 pm

Les Korrigans
Forsan et haec olim meminisse juvabit

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Taille :
D'une à deux coudées.

Aspect :
Petits, très ridés, malingres, noirs et poilus, d'une force prodigieuse. Cheveux longs parfois tressés. Certains ont le front orné de petites cornes auxquelles ils attachent leurs bretelles. Pieds de bous, sabots de fer, mains en griffes de chat. Petite queu qui frétille sans cesse. Le "Petit Charbonnier" de Bryère ressemble à un singe roussâtre.

Vêtements :
Lorsqu'au Xe siècle Samson aperçoit pour la première fois "ces païens danser autour d'un menhir", il les décrit sauvages et vêtus de peaux de bêtes. Il faut attendre la fin du XVIIIe siècle pour les voir adopter le costume paysan local et un curieux chapeau aussi large qu'une lune. Un vieux manuscrit mis à jour par Claymorius dit qu'ils se montraient délibérément aux hommes en "rustres hardes et ne réservaient leurs vrais et nobles atours qu'au sein du domaine Kouril étendu sous terre, plus bas que la mer et les rivières".

Habitat :
De nombreux dolmens marquent l'emplacement de leur gîte. Des Korandous habitent dans les falaises de Bilfort à Paimpol. A coat Bihan on appelle les barrows Châteaux de Poulpicans, un tumulus à Saint-Nolfen la retraite des Bouléguéans : c'était autrefois leur capitale, ils y vivaient par milliers. La lande de Plandren est entièrement creuse et abrite une métropole de Courils. Les monumentaux et étranges édifices de Carnac délimitent les frontières de la cité mère : ceux des rivages, "les noirs", vivent dans les trous des falaises ; et les derniers Tens disparus dans les mares et les fermes en ruine. Les Kornikaneds demeurent toujours en Brocéliande, quelques Korreds en Cornwall, des Spriggans, issus d'un cousinage, se sont étendus sur les moors, et les Sorgues ( de même origine ) hantent les côtes britanniques.

Nourriture :
"Ils n'exigent qu'un peu de graisse pour leur roye et leur bouillie." Pourtant beaucoup de gens ont vu de la fumée sortir de dessous les pierres et par les trous de leurs demeures, et senti le délicat fumet de leurs festins.

Mœurs :
On connaît en définitive très peu de chose de cette race ancienne, le contact avec les hommes se bornant à quelques rencontres, services, danses ou mises à mal pour les maritimes. Leurs épouses font parfois appel à des sages-femmes humaines lors d’accouchements difficiles. Elles les paient avec de l'or.

Activités :
"Ils dansent, la nuit, autour des menhirs ; les humains qu'ils entraînent avec eux dans la ronde en survivent rarement." "Ils gardaient des trésors entassés sous de grosses pierres qui s'ouvraient lorsqu'on les frappait avec une certaine clef rouillée." "Autrefois, lorsqu'on avait perdu quelque chose, il suffisait de se rendre à leur résidence au commencement de la nuit, et de dire : 'Poulpican, j'ai perdu tel ou tel objet.' Le lendemain on le trouvait à la porte."

Lorsque, au crépuscule, le Bugul nos, le berger de la nuit, menait paître son troupeau d'ombres, il était temps pour le paysan breton de rentrer et fermer sa porte. Le Bugul noz n'était pas malveillant ; tel un veilleur de nuit qui fait son tour de garde, boucle les portes et invite les bonnes gens à dormir, il patrouillait dans la lande, annonçant à l'attardé l'heure de rendre les ténèbres aux Esprits : "Va, le jour est à toi, la nuit est à nous." Et l'autre se pressait car derrière le Pâtre nocturne s'avancaient les familiers de l'Ankou : les Treo Fall et les bandes Korriganes...
Une fois, un jeune Morbihanais qui avait oublié le temps auprès de sa bien-aimée coupa en se hâtant par une allée de pierres levées et tomba dans une ronde de Korrigans. Bien qu'ils fussent des milliers à se presser autour de lui - tout noirs avec leurs griffes de chat - il n'eut pas trop peur car il tenait en main son carsprenn ( petite fourche de bois dont on se sert pour nettoyer le soc de la charrue et qui détient l'avantage de préserver des malices des Korrils ).
Les "petits cornus" menaient grand tapage, transpiraient sang et eau tout en beuglant inlassablement le même lancinant refrain :


Lundi, mardi, mercredi,
jeudi, vendredi, samedi...

Chaleureusement invité à se joindre à la danse, le nouveau venu, amusé, ajouta de sa plus belle voix :

Avec le dimanche aussi
Et voilà la semaine finie !

Judicieuse chute qui souleva l'enthousiasme général. La foule des Korrigans grossit encore ; on le remercia, on le congratula, on lui offrit pour le récompenser un sac de feuilles sèches qui se révélèrent être, au matin, autant de pièces d'or.
Quelques variantes au récit ajoutent une bosse au héros, que les Korrigans lui ôtent en reconnaissance de ce couplet supplémentaire qui les délivre d'une malédiction les obligeant ainsi jusqu'à la nuit des temps. Dans une version plus longues ils affublent un bossu cupide d'une seconde bosse dont ils ont débarrassé le bienfaiteur. Cette histoire des Korrigans et des sept jours de la semaine se raconte depuis fort longtemps, et aujourd'hui encore les enfants, qui l'ont "feuilletonnisée" de mille péripéties et rebondissements, la confient comme fait authentique aux touristes venus des quatre coins du monde visiter les alignements de Carnac ou tout autre site mégalithique sous lesquels s'étend le vaste empire korrigan.
Le peuple des Kôrigans, ou Korrigans, Kouricans, Corrigans, est partagé en quatre peuplades qui habitent les bois, les landes, les vaux et les métairies. Ceux qui habitent les bois s'appellent Kornikaneds, parce qu'ils chantent dans de petites cornes qu'ils portent suspendues à leurs ceintures. Ceux qui habitent les landes s'appellent Korils, Courils, Corrics, Kriores, Kéréores, Kourils ou Kannerez noz, parce qu'ils passent toutes les nuits à danser des rondes au clair de lune ; ils laissent derrière eux, au matin, d'immenses cercles d'herbe brulée. Ceux qui habitent les vaux s'appellent Poulpikans, Poulpicans, ou Poulpiquets, c'est-à-dire qu'ils ont leurs terriers dans les lieux bas et humides. Quant aux Teus ou Teuz, ils se tenaient dans les près et les blés mûrs ; comme les Korrigans les accusaient d’être les amis des chrétiens, ils furent obligés de s'enfuir dans le Léonais, où il en reste peut-être encore quelques-uns. Mais qu'ils viennent des forêts, des landes, des marais ou des cultures, tous se rassemblent sous les cromlechs, les cairus, les menhirs et les dolmens, sous les voûtes de pierre pour, ensemble, "célébrer leurs mystères".
De leurs voyages, de leurs alliances et mariages entre clans et avec d'autres "enfants de la nuit" naquirent les Boléguéans des Tumulus, les Hoseguéannets, Guerrionets des cercles de pierre, les Arragousets, Bolbiguandets de la mer et des rivages, les Boudics, Boudiguets, Bouffon noz des abords de ferme...

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » sam. juin 29, 2013 5:53 pm

Farfadets,Follets, Fols et Fradets
Frère Frérot,
Mon capuchon va-t-il bien ?

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Taille :
Une quarantaine de centimètres. La taille des descendants n'a fait que décroître jusqu'à celle du hanneton.

Aspect :
Ils ressemblaient au XIXe siècle à de petits démons boucanés et ridés, à poils blancs. Le Follet du Berry est "gros comme un petit coq avec une crête rouge, ses yeux étaient de feu, il avait des griffes au lieux d'ongles ; quant à sa queue, elle ressemblait tantôt à celle d'un coq, tantôt à celle d'un rat, et il s'en servait comme d'un fouet pour faire courir sa monture".
L’Écossais, dont le plus célèbre se prénomme Maggy Moulach, a gardé l'allure du Farfadet d'autrefois : mince et robuste, brun de peau, l’œil brillant, le cheveux roux et rebelle, les oreilles en pointe, le menton provocant, la bouche à la fois goguenarde et volontaire.

Vêtements :
Ses beaux habits de jadis sont tombés en lambeaux ; ils n'ont jamais accepté de se séparer de ces splendides vestiges d'une époque révolue. Certains préfèrent aller nus, attifé d'un seul débris de chemise. Ils se vexent si une douairière pudibonde leur en fait réflexion.
Le P'tit Davy de Beaupréau, le plus connu des Farfadets du Maine-et-Loire, se montre aux dames coiffé d'un élégant feutre gris, tandis que les Frérots ont biens des misères avec leurs capuchons bruns qui tiennent mal sur la tête.

Habitat :
Écosse, Belgique, Suisse, France.

Nourriture :
Les Farfadets sont sobres. Ils mangent peu, boivent peu : poisson fumé, flocons d'avoine, lait. Ils se réservent pour un gargantuesque banquet qui a lieux tous les ans le mardi gras autour d'une large cuvette taillée dans la Roche Plate de Chambretaud en Vendée.

Mœurs :
Braves jusqu'à la témérité, ils étaient taquins, bruyants et tapageurs. Ils sont devenus silencieux. Forts en gueule, orateurs, ils étaient généreux, romantiques, ils sont devenus mesquins...sauf au contact des enfants chez qui ils retrouvent l'esprit du rêve et de l'aventure.

Activités :
Ils entrent la nuit dans les maisons, puisent dans la bière, tournent le lait, enduisent de beurre ou de savon noir les marches d'escaliers. Écoutent et répètent les secrets qu'ils surprennent, dissimulés sous les lits. "Dans les archives de la ville de Vevey, en Suisse, il est fait mention d'un esprit Follet : le Tschanteret qui, en 1551 exactement, habitai derrière la Villeneuve et entrait dans la tour de Boillet, où il se livrait à toutes espèces de farces. le conseil de ville, après délibération, donna ordre au maître des travaux de maçonner toute issue de la susdite tour, afin que le Tschanteret ne pût ni y entrer ni y sortir. Les Fols de l'Allier secouent des chaînes, font hurler les chiens, bloquent les cheminées pour que la fumée refoule dans la maison.
Une crois sculptée dans une pierre volcanique les fait fuir.

La race des Farfadets est de souche royale. C'est une grande et ancienne branche du royaume de Féerie, qui aurait pu rivaliser avec l'innombrable et indétrônable ethnie lutine, s'ils n'avaient été aussi individualistes, rebelles et provocateurs.
Les hommes ont souvent accepté les farces des lutins ; jamais celles des Farfadets, sauf les enfants avec qui ils ont de nombreuses accointances. Que de mauvais tours n'ont-ils pas faits ensemble tout en se rejetant les uns sur les autres la responsabilité de la faute !
Ils descendent d'une lignée elfique quelque peu bâtarde. W. Abernathy plante leur berceau en Écosse, entre le Glas Maol et le Glen Beg, sur les pentes raboteuses de Mel Choire Bui ou de Ben-y-Gloe ; H. Dauzat en Vendée ; les
Chroniques elfique des deux côtés à la fois - Barbygère fait remonter la rencontre des deux familles farfadaises au temps de la grande alliance franco-écossaise, date à laquelle elles se sont confondues en une seule race romantique et fantasque. Ensemble ils se rallièrent au "parti des honnêtes gens" ( les Jacobites ) pour suivre les troupes héroïques du soulèvement de 1715 et de la grande rébellion du Bonnie Prince Charlie de 1745, et c'est à la suite du regrettable désastre de Culloden que la plupart regagnèrent les pays de la Loire. Ils essayèrent, paraît-il, de fomenter un nouveau coup d'éclat qui n'aboutit pas faute de l'appui des mortels démoralisés par leur sanglant échec. Est-ce à cause de ce refus, qu'ils prirent pour un manque d'obstination, que les Farfadets s'éloignèrent de la compagnie des hommes pour ne s'occuper que d'amasser des trésors volés dans les caisses seigneuriales et princières, même dans celles de nains et génies affiliés aux hommes, avec probablement l'intention d'armer les renforts elfiques et de reprendre le combat ? Des croyances toujours vivaces témoignent de l'existence de ces trésors enfouies gardés sans relâche par des Vigilants, Farfadets ou leurs fantômes, portés depuis des siècles, notamment près de la fontaine de Pyrome dans les Deux-Sèvres, dans les souterrains de nombreux châteaux poitevins, à l'extrémité de l'anse de Lugeronde à Noirmoutier, sous les dolniers de Saint-Gravé, à Cancoët ( Morbihan ). "Le trésor des Fols de l'Allier est enseveli sous la grotte où demeurait la tribu, la dalle qui la recouvre se soulève d’elle-même à la messe de minuit, au moment de l’Élévation, et le jour des rameaux, aux trois coups que frappe le prêtre à la porte de l'église, mais il faut être vendu au diable pour pouvoir s'en emparer." Il est de toute façon imprudent de s'approcher de ces caches, car les lances invisibles maniées par les Vigilants ne manquent jamais leur but.
Le temps finit malgré tout par émoussé les aspirations guerrières des Farfadets. Les anciens ayant disparu ou étant devenus trop vieux pour haranguer les foules, les jeunes Frérots vindicatifs convertirent le bel esprit combatif en espièglerie, et dépensèrent leur énergie en farces sournoises envers les mortels. Ils épousèrent des Fades et Fadettes, petites fées du terroir...et les Follets, Fradets, Frérots, Folatons, Foulet, Ferré, Fol, Fursey enfantés et cousinés, très assagis, s'effacèrent au fil des fuseaux et raconteries des veillées.
Une poignée d'irréductibles installés en Bretagne et acoquinés aux Korrigans "tournèrent besaigre" et brigandèrent les landes du Morbihan : "Le paysan de Pimienc qui doit traverser la lande sait que si il ne gagne pas, avant la nuit noire, la croix de pierre dressé au bord du sentier, si minuit sonne avant qu'il ait récité ses prières, il n'échappera pas aux Follets qui, sortis des pierres, courent et dansent sur les bruyères et se plaisent à saisir ou égarer ceux que les ténèbres surprennent autour d'eux."
Les enfants des Farfadets existent toujours : "Encore à la fin du XIXe siècle dans le pays poitevin, les femmes de la vallée de la Sèvre se réunissaient le soir pour filer ou tricoter dans des excavations produites par l'extraction de la pierre, qu'elles recherchaient à cette époque économe à cause de leur douce température qui les dispensait d'entretenir le feu. Elles s'y installaient de leur mieux, mais les Farfadets, dérangés par cette bruyante intrusion sur leur domaine, se vengeaient par maints tours de leur façon. Dans la demi-obscurité, ils égaraient les fuseaux, brouillaient le fil, ou éteignait malicieusement la lumière !"...Biens puérils représailles et bien dérisoires actes de provocation pour ces valeureux qui s'en allaient jadis, claymore au poing, derrière la cocarde blanche du beau Prétendant.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » sam. juin 29, 2013 6:37 pm

Le Bonnet Rouge
Bonnie Charlie ne me reviendra plus.
Les Bonnets Rouges ont teint sa cocarde blanche.
( La plainte de Catriona )


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Taille :
Soixante-deux centimètres.

Aspect :
Robuste. Muscles saillants. Mains en serre d'aigle. Longs cheveux gris et barbe tressée. Dents proéminentes. Yeux couleur de feu. La femelle arbore fièrement une abondante crinière rousse.

Vêtements :
Bonnet rouge décoré de plumes d'oie. Tunique en peau de mouton. Tartan arraché aux cadavres. Guêtres. Bijoux de cuivre et d'étain. Porte le "targe" ( bouclier ) et la "claymore" ( épée ).

Habitat :
Ruines, châteaux hantés, tours dont les murs suintent encore du sang frais des crimes et meurtres perpétrés au cours des siècles.

Nourriture :
Bannock et gibier. Pâté de daim aux rannoch.

Mœurs :
Cruel et fougueux. Il déteste les humains. Lorsque des malheurs vont s'abattre sur leurs ennemis, les Bonnets Rouges, visionnaires, festoient et dansent jusqu'à l'aube au son des cornemuses. Celui qui les entend peut prévenir la ville voisine qu'un grand désastre est à redouter. Rien n’effraie les Bonnets Rouges hormis les crucifix, la croix de gardes d'épée et certaines citations de la Bible. Lorsqu'il fuit il laisse toujours un ongle derrière lui.

Activités :
La chasse et la guerre. Forge également des torques, des bracelets et surtout des poignards : dirks et skin-dhu. Les Bonnets Rouges suisses sont d'aimables Servants attachés aux chalets et que les capucins refoulèrent là d'où ils viennent.

Angus entraîna Molly à travers les glens fleuris jusqu'à la tour ruinée surplombant le lac illuminé de scintillances solaires. Le printemps verdissait les collines, allumant les frémissements des bruyères violines.
Sautant de roche en roche, les amoureux de mai riaient aux beaux jours, au bonheur de leurs fiançailles sauvages fêtées suivant le rite de Brigadoon, sous le ciel écossais. Bonnets enrubannés, plaids déployés, ils s'enlacèrent, s'embrassèrent, roulèrent dans l'herbe sous la touraille, là où, au creux des pierres ombreuses, attendaient les "Bonnets Sanglants"...pour les assassiner.
Le Bonnet Rouge, ou Dunter, Comb, ou Powrie, est un affreux nain Gobelin des Borders, mais aussi des Hautes- et Basses-Terres d’Écosse. Il se dissimule dans les châteaux, donjons, manoirs abandonnés et tous les lieux ensanglantés de crimes, hantés par les spectres dont il apprécie la compagnie. Tout comme les Croqueurs d'Os, les Bonnets Rouges furent une importante race guerrière, allant jusqu'à défier les géants des Hauteurs.
Sous le règne d'Uther Pendragon, père d'Arthur, ils combattirent les Pictes et les peuples-serpents des lochs sombres. C'est seulement après la défaite de Culoden qu'ils disparurent parmi les vieilles murailles, ne supportant pas l'occupation anglaise dont l'éclat des habits leur montait à la tête.
Depuis ils ne cessent de pousser dans le vide, d'égorger, d'écraser sous d'énormes rochers les voyageurs, touristes, amateurs de belles ruines romantiques.
C'est avec le sang des humains qu'ils teignent leurs bonnets. Une fois la couleur ternie et passée, ils se remettent à guetter des victimes pour en raviver le chatoiement.
Modifié en dernier par Náin le mer. juil. 03, 2013 6:41 pm, modifié 1 fois.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » dim. juin 30, 2013 12:22 pm

Mourioche
Houou houou houououou
( Umberto Eco, Le Pendule de Foucault )

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Taille :
Quarante-six centimètres.

Aspect :
Diablotin à petites cornes et pieds fourchus. Oreilles pointues, œil torve, doigts crochus. Bossu. Très vif. Peut prendre l'apparence qu'il veut et même se rendre invisible.

Vêtements :
Bonnet à grelots. Costume chiffonné de bouffon de cour aux couleurs fanées, collant tire-bouchonné, poulaines usées.

Habitat :
Terrier, creux d'arbre, nid de fougères, aire de corbeau en été ; grenier à foin, étable, écurie en hiver.

Nourriture :
Il vole ce qu'il trouve. Ne supporte ni le poisson ni les crustacés, qui lui rappellent sans doute sa jeunesse sous la mer.

Mœurs :
Il est unique. Il n'y a qu'un Mourioche sur terre, et c'est heureux ainsi, car ses dégâts sont considérables. Au début de sa vie, Mourioche était un nain humain ordinaire ; c'est par l'étude des sciences occultes et interdites, et à cause de son bannissement qu'il est devenu lutin.

Activités :
Mille et un méchants tours.
Mille et un méchants tours.
Mille et un méchants tours.
Mille et un méchants tours.
Etc.


Un taquin, coquin, mutin, mâtin, Mourioche est un vrai diablotin, plaisantin à rendre fou. Ici et là, il vole, apparaît, disparaît, se change en tout ce qui lui passe par la tête et fait mille et un tours, parfois drôles, parfois méchants, c'est selon.
Ici, le voici au soir, guettant sous la haie les ouvriers rentrant des champs. Un faucheur ayant fini sa coupe, à l'heure de la soupe, la faux sur l'épaule, regagne sa demeure en sifflant. "Siffle, siffle à ton aise, marche, marche le cerveau vide, sans rien entendre et sans rien voir", se dit à part soi Mourioche, ricanant et attendant dedans le fourré une proie pour mal faire. "Siffle, siffle, mais à moi ta belle faux luisante !" Agile, léger, il lui saute sur le dos et la lui enlève si adroitement que la paysan rentre chez lui sans s’être aperçu de rien !...Et de rire, de bondir, coquin Mourioche, par les prés et les bosquets, à faire briller l'outil tel un croissant de lune dans son ultime flambée.
Là, démon Mourioche suit un fermier qui tranquillement se promène. "Bouh !" fait-il derrière son dos pour lui faire peur. "Qu'est-ce donc ?" s'effraie le passant, ne voyant rien à part le chemin serpentant sous la brillance des étoiles. "Bouh ! Qui vive ?" s'apeure l'homme plus encore, claquant des dents. Et Mourioche rit et se change en caillou sautillant, cognant les sabots du flâneur qui, de son bâton, tente de se défendre des gravillons diaboliques !
Pan ! le bâton frappe sur la caboche de Mourioche qui, aussitôt, se change en crapaud. Pan ! le crapaud se change en chat miaulant. Pan ! le voici en chien mordant. Pan ! encore un coup : il se métamorphose, plus gros cette fois, en bouc piaffant. Pan ! le voilà en cheval se cabrant. Pan ! de plus en plus gros : un taureau chargeant le malheureux qui meurt d'épouvante.
Et Mourioche de reprendre son apparence diablotine et de rire et de faire des coupérous et culs tourniaus de méchante joie.
C'est ainsi chaque nuit, hiver comme été. Dès qu'il peut, ce lutin de Haute-Bretagne se met en chasse pour jouer ses mauvais tours.
Ancien bouffon d'un roi triton de la mer, favori du grand mage de la tour qui l'aurait initié à la magie noire, Mourioche se serait vu bannir du royaume pour avoir séduit par philtre magique la princesse cadette. Condamné à être décapité par le père fou de rage, mais ayant réussi à fuir grâce à l'intervention sorcière de son protecteur, le vilain triboulet aurait dû s’éclipser définitivement du royaume des eaux. Et depuis, le proscrit ère par les landes, passant ses colères et son humeur fantasque sur les humains qu'il rencontre.
La nuit tombée, il sort de sa cachette et part en mauvais maraude : brûlant des meubles, ravageant des jardins, grappillant des vergers, entrant par les lucarnes des fermes, pillant le garde-manger, pinçant les filles dans leurs sommeil, soufflant des cauchemars à l'oreille des enfants, fracassant les objets précieux de la maison...Enfin, disparaissant par la cheminée, couvrant les meubles de poisseuses nuées de suie, il vole le coq du clocher, change en sang l'eau du lavoir, assèche le puits, sème la panique au village.
Il n'y a pas si longtemps un homme de Ville-Orien en Saint-Gast, qui revenait de Matignon, rencontre une brebis non loin de sa maison. A l'étable il l'enferme. Le lendemain, quand il lui porte à boire, c'est une vache qu'il trouve...Et le jour d'après, c'est un cheval. "Bigre", songe-t-il en lui-même, "quel est là ce mystère ?" Le lendemain, c'est un chien noir aux yeux rouges qui lui montre les crocs, rit et lui dit : "Pourquoi viens-tu me voir ainsi tous les jours ? Tu es bien curieux !" L'homme affolé courut chercher son fusil. A son retour, Mourioche s'en était allé avec tout le troupeau et la moitié de l'étable. Le fermier voulut reconstruire celle-ci, mais ce que les maçons faisaient pendant le jour, le lutin venait le défaire la nuit. Malgré les exorcismes et les prières, l'eau bénite et les croix de rameaux de buis, toujours il revenait, aussi enragé. Enfin, il se lassa et alla crever les pneus de quelque tracteur proche.
De nos jours, il est toujours dans la lande à sauter par-dessus les genêts dès que la clarté s'étiole et que le ciel vire au noir.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » dim. juin 30, 2013 2:34 pm

Le Fadet

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Taille :
Vingt-huit centimètres.

Aspect :
Sauvages, laids, très velus. Les Fadettes sont plus coquettes mais tout aussi bourrues.

Vêtements :
Grossières culottes de laine écrue. Robelette pour les Fadettes.

Habitat :
Ils aiment la rocaille et les courtes collines. Caverne des Fadets près de Lussac-les-Châteaux ( Viennes ). L’impressionnante grotte des Fadets à Verruye ( Deux-Sèvres ) et la plus célèbre métropole des Fadets, celle de Biare, dans la commune de Moussac dans le Poitou.

Nourriture :
Soupe au millet et ragoût de mouettes, fèves du marais poitevin, cagouilles à la sauce aux lumas.

Mœurs, Activités :
Ils ne font plus grand chose. Les Fadets furent abondants à certaines époques. Ils étaient intégrés au bocage comme les moineaux, Les champignons, les cagouilles et l'anguille. Ils ont plus ou moins disparus. Les Fadets, menacés de consanguinité, substituaient à leurs rejetons des petits hommes.

Les frères Fadets, proches cousins des Farfadets, cousins germains des Fradets, viennent de très loin dans le temps. Même à l'époque frileuse du très haut Moyen Age ils n'avaient guère de pouvoirs. Ce ne sont ni des génies ni des esprits, mais une race de petits êtres qui vivaient sous les roches du Poitou avant les hommes.
Ils sentent le souffre mais ne sont pas d'essence satanique. S'ils ont été souvent vus en compagnie du Diable, c'est qu'ils lui servaient de main d’œuvre mais jamais, jamais Maître Cornu ne leur a confié d'importantes missions. Sur la table du Dolmen de la Roche aux Fadets dans l'île d'Yeu, on peut toujours voir les traces du trépied sur lequel s'asseyait Satan, le samedi soir, pour donner à ces grisons les instructions de la semaine qui se bornaient à de menus vilenies, gardant les plus diaboliques machinations pour les lutins supérieurs. Il n'était d'ailleurs pas dans le caractère des Fadets d’être cruels et, dès que passa le temps gothique des diableries, ils se détournèrent tout naturellement vers les bonnes actions. Là encore, ils n'accomplirent pas d'inoubliables miracles, ne construisirent ni pont, ni castel , ni aucun édifice, mais la nuit tombée, ils menaient paître les troupeaux des métayers en des combes secrètes et grasses, et il n'y avait nulle part d'aussi belles brebis que celles qu'ils gardaient.
Modifié en dernier par Náin le lun. juil. 01, 2013 12:03 pm, modifié 1 fois.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » dim. juin 30, 2013 5:12 pm

La Puck

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Taille :
Trente centimètres.

Aspect :
Adorable petit pruneau aux yeux noisettes, à l'abondante chevelure de jais. Ressemble beaucoup à Zunie, l’héroïne du vénérable René Haussman, mis à part ses pieds ensabotés !

Vêtements :
Courte tunique de laine tissée. Parures de fleurs, de fruits, de pierres et de coquillages.

Habitat :
Jadis les régions de landes colineuses. Cavernes artistiquement taillées et ciselées en cités circulaires par les anciens Hobgoblins des pierres.

Nourriture :
Fromage de chèvre, beaucoup de légumes, fruits frais et secs ; elle raffole de massepain.

Mœurs :
Jolie mais de caractère ombrageux. Se vexe facilement, boude comme une bourrique ou rit toute la journée. Ses colères sont dévastatrices mais amusent beaucoup Flore qui lui pardonne tout. Les Pucks n'épousent pas les Pucks. La reine la plus célèbre s'allia en l'an 70 du règne de Titania au roi Urlus, fondant ainsi les familles Lallia, Nasturtium et Bygail toujours en vie de nos jours, et autres poulpiquets.

Activités :
Tisse, jardine, pêche parfois, rêve et joue beaucoup.

Si c'est William Shakespeare et plus tard Rudyard Kipling qui ont légendé et donné leurs lettres de noblesse aux Pucks, ces jolis lutins rieurs et dansants, fruits juteux des amours espiègles des Poucs, Gobelins et Bacchants-Soeurettes, existaient déjà avant la guerre de cinq cents ans. Soufflant dans leurs conques ou dans des trompes de digitales et campanules géantes, ils annonçaient le retour du printemps elfique fêté alors le 30 mai, jetant des pluies de fleurs aux fées, lançant des guirlandes de jacinthes et de coucous, suivis d'Elphes criant l'arrivée des jeux de Flore depuis leurs chars-papillons survolant les prairies et les bois.
Curieusement poètes, écrivains et peintres se sont toujours attachés à décrire "le" Puck, malicieux petit satyre cornu, sans jamais s'attarder sur "la" Puck, coquine brunette aux oreilles pointues, aux dents aiguës et aux pieds fourchus, cent fois plus jolie et de caractère cent fois plus pétillant que son bouquetin de mâle avec qui, d'ailleurs, elle ne convole jamais.
La Puck est un lutin solaire, attaché aux régions sauvages et accidentés ; s'épanouissant l'été, l'hiver la voit s'encoquiller au chaud de sa caverne sculptée, douillettement aménagée. Elle y tricote, ravaude, rêve, agrandit sa garde-robe, rêve, pouponne, cuisine, rêve, brode, peint, rêve, échafaude des projets pour les beaux jours... Et aux premières giboulées, mars salue son bout de nez, ses risettes et ses joyeuses gambades. Elle va et vient, de la colline au jardin, suivie de quelques lutins, ainsi que de ses chèvres amies dont elle "suit" la langage. En avril, mai, juin, elle plante, fleurit son enclos, fait de la balancelle et, aux côtés de Flore qui, amusée, charmée, par sa grâce farouche, la chérit, préside aux foires d'été du Petit Peuple.
Contrairement aux Pucks, "la" Puck a toujours évité de côtoyer les humains à part quelques jeunes sorcières aussi sauvageonnes qu'elle, venues lui acheter des secrets de plantes contre de la pâte d'amande dont elle est très friande. Lors des interminables tragédies elfiques, la pacification d'Ohéron, l'arrivée de Merlin, petit à petit la belle a préféré abandonner son territoire de collines enchantées pour émigrer aux confins de contrées verdoyantes et reculées dont Flore a fait recouvrir l'entrée d'épaisses forêts afin de préserver son secret.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » dim. juin 30, 2013 6:47 pm

IV Ceux de le Montagne

Le Servan
J'ai vu souvent ton œil terrestre
Trois fois regardant de loin paistre
Le guide du troupeau,
L'ensorceler de telle sorte
Que tout après je la vy morte
Et les vers sur la peau.

( L.Richer, L'Guide bouffon, 1651 )

Image

Taille :
De vingt-cinq à trente-cinq centimètres.

Aspect :
Joli, bien proportionné, alerte et souriant. Cheveux bonds bouclés. Teint basané. Dents blanches aiguës. Le regard reflète la luminosité des cimes sous le soleil. Oreilles pointues. Il sent bon le foin et le lait frais.

Vêtements :
Chemise verte, gilet brodé de motifs floraux, courte culotte de peau. Pelisse de bique en hiver. Bonnet tricoté ( par les Fées ), chapeau tyrolien et culotte rouge ou noire des paysans suisses.

Habitat :
Fait son nid dans le grenier à foin, une vieille souche creusée, ou sous une roche qui l'abrite du vent. Hiberne à la mauvaise saison dans les chalets abandonnés. Partage trois semaines par an, en mai, le foyer des gracieuses Fées de l'alpage.

Nourriture :
Aime ce qu'on lui donne, il n'est pas difficile. Se contente de soupe, de pain et de fromage, de beurre et de lait, et trouve son dessert dans la montagne.

Mœurs :
Gai, sociable, gentiment espiègle. Les Servans, Serfous, Folatons, Persevay, Serveins, Petits Pâtres, Jeannots, Foultas, Napfan, Fameïli, Chanterais ou Jean de la Bolieta, sont les ennemis des méchants Esprits de de la montagne à qui ils échappent toujours grâce à leur talent de grimpeur, au fait qu'ils ne sont pas sujets au vertige, et à la complicité des bêtes, dont les ours et les aigles.

Activités :
Aide les montagnards dans leurs travaux. Fabrique beurre et fromages et s'adonne aux plaisirs de la magie. Ami des animaux, il est fréquent de le voir parcourir les sommets escarpés à dos de chamois, ou assis entre les cornes d'un bouquetin. Siffle avec les marmottes et les oiseaux.

A l'arrivée des hommes, après quelques méfiances, les Servans, petits Sylvains des montagnes, se sont vite accoutumés a leur présence. On les a vus descendre des crêtes et s'installer dans le voisinage des pâturages et des chalets.
Pendant l'absence des montagnards, ces nains bienveillants, amis du foyer, pénètrent dans les maisons et rendent une foule de menus services : ils balaient, lavent et rangent la vaisselle, barattent le lait, surveillent la bonne maturité des gruyères, soignent les bêtes, fleurissent la table et les fenêtres et empêchent les voleurs et les mauvais esprits d'entrer.
Dans les Alpes vaudoises les Servans ou Serfous sont les amis du pâtre. Ils mènent les vaches au champ et jamais elles ne dérochent. Le premier qui conduit le troupeau dit : "Pommette, Balette ! passe où je passe, tu ne tomberas pas des rochers." Et miraculeusement les bêtes passent là ou un chamois ne se risquerait pas et vont brouter sur les sommets les plus inaccessibles où l'herbe est la plus parfumée.
Lorsque les Fouletots des Alpes jurassiennes aperçoivent la bergère endormie, ils en profitent pour attirer au fond des bois la plus belle de ses vaches et, après le lui avoir laissé chercher longtemps, la lui ramènent rassasiée du meilleur fourrage, et le pis gonflé.
En Alsace, dès que le dernier pâtre a quitté pour l'hiver la montagne de Kerbholz, qui domine la vallée de Munster, les Servans avec leur magnifique et plantureux bétail, munis de tous les ustensiles nécessaires à la confection du fromage, s'installent dans les chalets désertés et y travaillent nuit et jour. Pis, au plus sombre des temps froids, ils descendent dans la vallée et passent furtivement dans les cabanes des pauvres pour y déposer des pelotes de beurre savoureux, de grosses miches d'un fromages des plus aromatiques.
A l'approche des premières neiges, lorsqu'on s’apprête à passer l'hiver en bas, il faut toujours laisser le chalet propre, laisser une lucarne ouverte afin de préparer la place aux Servans qui viendront y hiberner au chaud. Cela assure, au retour des beaux jours, une bonne récolte et la protection des Esprits de la montagne.
Il est extrêmement dangereux, en échange de tous ces services, de ne pas respecter certaines conventions. On ne doit jamais mettre un Servan en colère : ne jamais l'offenser, se moquer de lui, lui jouer des vilains tours, essayer de l'attraper. Il est très imprudent d'oublier sa petite part de nourriture, le soir, à la porte du chalet : un seul coup d’œil de son regard sorcier et les vaches pourraient bien crever, un seul geste de la main et la foudre pourrait tomber et tout pulvériser. Les Servans ne sont pas difficiles à contenter, mais ils tiennent à ces menus et traditionnelles rémunérations...
Dans les montagnes du pays de Vaud, il est d'usage de leur donner la première levée de la première crème du matin. Une fois, sur les bords du petit lac Loison, le maître vacher avait quitté tôt le chalet après avoir bien recommandé de ne pas oublier la part du Servan. Pendant son absence, le jeune pâtre ne la mit pas de côté, pour voir ce qui arriverait. La nuit qui suivit le retour du maître, un ouragan s'éleva et l'on entendit une voix crier : "Jean, lève-toi, lève-toi pour écorcher !" Au matin, le maître et son malavisé de vacher allèrent à la recherche du troupeau qu'ils retrouvèrent broyé au fond d'un abîme : le Servan s'était vengé !
On raconte que, détestant aussi la malpropreté, les Servans quittèrent une ferme grâce à eux prospère, après que des gens irrespectueux eurent sali le lait placé à leur intention sur le toit d'un baquet.

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Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar phoenlx » lun. juil. 01, 2013 9:37 am

Il est vraiment complet ce topic j'avais jamais remarqué que tu l'avais complété à ce point :shock:
Qu'importe la destination c'est le voyage qui compte
Notre histoire deviendra légende

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » lun. juil. 01, 2013 11:59 am

Hé hé, t'inquiète il est loin d’être complet j'en suis qu' a la moitié :rire:

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » lun. juil. 01, 2013 1:11 pm

Les Kloks'Tomtes
La main de fer, à quintuple ressort adapté au moignon de Goetz von Berlinchingen était l'oeuvre de ces nains mystérieux et habiles, que le colonel Scheerbart nommait Kloks'Tomtes.
( Paschasius, Tagebuch eines Beobachters seines selbst )

Image

Taille :
Trente-neuf centimètres.

Aspect :
Malingre et pâle. Visage anguleux. L’œil gauche plissé et scrutateur, le droit énorme, déformé par l’emploi perpétuel de l'oculaire des orfèvres et des horlogers. Mains très longues, aux doigts fins et agiles. Barbe pointue, rabattue en écharpe sur l'épaule.

Vêtements :
Assez élégants. Épaisse pelisse, châle de cachemire, pourpoint de velours de soie, col et manchettes de dentelles. Bonnet brodé ou shako autour duquel ils fixent leurs plus fins et indispensables outils. Bottes fourrées.

Habitat :
Sommets abrupts des montagnes d'Allemagne, d'Autriche, du Tryol. On en a signalé aux Indes.

Nourriture :
Se contentent d'un rien, mais ne dédaignent ni les vins pétillants ni les liqueurs de fruits.

Mœurs :
Ils vivent ensemble, dans un village aux maisons éloignées les unes des autres. Se fréquentent peu. Se complaisent dans la solitude et quittent rarement leur demeure-atelier. Il n'existe pas de Kloks'Tomtes femelles, aussi construisent-ils d'harmonieuses et adorables poupées-automates qu'ils s’échangent régulièrement.

Activités :
Tous les travaux les plus délicats d'horlogerie, d'orfèvreries et de création fantastique.

Les Kloks'Tomtes vivent sur les pics les plus inaccessibles, dans de petits chalets de pierre dentelés et ciselés, semblables à des "coucous", à des joujoux de fées, à des boîtes à musique de Follets. Ce sont les plus habiles orfèvres des Mondes Sans Age.
Depuis la nuit des temps sylphiques, ils ont fabriqués pendules, bijoux musicaux, oiseaux mécaniques, automates, horloges à jaquemarts, limonaires et beffrois de salon, carillons de verre et "armures qui se meuvent seules" pour toutes les cours des rois et enchanteurs des nations elfiques. Merlin, Titania, Mab, Obèron furent de leur clientèle.
Les Kloks'Tomtes voyagent beaucoup de façon invisible et peuvent se rendre d'un point à l'autre de la planète en une fraction de seconde, grâce à une fabuleuse machine aux rouages compliqués, inventée par leur Vénérable Maître. Ils vendent leurs travaux excessivement cher, mais font aussitôt fondre l'or exigé afin d'effectuer de nouveaux ouvrages.
Parfois les Kloks'Tomtes acceptent les commandes des hommes, si toutefois le travail leur convient et représente un défi ( on prétend que ce sont eux qui réalisèrent la célèbre main mécanique de Goetz von Berlinchingen pour lui permettre de reprendre l'épée et le combat contre l’évêque de Bamberg et les bourgeois de Cologne ). Sinon ils peuvent punir l'imprudent de les avoir dérangés en le précipitant du haut d'une crevasse.
S'ils sont chétifs de nature, un pouvoir hypnotique les rend invulnérables et téméraires pour l'audacieux qui ose les affronter. Ils peuvent également, grâce à de singuliers moulins au mécanisme complexe, produire vents et tempêtes, bourrasques, tourbillons de grêle et de feu.
Il existerait, dissimulé dans la vaste caverne d'une montagne, un musée exposant les plus belles et les plus précieuses de leurs œuvres. Ce musé poussiéreux et plein de toiles d'araignée ne serait jamais plus visité...et les Kloks'Tomtes recevant de moins en moins de propositions, puis plus du tout, auraient fini par perdre leur merveilleux savoir.
Il ne resterait aujourd'hui plus que quelques Kloks'Tomtes débiles, capables uniquement d'ébaucher des edelweiss de corne pour les boutiques de souvenirs racolant les cars de touristes.
Modifié en dernier par Náin le lun. juil. 01, 2013 10:08 pm, modifié 1 fois.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » lun. juil. 01, 2013 1:59 pm

Diablats, Diablerets, Dahuts, Barbegazi et autres Velus
Royaume de l'âme, au-delà des cimes et du temps.
[Reflet de notre propre rêve enfermé dans une étoile de glace.]

( Capucine Locatelli, L'Almanach des enclos )

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Image
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Taille :
Trente centimètres.

Aspect :
Si ceux des neiges ont le poil blanc, ceux des alpages sont verts, ceux des crêtes roussâtres, ceux des crevasses noirs ou gris. Tous les Velus ont le corps recouvert d'une toison sèche semblable au lichen ou au pelage des marmottes, chèvres et isards. Les montagnards qui les ont aperçus les décrivent toujours petits, vilains, très vifs, robustes, tantôt cornus, les pattes palmées ou ensabottées.

Vêtements :
Leur toison adaptée à la saison fait usage de manteau aux "Sauvageons" qui se promènent quelquefois dans une grosse boule de lichen dans laquelle il se niche pour dormir.

Habitat :
On les trouve sur toutes les montagnes du globe, jamais groupés en une seule caverne mais disséminés dans les anfractuosités des rochers.

Nourriture :
Racines, baies, gibier.

Activités :
Dès qu'un inconnu s'avance sur les pentes, aussitôt les guetteurs velus avertissent les autres en sifflant comme des marmottes. Tout leur est bon pour protéger la montagne s'ils la sentent en danger.
Pour se régénérer, ils se laissent dégringoler avec les avalanches, et lorsqui'ls remontent ils ont rajeunis de cent ans. ( On prétend que le prince des cimes Samivel avait du sang de Diableret. )

A quoi ressemblent les petits nains de la montagne ? Smick, Smack, Smick, Smack, Smock ! L'imagerie enfantine, le folklore de Mère l'Oie et les cartes givrées de Noël les ont gravés en nos mémoires : courtauds, barbus, coiffés du bonnet pointu, descendant à la queue leu leu des sommets, la pioche sur le dos, la lanterne au poing, vers leur chalet de poupée. C'est ainsi que Dame Tartine décrivait les Eismandel, les Bergleutes, les Rougeverts, et nombre de petits mineurs tyroliens de Suisse et des Carpates...Mais les plus nombreux, courant les roches, les moraines et les pics, sont plus noirauds, sauvages, velus...et très souvent pédauques ou sabottés.
Toute la montagne grouille de Fées et de Nains, d'Elfes et de Gnomes. Les Velus s’éparpillent le long des crêtes. Ce sont de véritables fossiles vivants, aussi anciens que la roche, aussi rustiques que le lichen, aussi résistants que le Chocard des fissures. Compagnons des premières marmottes, ils étaient là avant les Fadets, les Sarrasins, les Servans.
L'homme ne montait qu'avec respect, déposait cadeaux et offrandes aux génies, aux dieux qui en échange lui ouvraient des vallées verdoyantes, des mines, des sentiers vers des royaumes nouveaux et de purs infinis, et prévenaient le timide grimpeur du "souroche" ( ou mal des montagnes ). Mais "il ne fallait sur telle ou telle cime sacrée tuer un animal, arracher aucune herbe, sinon le sol s'ouvrait, les avalanches pleuvaient, le glacier se refermait".
L'homme dans la montagne n'était jamais seul, mais surveillé par mille présences, mille Velus dissimulés sous la pierre, la mousse, la neige...
Un jeune berger quittait souvent les troupeaux de son père pour aller à la chasse au chamois sur les pointes nébuleuses des Alpes voisines ; ses parents le lui avaient en vain défendu, il se livrait avec passion à ce dangereux plaisir. Un soir qu'il était au milieu des plus horribles précipices, il fut surpris par une violente tempête ; la neige et la grêle lui firent perdre sa route et il s'étendit sur un rocher, pris de peur, de fatigue, de froid et de faim. Tout à coup l'Esprit de la montagne s'approcha de lui sous la forme d'un "Tourbilllon Velu" et lui cria d'une voix menaçante : " Téméraire ! Qui t'a permis de venir tuer les troupeaux qui m’appartiennent ? Je ne vais pas chasser les vaches de ton père : pourquoi viens-tu chasser mes chamois ? Je veux bien te pardonner encore cette fois, mais n'y reviens pas." Alors il fit cesser l'ouragan et remit le chasseur dans le sentier de son chalet, et depuis ce jour le jeune berger ne quitta plus son troupeau. Là-haut le Velus règne en maître, il sait tout, voit tout, entend tout, il est le prolongement de la montagne, il en est le bras protecteur et destructeur.
Les montagnards le redoutaient tant qu'ils firent de lui une sorte de petit diable, de Diableret, Diablat, d'Homme Née ( noir ).
Les hommes d'aujourd'hui, qui ne respectent plus guère les cimes, l'ont caricaturé, réduit à un sujet de plaisanterie, et pour railler le touriste l'envoie, la nuit, à la chasse aux Dahuts, aux trousses d'un leurre qui, parfois agacé d’être ainsi traité, se venge ne le jetant au bas d'un précipice, le perd, ou le gèle dans une congère sans âge.
Il en existe plusieurs espèces :
Le Basa-Jaun, ou seigneur sauvage,vit dans les abîmes des Pyrénées. Son corps est recouvert de longs cheveux soyeux. Le petit Tempestaire du pic Nelhou détruit les moissons, lorsque les hommes l'ont mis en colère.
Les Diablats du Valais sont experts pour danser la coraule ou dans du diable.
Les Dusies ont des sabots d'argent et un bonnet velu.
Les Mimis du nord de l'Australie sont parfois cannibales.
Si les Btson rouges ne sont pas méchants, le Mo-sin-a, l'"Esprit Poilu" apparaissait au montagnard solitaire sur les cimes chinoises.
Les Barbegazi, les "Barbes Glaçons", n'abandonnent leurs lits de glace qu'a l'approche de l'hiver.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » lun. juil. 01, 2013 3:01 pm

Bidon
La beauté vitale peut tout se permettre : elle n'est pas astreinte aux limitations du goût.
( Jean Rostand, Confidences d'un biologiste )

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Taille :
Quarante centimètres.

Aspect :
Tout en jambes et en épaules. Roussâtre, tête de belette à l’œil perçant.

Vêtements :
Couvert de mousses et de broussailles, chaussé de fins sabots taillés dans des cornes de bouc.

Habitat :
Une tanière enfouie dans le cours rebondissant d'un torrent qui sans cesse raconte sa légende.

Nourriture :
De-ci de-là, un peu de tout, un peu de rien. Une noisette, des faînes, une poignée de myrtilles, des mélis-mélos de garde-manger "visités".

Mœurs :
Insupportable en mai pour tous les cotillons : des bergères aux Fadettes...et aux Fadets.

Activités :
Charmait les hauteurs par ses concerts cristallins de xylophone improvisé sur les orgues des stalactites.

Au pied des quenouillées pierreuses des "cheminées des fées" à Saint Gervais, se dissimule au pied d'un torrent tout blanc un trou : la tanne de Bidon. Là vivait un de ces nains montagnards, vif mustélidé, pointu du museau, furtif et malin qui, d'un bond, raflait au chalet un beignet croustillant, une bougnette, et d'un autre bond rivalisait de cavalcades à l'arête des crêtes à chamois. Il était en plein de ces êtres sortis des roches, des séracs, et des rares bruyères, mélange de marmotte, fouine et bouquetin avec un lointain cousinage de la fesse gauche d'une lignée noble alpestre.
Bidon, de ceux-là, brigandait par-ci par-là toutes les pentes. Pour rire ! Certainement pas pour s'enrichir. Que peut-on bien voler, au pâtre, au forestier, de plus luxueux qu'une plume au chapeau, un bout de pain cassant, une pincée de tabac, un coin de caillou de fromage. C'est le geste qui compte ! Même, on lui laisse le couteau.
Plus tard, aux touristes, aux grimpeurs amateurs, aux premiers skieurs, il jouera nombre de vilains tours. Il n'a jamais aimé qu'on vienne marcher dans les sentes musquées de son passage, qu'on déflore les coulées de campanules, que des filles mannequinées sillonnent la vierge vastitude. Il a fait rouler un éboulis de caillasses, détourné un torrent sur un refuge, poussé au vide un imprudent. En bas, au glapissement de son rire lancé par les échos, on devinait dans la cocarde victorieuse des notes un nouveau méfait. Les guides montaient constater l'accident. Une corde soudain coupée avait précipité un corps au fond d'une ravine.
Au début il épargnait les femmes qui en jupe longue et chapeau venaient s'essayer sur la neige, se contentant de les piquer de loin avec une sarbacane chargée de flopée d'aiguilles de pin.
Elles croyaient aux taons, aux frelons - il les piquait de plus belle, dérobait leurs rubans qu'ensuite il déposait à la porte des Fadettes.
Et puis, devant le nombre croissant des coquettes, Bidon les jeta aussi par-dessus les hauteurs et devint très méchant. Fou furieux, il truffa la Haute-Savoie de tendelles et de chausse-trapes, ce qui mit en péril tous les usagers de la montagne. La mort accidentelle d'un innocent Fadet étranglé par un traîtreux collet décida le Petit Peuple à mettre un terme à cette guérilla. Une nuit les chasseurs Servants, Diablerets, Dahuts, Fadets et Aguanes venus d'autres versants traquèrent Bidon jusqu'au sommet du Mont Blanc, d'où il préféra se jeter plutôt que se soumettre à leur loi.
Modifié en dernier par Náin le lun. juil. 01, 2013 9:24 pm, modifié 1 fois.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » lun. juil. 01, 2013 4:18 pm

Le Sotré
Pressons le pas, il n'y a rien de bon à rencontrer le Sotré !
( "L’Epinette de Ramouchamp", Almanach du berger )

Image

Taille :
Soixante centimètres.

Aspect :
Étique et malgracieux. Nez très long et pointu. Cheveux et barbe embroussaillés. Nyctalope. Œil clair. Pieds nus longs et plats, plantes cornées, chevilles en ergots. Fort robuste malgré sa maigreur. Bouche sans lèvres, fendue d'une oreille à l'autre.

Vêtements :
Se montre tantôt vêtu uniquement d'une houppelande rouge et d'un haut bonnet noir, tantôt d'une houppelande noir et d'un haut bonnet rouge. Un collier de champignons séchés autour du cou.

Habitat :
D'anciennes galeries de blaireaux, sommairement aménagées de couches de duvet dérobé dans les poulaillers. Seulement sur les lieux les plus élevés des Vosges, à proximité des chalets et des fermes.

Nourriture :
Dévore le contenu des armoires et des garde-manger. Amateur de champignons. Raffole de lait et de potée.

Mœurs :
Le mystère demeure autour de sa façon de se reproduire : il n'y a pas de Sotré femelles. Les Vosgiens prétendent qu'ils poussent naturellement comme les champignons, ou par l'opération des rayons de lune sur l'humus...ou même qu'il naît d'un rire et que "tant qu'il y aura des farces à jouer, il existera des Sotrés".

Activités :
Le Sotré dort, mange, s'amuse beaucoup et chante des tas de mélodies incompréhensibles à l'oreille humaine, qu'il connaît sans les avoir apprises.

Qui, au poulailler, vole l'un après l'autre tous les œufs de la nichée ? Qui cache les sabots, les outils, enmêle et tresse les lacets des chaussures, et la nuit ouvre les portes du clapier ?...C'est le Sotré ( ou Sotret, Souttré, Soltrait ).
Dans le logis endormi, il mène folle sarabande, met tout sens dessus dessous...et à l'aube, las, le ventre tournicoté d'avoir trop ri de ses espiègleries, il s'enfuit en poussant un cri qui jette le fermier à bas du lit ! Ce turbulent lutin, vosgien n'est pas bien féroce mais par trop gourmand, voleur, paresseux, curieux, effronté, coléreux et paillard en diable ! Si, par hasard, on vient à le surprendre, soit à l'écurie en train d'agacer les chevaux, soit à la cuisine, son long nez planté dans la motte de beurre, il est recommandé de faire semblant de ne pas l’apercevoir et surtout éviter de lui adresser la parole...sinon le Sotré pourrait vous envoyer dans un tourbillon de vent soufflé par sa bouche démesurément grande. Lorsque le Sotré, très friand de lait, veut traire une vache, il commence par lui ôter les cornes, qu'il ne remet pas en place si on en vient à le déranger.
Cependant le Sotré aime beaucoup les enfants - trop protestent les chroniques : "Les petites filles que le lutin Sotré a enlevées et connues reviennent toujours de leur séjour égarées et benêtes, demeurent toute leur vie célibataires à chatonner de dolente façon et à converser avec les nuisibles bêtes." Sinon, d'ordinaire, il se contente d'entre dans les chambres des enfants et de les choyer pendant leurs sommeil, de les bercer par d'interminables et jolies complaintes. Heureux ceux qu'il entoure de ses prévenances, car il leur ouvre le cœur et l'esprit, leur donne aussi l'adresse, l'agilité, la force...et le don de trouver les places à champignons.
Les dames, tout au moins celles que ses visite sous l'édredon irritent et qui sont désireuses de maintenir la paix au foyer doivent, pour se préserver de ses familiarités, se placer les bras en croix au moment de dormir et réciter : "Sotré, Sotré, ne vient pas rentrer : dehors reste à rester. Sotré, Sotré, nous laisse en paix !" Quelques-unes déposent un couteau pointe en bas sur leur poitrine : le lutin s'y blesse, s'enfuit et ne reviens jamais plus.

SauronGorthaur
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Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar SauronGorthaur » lun. juil. 01, 2013 9:45 pm

c'est bien parce que grâce à toi, je ne ressens pas encore le besoin d'acheter les livres :super:

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » mar. juil. 02, 2013 9:55 am

Le Sotê
Saute, Sotê, Saute
Pad'ssus les haies et les bouchons [buissons]
Saute au Diâl et cô pu long ! [encore plus loin]

( Formule des Chorchîlles ( sorcières, J. Van de Wattyne )

Image

Taille :
Quarante centimètres.

Aspect :
"Vieux petit bonhomme". Corpulent, rougeaud, le nez fort. Énorme tête rigolarde vissée dans des épaules voûtées. Œil pétillant. Sa belle barbe légendaire a laissé son nom à la clématite des haies, appelée "barbe de Soté".

Vêtements :
Ravaude et enjolive coquettement les fripes usagées que les maris ne veulent plus mettre. Chapeau haut-de-forme.

Habitat :
Vit dans de confortables chambrettes, aménagées au fond de cavernes proches des hameaux de Wallonie, plus précisément en Hesbaye, pays liégeois, dans les Ardennes.

Nourriture :
Gourmand, gourmet, le Sotê adore cuisiner, soit chez lui, soit chez les gens qui l'y invitent. Apprécie la bière, surtout la gueuze et la vieille brune qu'il fait vieillir à la fraîcheur des "trous à Sotês".

Mœurs :
De vieilles peintures trouvées sur les murs des demeures sotês, et représentant vraisemblablement des portraits d'épouse défuntes, prouverait l'existence de femelles assez avenantes disparues depuis fort longtemps. Les Sotês sont devenus très rares.

Activité :
Travail peu en dehors de ses aides ménagères. Fumeur, il cultive quelques plans de tabac dissimulés dans les bois, que les Nutons lui saccagent régulièrement, se vengeant ainsi de sa bonne entente avec les humains.

Le Sotê, ou Sotai, est un nain belge troglodyte. Pour Grün, le Sotê prend sa racine du basque Soto, grotte. Barbygère ironise : "Sautons à pieds joints sur l'étymologie du "bondissant" Sotê dont l’évidence saute aux yeux, comme celle de son complice, le "lubrique" Massotê, Massotai ( que les femmes aperçoivent toujours trop tard ) alter ego wallon du Massariol." Le Sotê veut bien aider à de menus travaux mais n'irai pas user sa belle vieillesse et faire fondre son bon bedon rond à construire tours, églises et ponts pareillement aux Kabouters, Lamignacs et autres nains bâtisseurs. Il a horreur des durs et virils travaux manuels et, jadis, lorsqu'il vivait parmi les hommes, c'était tout une histoire pour le convaincre, en temps de fenaisons et moissons, de prendre une faux ou un râteau. Il préférait assister la ménagère aux cuisines. Un grand tablier ceint autour du ventre, il s'agitait, le nez patateux frissonnant, les joues vermeilles, l'eau à la bouche, au-dessus des marmites et lèchefrites. Gai, il faisait alors chanter les cuisinières roses et dodues, les lutinait, les chatouillait de sa longue barbe dans le cou et leur claquait le derrière tout en surveillant la cuisson des pâtés, des hochepots et des tartes. Il ne daignait pas non plus participer à la vaisselle, à la lessive, au repassage...Devisant, "racontant le conte", tasse de café-péquèt, petit biscuit et pipe à la main, il abreuvait la compagnie une fois les maris aux champs de romanesques histoires d'amour et de chevalerie.
Fin danseur malgré sa corpulence de nabot pansu, on pouvait admirer son adresse à tourner "l'aredge" ( l'enragée ) avec tant de fougue que l'expression "jouer au Sotê" signifie encore dans plusieurs coins de Hesbaye s'amuser à la toupie ! Il était de toutes les fêtes, cortèges, ducasses, et son effigie cocasse balance toujours sa grosse tête chenue, au son des fanfares, lors du carnaval de Malmedy.
Joseph Wrindts
( Wallonia, t. 4, p.82 ) signale que ce sont les Sotês, si bien intégrés à la vie villageoise, qui vinrent annoncer aux paysans la venue de Charlemagne, flanqué de toute sa troupe chamarrée. L'Empereur à la barbe fleurie, à la fois amusé et impressionné par leurs cabrioles et voltiges, et leur habileté à manier l'arc, tenta, sans succès, d'en enrôler quelques-uns pour en faire des guerriers acrobates ; mais trop peu belliqueux, ceux-ci déclinèrent toutes les propositions, prétextant un "sédentarisme chronique".
Les deux dernières guerres, la démence dévastatrice des hommes les ont à jamais convaincus de regagner la quiétude des mondes secrets et souterrains - les ménagères préférant de tout façon suivre aujourd'hui les émissions de radio ou de télévision, plutôt qu’écouter leurs sornettes qui, auparavant, les faisaient rêver.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » mar. juil. 02, 2013 11:40 am

Sarrasins, Mauriacs et Hairodes
Les Cagots ont existé ; et il y a encore en Estramadure espagnole, retirée dans la montagne et vivant à l'écart du siècle, une communauté de nains appelés Hurdès.
( Samivel )

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Taille :
Autrefois grands, forts, beaux avant de rapetisser aux dimensions d'un écureuil.

Aspect :
Le Tartaro, ou Tartare des Basques, est velu sur tout le corps et pourvu d'un seul œil au milieu du front. A cette exception près, tous les autres : Mauriacs ou Maures, Hairodes et autres Sarrasins, se ressemblent. Le rictus amer, l’œil triste sous des sourcils broussailleux. Le hâle de la peau est maculé de suie. Corps grêle, épaules tombantes, tronc et pattes velus, pieds palmés.

Vêtements :
Misérables haillons de peaux de lérots et campagnols. Les Hairodes portent sur la tête et les épaules des crânes d'hermines, les Sarrasins des sortes de calottes en bois qui doivent leur donner l'impression d’être casqués, mais font surtout penser à de grossières cupules de glands.

Habitat :
Salles communes dans les grottes des hautes et petites montagnes. Se faufilent chez eux par des trous, des crevasses cachés par la végétation. Les Caramaras vivent sous les dolmens, le Fachan, un cousin des Highlands, sous les roches du Ben Nevis et des Grampians. Une autre espèce de Sauvageon de montagne est le Pomarindo du nord de l'Italie : mélange de Follet et de Monaciello.
Leur dernier roi, le Grand Sarrasin, est enterré à Guernesey sous un dolmen.

Nourriture :
On les dit cannibales ( en Bretagne le Sarrasin est considéré comme un ogre ). Ils mitonnent de surprenants pot-au-feu et ragoûts de lierre, fougères, clématites, asperules, mousses, champignons, accompagnés de taupes, hérissons ou de petits rongeurs. Les femelles cuisent des pains dans des fours à Sarrasins et à Hairodes ( paraît-il encore en activité ).

Mœurs :
Valeureux guerriers, chevaliers des dieux, destinés à de grandes tâches cosmiques, ils ne sont plus, pour l'instant, que des piégeurs de souris et de musaraignes.

Activités :
Chassent, travaillent les métaux, contemplent mélancoliquement armures, casques boucliers, épées devenus plus de cent fois trop grands pour eux, et qu'ils ne pourraient même plus soulever.

Tartaro, Hurdès, Cagots, Caramaras, Hairodes, Sarrasins, Mauriacs, qui sont ces mystérieux renégats aux origines troubles, enterrés parmi les ombres et failles des monts lointains, affiliés aux suppôts du Mauvais ? On les a volontairement mélangés, confondus avec les bohémiens rétameurs, romanichels voleurs d'enfants et nomades. Il furent marqués de l'infamante patte d'oie, signe distinctif des parias, proscrits, lépreux, daymons.
"Les Sarrasins à l'aube des Ages hantaient les sagas et les gestes épiques. Les récits des croisades entachèrent leur bravoure, les firent tomber en disgrâce aux yeux des Chrétiens...et le mot Sarrasin finit par désigner les païens de tout poil" ( Barbygère ).
"A un endroit nommé Lou Pahon, un escarpement suspendu sur l'Hérault, Guilhem passait par là à cheval, apportant à Gellone la relique de la Vraie Croix, lorsque, à un détour de chemin, sur un rocher à pic, il entendit des cris et des "goulées" et vit tout à coup une troupe de Sarrasins s'élancer sur lui. Il ordonna à sa monture de franchir la rivière d'une enjambée. L'effort fut si violent que la tête et le sabot droit du cheval marquèrent leur empreinte sur la rive gauche, tandis que sa queue en laissait une seconde sur la rive opposée..."
Leur peuple disparut peu à peu, ne laissant que quelques représentants chez les Nutons, les Gnomes, dans des grottes, des trous, des souterrains. Naturellement on les imagina d'une taille compatible avec leur habitat : on les voûta, rapetissa, noircit, bestialisa d'une toison fauve... Les traditions orales se souviennent encore des affrontements qui les opposèrent aux homme, lorsqu'ils essayaient vainement de leur arracher quelques maigres territoires. "Les gens de Colombugne contaient que les Sarrasins, chassés du pays de Montmaure, s'étaient réfugiés dans une caverne, qu'ils y étaient morts de faim plutôt que de se rendre, et qu'ils avaient jetés dans un puits la peau d'un chien qui contenait le trésor de la tribu." "Ils s'empalèrent de dépit sur leurs propres épieux, après avoir perdu la bataille de la Roche Migé qui durait depuis six jours." "Le souterrain-refuge de Moubon à Saint-Martin-le-Mault ( Haute-Vienne ) est toujours jonché par les ossements des habitants d'un village voisin massacrés par les Sarrasins."
Les rares survivants se mêlèrent aux autres races bannies et vécurent avec elles une existence de nains montagnards.
Modifié en dernier par Náin le mer. juil. 03, 2013 6:40 pm, modifié 1 fois.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » mar. juil. 02, 2013 1:57 pm

Les Lamignac
Le lis martagon indique les sentes à Lamignac...
( Mgr Segrée-Fontaine, Derrière les gentianes )

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Taille :
Une cinquantaine de centimètres.

Aspect :
Les lamignac, ou Laminak, sont "semblables aux hommes, mais plus petits, mal faits". Pourquoi ? Parce que "le Bon Dieu les a créés avant les hommes.", dit-on. Les Lamignac ne sont pas contrefaits mais leurs traits rudes, boucanés, leurs corps trapu, lourds de muscles sur de courtes pattes bosselées par un mollet hypertrophié à force d’escalades. Les cheveux sont touffus, talqués de poussière d’or. Les plus anciens se faisaient piqueter de coquets tatouages en spirale sur les joues.

Vêtements :
Tuniques, capes, robes de peau finement tannées. Manteaux de fourrure en hiver. Ils n’ont besoin ni de chaussures ni de bottes, leurs pieds étant naturellement durs comme de la corne.

Habitat :
Les montagnes du Pays Basque. De splendides châteaux taillés dans des cavernes au-dessus de caves débordantes de somptueux trésors.

Nourriture :
Les montagnes du Pays Basque. De splendides châteaux taillés dans des cavernes au-dessus de caves débordantes de somptueux trésors.
Nourriture : Une cuisine que l’on ne trouve même pas sur la table des rois, disent ceux qui l’ont goûtée et dont ils gardent encore l'incomparable saveur en bouche.

Mœurs, Activités :
Le Lamignac est fier, un peu sauvage, un peu voleur, gai, comtemplatif et serviable. Il n’est pas agressif mais peut se mettre en colère, surtout lorsqu’on abîme son domaine. C’est un grand magicien qui peut faire disparaître des choses et des gens en nouant sa ceinture autour d’eux.
Il aime édifier des répliques des villes et villages des humains. Lanuit il lui arrive de descendre chez les hommes voler les matériaux d’une maison en construction pour la remonter dans un lieu qui lui paraît plus joli. Les dames Lamignac apportaient à celles qui les avaient aidées à accoucher, ou qu’elles jugeaient méritantes, une poule noire qui ne pondait qu’un seul oeuf par jour, mais d’or massif. C’est depuis que l’on dit de quelqu’un à qui la fortune sourit d’un seul coup qu'"il a reçu une poule noire".

Un jour qu'une jeune bergère gardait ses chèvres dans la montagne, un Lamignac vint à elle, la prit sur son dos malgré sa petite taille et, comme un ballot de plumes, tandis qu'elle criait de toute ses forces, l'emporta dans sa grotte d'Aussurucq. Elle y resta cinq ans. Les Lamignac lui donnait du pain aussi blanc que neige qu'ils faisaient eux-mêmes et d'autres aliments si bons qu'on n'en pouvait avoir des meilleurs. Elle avait un enfant de trois ans de l'un d'entre eux, à qui elle apprenait déjà suivant leur coutume à reconnaître les plantes. Un jour que tous étaient allés chasser en compagnie des Mauriacs et Petits Sauvageons, la laissant seule dans la grotte, elle dit à son fils de jouer en silence tandis qu'elle s'absentait un moment, et se sauva en courant vers la vallée. Lorsqu'elle arriva chez elle, ses parents eurent beaucoup de peine à reconnaître leur fille dans cette créature devenue Lamignac.
Une belle jeune fille vint, un soir, trouver une fermière quelque peu sage-femme pour qu'elle assistât une amie en mal d'enfant. Elles allèrent dans la montagne et, arrivée devant une falaise, la demoiselle lui donna une baguette en la priant de frapper le rocher. Aussitôt un portail s'ouvrit. Elles entrèrent à l'intérieur d'un château d'une rare magnificence, éclairée par des girandoles finement taillées dans l'or et le diamant. Au fond du plus bel appartement était une Lamignac prête d'accoucher, et tout autour de la chambre se tenait une foule de petites créatures sombres immobiles. Lorsque la femme eut fini son office, on lui servit à manger du pain blanc comme neige. Puis la jeune fille la raccompagna jusqu'au portail ; mais comme il restait fermé, elle lui demanda si elle emportait quelque chose. La femme lui répondit qu'elle avait gardé un morceau de pain pour le montrer à sa famille. Dès qu'elle l'eut restitué, la porte s'ouvrit, et la demoiselle lui bailla un gousset de louis d'or en lui disant de le mettre dans son bahut, et que si elle n'en parlait à personne, elle le retrouverait chaque matin entièrement rempli...
Tant et tant faits divers à propos des Lamignac. Il n'était pas un jour au Pays basque qu'on en rajoute un épisode ! Il suffisait de dépasser la lisière des premières gitanes et on était sûr de tomber sur eux à moins que ce ne soit eux qui vous dégringolent sur le dos ! Les relations à hue et à dia, malgré tout, ne se passaient pas si mal. Et puis, ma foi, si on voulait les éviter, rien n'obligeait à monter jusque là-haut. De toute façon chacun y trouvait son compte : je te vole par-ci par-là quelques parcelles de trésor, tu me vole quelques vaches et moutons ; je te donne une barrique de vin, tu me donne une baguette pour passer les rivières à sec. Quand on poussait le bouchon un peu trop loin : que les hommes faisaient sauter tout un pan de montagne pour tailler une carrière et qu'en représailles les Lamignac balançaient une avalanche de rochers, détournaient un torrent en plein milieu des cultures et des champs, qu'on était presque à en venir aux mains, il y avait toujours moyen de discuter et de passer aux concessions... Les petits humains et les petits Lamignac ne jouaient-ils pas ensemble à saute-ruisseau, à débusquer les marmottes, à courser les isards ? N'était-on pas, au fond, de la même vieille et grande Famille, celle de la montagne, des roches et des cimes ?
...Et il a fallu que ce vieux bidasse Roland, avec ses airs de héros bravache et son côté demi-solde, vienne tout gâcher. Bien sûr qu'ils avaient eu tort, les Lamignac, de lui goinfrer tout son cheptel en une seule et même nuit. Mais on pouvait encore arranger l'affaire. Les connaissant, c'est à peu près certain qu'ils auraient remboursé. Et bien non ! ce sacré traîne-Durendal de Roland n'a pas supporté l'affront...Et que j'te monte là-haut, que j'te les piège, que j'te les traque, que j'te les ratatine à coups de triques de fer et de cailloux. Une vraie guerre des fous ! Même des enfants y sont passés ! Personne n'y a rien compris. Alors les Lamignac survivants sont rentrés dans leur tanière, et on ne les a plus jamais revus.

Náin

Re: La Grande Encyclopédie des lutins

Messagepar Náin » mar. juil. 02, 2013 4:23 pm

Le Matagot :
Et si le chat n'était pas chat ?
( J.B Baronian, Ode à Anne )

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Taille :
Celle d'un grand chat. S'allonge aux nuits de pleine lune.

Aspect :
Gros chat noir. Yeux rougissant en temps de Sabbat où il peut se tenir debout sur ses pattes postérieures. La femelle possède une tâche de feu entre les oreilles.

Vêtements :
Jadis armures et belles parures. Aujourd'hui un pelage très lustré.

Habitat :
Provinces méridionales, le Centre, les Hautes-Alpes. Quelques familles nomades ont essaimé un peu partout, créant des races cousines : Maragots, Mandagots, Coste-Matagots, Montagos. Vivent en famille dans des renardières débarrassées de leurs occupants et fortifiées.

Nourriture :
Tous les gibiers de petite taille à plumes, à poil ou à écailles. Pillent clapiers et poulaillers. Vont boire au pis des vaches et des chèvres la nuit.

Mœurs :
Le Matagot est cruel, combattif, sauvage. Capturé, s'il se voit contraint de servir et de donner ses pouvoirs sorciers à un homme, sa vengeance est terrible dès qu'i peut s'en libérer. Il change tous les ans d'épouse lors des fêtes nocturnes du Mardi Gras.

Activités :
Chasse. Ne guerroie plus que rarement. Cultive l'herbe matagon. S'adonne à la magie. Grave inlassablement dur les griffes, dents et ornements conservés des Anciens l'épopée matagone.

La grande race des chats-Matagots régna longtemps sur toutes les chaînes montagneuses ceinturant la vallée de Béal-Trouble en Féerie ( de nos jours les Hautes-Alpes ). Ces lutins-fauves excessivement féroces, du haut de leur forteresse, asservissaient les petits peuples paisibles : Dahus, Foletins, Troglodytes, Blancs Bonnets, les obligeant à forger des armes, à extraire des minerais précieux de la roche, à cultiver l'herbe matagone servant à la confection des philtres magiques, à garder sur l'alpage les troupeaux de Joumeris ( mi-bœuf, mi-ânesse ). Chaque défilé et gorge menant à leur inaccessible repaire gardé par de monstrueux Arassas, animaux grisâtres au corps de lézard et à la tête de chat dont le regard de feu carbonisait celui qui le croisait. L'imprenable château-Roc tomba cependant aux mains des Sarrasins, conquérants des cimes grâce à un ingénieux traité avec les hordes de l'air.
Refusant la capitulation, le roi Torte-Matagot ne dut son salut qu'à sa profonde connaissance des galeries de la mine criblant ses montagnes. Suivi de favorites et de quelques fidèles, il s'y réfugia trente années durant avant de reprendre un combat acharné et désespéré.
Sa tête mise à prix, traqué par ses anciens esclaves, le tyran pitoyable fut définitivement écrasé à la bataille de Chaillot où des Folletins et Dahus vengeurs, après s’être emparés de lui, le trainèrent suppliant et larmoyant jusqu'au gouffre de la Coulobre du bord duquel ils le précipitèrent.
Quittant prudemment armures, adoubements, cottes de maille, armes et attributs guerriers, les survivants, métamorphosés en de banals et inoffensifs chats noirs, se fixèrent dans le Dauphiné, se réfugièrent en Berry, Sologne bourbonnaise, Tourraine, Gascogne, Poitou, dans les Bouches-du-Rhône et par-ci par-là à travers les provinces méridionales où ils sévissent encore diaboliquement toutes les nuits cornées.
Le Mardi Gras à minuit, le mercredi des Cendres, tous les Matagots dispersés de par le pays se rassemblent pour danser le noir Sabbat, retrouvant le don de la parole jusqu'à l'aube afin de chanter et de transmettre aux jeunes générations l'histoire, les hauts-faits et les secrets matagons.
"L'homme qui veux s'emparer de l'un d'eux doit aller à l'affût chaque soir, à jeun. Le meilleur moyen de réussir est d'attacher une poule à la croisée des quatre chemins. Le mâtin, qui est goulu, sent l'animal et court avec lui : c'est alors que le chasseur, caché dans la haie, saute sur son gibier. Il prend le Matagot par la queue, l'enferme dans un sac de cuir neuf, sans le malmener. Il met le sac sur l'épaule et revient à la maison sans parler, sans se retourner, quelques bruits qu'il puisse entendre et quoi qu'il arrive. Ensuite le possesseur du démon le met dans un coffre et le nourrit avec mille prévenances. S'il lui donne la première bouchée de ses repas, sa fortune est assurée, il trouve chaque matin un écu sur l'oreiller.
Mais tout cela finit mal, au seuil de la mort, le maître Matagot doit s'en débarrasser en le léguant à quelqu'un. Tant qu'il n'a pas fait ce don, que ses héritiers ne veulent pas toujours accepté, il ne peut mourir et agonise sans fin, souffrant horriblement."


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