Aujourd'hui ! Pour Noël, je vous fait un petit cadeau, je vous raconte l'une des histoires les plus cultes du tisseur : la fameuse saga du clone. Alors non pas la deuxième, qui se déroula de 1994 à 1996 et que l'on abordera une autre fois, mais bel et bien la première, la meilleure, qui fut publiée donc en 1975. Cette histoire démontre, selon moi, tout le génie d'un auteur comme Gerry Conway, peu voir pas connu des non amateurs de comics, qui connaissent malgré tout des noms comme Stan Lee, Jack Kirby ou Alan Moore, et qui possédait pourtant un talent rare de narration.
Son run sur Amazing Spider-Man a marqué les esprits, on lui doit notamment la création de personnages comme le Punisher (au passage très éloigné de ce que le personnage est devenu par la suite. L'idée de départ n'était pas d'en faire un personnage positif bien au contraire) et, donc, un des événements les plus connus de l'histoire du monte en l'air, la mort de Gwen Stacy. Même si la saga du clone date de 1975 et que de l'eau a coulé sous le pont (mouahaha) depuis cet événement tragique publié en 1973 dans Amazing Spider-Man #121, je considère toujours cette histoire comme faisant partie de la saga, une sorte de prologue étant donné que les événement racontés en 1975 en sont la conséquence directe.
Aussi bien dans l'histoire du tisseur, qu'en coulisses donc ! Car oui la mort de Gwen fut un événement si important qu'il nous est impossible de bien raconter l'histoire de cette saga sans expliquer ce qui se passait également du côté des auteurs, scénaristes, dessinateurs et rédacteurs... A l'époque, Stan Lee a donc quitté le titre, et Steve Ditko depuis plus longtemps encore. Les auteurs sont donc Gerry Conway et John Romita Sr., lequel a selon moi redonné un peps incontestable aux dessins de l'Araignée, n'ayant jamais apprécié le style figé et claustrophobe de Ditko. En 1973, Peter Parker est à la fac, est colocataire avec son ami Harry Osborn, et vit l'amour -presque- parfait avec sa copine Gwen Stacy. Mais il y a une autre femme à laquelle Peter n'est pas totalement indifférent, Mary-Jane Watson. Et là c'est important, car si la flamboyante MJ est teasée depuis l'ère Lee/Ditko, c'est bel et bien sous le crayon de Romita qu'elle prend vie. Et Romita l'aime beaucoup Mary-Jane, plus que Gwen Stacy, la favorite de Stan Lee. Les deux femmes sont d'ailleurs l'opposée l'une de l'autre. Gwen est douce, fragile et calme tandis que MJ est extra-vertie, allumeuse et sûre d'elle. Les deux auteurs ne sont donc déjà pas d'accords sur qui serait la meilleure copine de Peter et, lorsque Lee aura quitté le titre, Romita se rangera au même avis que Conway à savoir : que Gwen doit mourir, le couple qu'elle forme avec Peter menant qui plus est peu peu les scénaristes dans une impasse. Il n'y avait pas d'autres évolutions possible que le mariage, lequel aurait immédiatement pour effet de détruire l'esprit et le ton du héro, l'éternel jeune à problèmes (il faudra patienter encore une douzaine d'années avant que Peter se marie). C'est ainsi donc que Conway, conjointement avec Romita et Gil Kane, et l'accord à contrecœur de Stan Lee, tue Gwen Stacy en 1975. Un événement choquant, marquant, dont les fans vont mettre un certain temps à se relever. En effet la mort de Gwen Stacy, personnage très aimé du public, va faire couler beaucoup d'encre et de colère, dont les auteurs vont être la cible directe. Stan Lee, n'y tenant plus de se faire huer à chaque conférence qu'il donnait, ordonnera alors à Conway de faire revenir Gwen Stacy !
Et c'est là, en réalité, que le génie de Conway va se révéler. Utilisant le personnage du professeur Miles Warren, il transformera ce dernier en Chacal, un nouvel ennemi mystérieux du tisseur. Conway teasera ainsi plusieurs fois le retour de Gwen en la faisant apparaître de ci de là, suscitant malaise et remise en question de Peter, qui se demandera plusieurs fois s'il n'est pas la proie d'hallucinations. En parallèle, il commence également à faire flirter Peter et Mary-Jane, les faisant même s'embrasser à l'aéroport avant que Peter ne parte pour un voyage à Londres... En réalité, Miles Warren, un des professeurs de Peter et Gwen, était secrètement tombé amoureux de cette dernière. Refusant sa mort, pour laquelle il tenait responsable l'homme araignée, il se mit à cloner son étudiante préférée. Assassinant son assistant, et refusant de porter la culpabilité de tels actes monstrueux, il se mit alors à endosser une nouvelle identité, celle du Chacal, pour laquelle il confectionna même un costume, pour se dédouaner de ses actions. Parvenant grâce à son clone à attirer Parker et même à le capturer, il parvint alors à le cloner à son tour. Le clone de Parker ayant exactement les mêmes souvenirs et la même personnalité, il était alors impossible pour les deux jeunes hommes de savoir lequel était l'original... jusqu'à ce que l'un des deux périsse, visiblement le clone. Ayant vaincu définitivement le Chacal, Peter Parker se débarrassa de son clone en le jetant dans une cheminée d'usine. Mais voilà, comme les deux étaient persuadés d'être le vrai, comment être sûr et certain que c'est bien le bon qui est encore en vie ? Cette question servira d'ailleurs de base à la deuxième saga du clone des années 1990, où l'on apprend qu'en réalité, c'est le vrai Peter qui est mort et son clone qui a prit sa place. Le vrai Peter revient et se fait désormais appeler Ben Reilly (renvoyant à Ben Parker et le nom de jeune fille de May, Reilly). Mais c'est une autre histoire. A la suite de cela, le clone de Gwen Stacy partira en voiture, comprenant que Peter et elle ne peuvent continuer à être heureux en côtoyant la même ville.
Que seront donc les conséquences de cette histoire ? Elles seront en effet nombreuses. Comme je l’ai dit, Conway a profité de la mort de Gwen pour rapprocher Peter et MJ. Ce fut donc un réel coup de génie que de les faire s’embrasser à la volée, créant ainsi une attente et une volonté chez les fans de les voir ensemble. Ainsi, le retour de Gwen, qui met forcément à mal ce couple en devenir, ne devient plus une chose positive pour les fans. Se servant des clones, Conway montre ainsi à quel point il est vain et presque dangereux de ne pas accepter la mort des proches. La première saga du clone est indéniablement une histoire sur le deuil, et c’est là en réalité, toute sa grandeur. Car le deuil en question n’est pas seulement celui de Peter Parker. Ce n’est pas seulement Peter Parker qui doit accepter le départ de Gwen : ce sont les fans. Et faisant du couple Parker/MJ non plus une blague mais une possibilité réelle, Conway parvient à faire accepter aux fans la mort de ce personnage tant aimé. C’est donc l’une des meilleures histoires de Spider-Man. Car non content d’avoir frappé fort avec un événement majeur, si culte et intouchable que Gwen Stacy restera l’un des seuls et uniques personnages de comics à ne pas avoir été ressuscitée, Conway a également crée un des meilleurs ennemis du tisseur –le Chacal, le méchant de l’histoire, celui qui n’est pas parvenu à faire son deuil justement- et écrit donc une histoire qui s’inscrit au cœur même de ce qu’est le personnage de Spider-Man. En faisant du deuil de Peter également celui des fans, Conway respecte la première et principale force de l’Homme-Araignée, celle qui fait de son lecteur le héros.
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