Marvel 1602 est une série de comics créée par Neil Gaiman (qu'on ne présente plus) et Andy Kubert, fils de Joe Kubert (autre monstre de la bande dessinée aussi influent qu'un Kirby). Elle se compose de quatre mini-séries publiées entre 2003 et 2010.
La première, sobrement intitulée 1602, est composée de huit numéros écrits par Gaiman et dessinés donc par Andy Kubert, publiés de 2003 à 2004. Elle est de loin la meilleure.
Le speech de départ est simple : quid si les super-héros Marvel avaient débarqué non pas au XX ou XXIème siècle mais au tout début du XVIIème, aux dernières heures de l'ère élisabéthaine ? C'est ainsi qu'on retrouve certains des piliers de l'univers Marvel. Nick Fury et le Docteur Strange sont respectivement maître des espions et maître des arts obscurs au service de la reine. Les mutants sont pourchassés par l'inquisition de Magnéto (qui en réalité enrôle les mutants dont les pouvoirs ne sont pas ouvertement visibles) et sauvés par les élève de Xavier (ou Javier, pour l'occasion). Spider-Man et Daredevil sont au service de Fury tandis que Fatalis, rival dangereux de la reine, à enfermé les 4 fantastiques dans son château. Tout ce petit monde en vient alors à s'allier ou à s'affronter lorsque la reine demande à Fury de trouver une arme secrète et de la ramener en Angleterre, tandis qu'une porte-parole des colonies arrive sur l'île, tout cela dans un contexte où le temps et le climat deviennent de plus en plus instables.
Une excellente série où Gaiman réinvente le mythe de l'Amérique en replaçant les super-héros à l'origine même de son Histoire, eux qui ont toujours été considérés comme un phénomène culturel particulièrement représentatif des Etats-Unis, jusqu'à même être leur "mythologie moderne". Gaiman se sert donc astucieusement de l'époque de son histoire pour évoquer les colonies américaines dont les pionniers seront en réalité, no fameux super héros. En faisant ainsi d'Harfang Virgina Dare, premier sujet anglais né dans les colonies, et de Steve Roger son garde du corps, Gaiman fait de ses personnages non plus des héros façonnés par les Etats-Unis mais l'inverse. D'autant que la mort d'Elizabeth et l'arrivée de Jacques Stuart sur le trône forcera les partisans de la reine à fuir dans les colonies, nouveau réceptacle des "libertés". Le tout délicieusement enrobé d'un parfum historique où l'on se plait à voir les versions des personnages Marvel version XVIIème, très bien rendu par les dessins de Kubert par ailleurs, qui réussit pleinement à donner cette aura à la fois mystique et historique liée à cette époque si fascinante.
La deuxième série quant à elle, intitulée 1602: New World est écrite par Greg Pak et dessinée par Greg Tochini et fut publiée en 2005 en cinq numéros. Elle s'intéresse comme son nom l'indique à la colonie de Roanoke dans laquelle est donc née Virginia Dare, fille du gouverneur. Je n'ai pas grand chose à dire si ce n'est que c'est très en dessous du récit de Gaiman. Malgré le fait que la série s'intéresse plus exclusivement aux Amériques, le sous-texte de Gaiman liant les super-héros aux origines des États-Unis disparait complètement, pour tomber dans un simple jeu de référence certes sympathique, mais finalement superficiel. Et que dire des dessins de Tochini sensiblement hideux, au découpage franchement mauvais. Il réussit toutefois à retranscrire une armure plutôt réussie de cette version d'Iron Man.
La troisième enfin, Marvel 1602: Fantastick Four, écrite par Peter David et dessinée par Pascal Alixe, publiée en 2006 à 2007 en cinq numéros, s'intéresse aux 4 Fantastiques et à leurs explorations en caravelle après que le Docteur Fatalis ait enlevé William Shakespeare.
En pourchassant Fatalis, allié aux Terrifics, ils découvriront alors l'Atlantide menée par le Prince Namor non, pardon, le Prince Numenor ! Et oui ce n'est certainement pas un hasard si le dirigeant de l'atlantide dans cette version écope du nom que Tolkien donna à son île dans sa revisite du mythe.
Même si là aussi on ne pourra profiter du sous-texte de la première série, les dessins d'Alixe, le scénario efficace de David et le fait qu'il s'agisse d'une jolie histoire annexe à l'univers des 4 Fantastiques qui est probablement celui que je connais le mieux de Marvel m'ont rendu la lecture de cette série très sympathique et bien plus agréable que celle de la précédente. Et puis bon, l'idée de lier le caractère explorateur des Fantastiques à celui des grandes découvertes de l'époque, avec une bonne partie consacrée à leur voyage en caravelle à la poursuite de Fatalis est assez délectable.
