La critique que j'avais écrit à l'époque:
X-Men: Le Commencement (X-Men: First Class)
Année de sortie: 2011.
Durée: 2h11.
Réalisateur: Matthew Vaughn.
Scénaristes: Bryan Singer, Sheldon Turner, Matthew Vaughn, Jane Goldman, Ashley Edward Miller et Zack Stentz.
Compositeur: Henry Jackman.
Casting: Michael Fassbender (Magnéto / Erik Lensherr), James McAvoy (Charles Xavier), Kevin Bacon (Sebastian Shaw), Jennifer Lawrence (Mystique / Raven Darkholme), Rose Byrne (Moira McTaggert), January Jones (Emma Frost), Nicholas Hoult (Le Fauve / Henry "Hank" McCoy), Lucas Till (Havok / Alexander "Alex" Summers), Caleb Landry Jones (Le Hurleur / Sean Cassidy), Zoë Kravitz (Angel Salvadore), Jason Flemyng (Azazel), Alex Gonzalez (Riptide / Janos Quested) et Edi Gathegi (Darwin / Armando Munoz).L'Histoire1962. Erik Lensherr, jeune homme disposant du pouvoir de contrôler le métal, parcourt le monde à la recherche d'un ancien nazi, Sebastian Shaw, qui fit exterminer sa famille autrefois.
Charles Xavier, jeune professeur diplomé d'Harvard et télépathe, et son amie d'enfance Raven Darkholme, métamorphe, sont recrutés par l'agent de la CIA Moira McTaggert. Cette dernière enquête sur un complot terroriste d'envergure mondiale mené par le Club des Damnés, un club de la haute société dirigé par les mutants Sebastian Shaw et Emma Frost. Un complot impliquant de hauts militaires américains et russes.
Les deux hommes se rencontrent et décident de travailler ensemble à la destruction du Club des Damnés. Grâce à l'aide du jeune docteur Hank McCoy, créateur du Cérébro, Xavier et Lensherr parcourent le monde à la recherche de jeunes gens de leur espèce pour rejoindre leurs rangs en prévision de la grande bataille qui s'annonce. Mais avant tout, ils doivent les aider à développer leurs pouvoirs et à entrer en harmonie avec eux-mêmes (les mutants n'acceptant pas toujours leur nature et devant se cacher aux yeux de la société).
A mesure que l'entraînement évolue et que le conflit de Guerre Froide grimpe en tension, les philosophies des deux hommes commencent à diverger sur leur place dans la société. Celles de leurs protégés également...
CommentairesCinq ans après la fin de la trilogie, X-Men: Le Commencement décide de traiter d'une période jusque là relativement floue, celle de l'amitié entre Xavier et Magnéto, de la création des X-Men et du moment où les choses ont mal tournées entre eux.
Le réalisateur Matthew Vaughn situe son film en 1962, pendant la période de la crise des missiles de Cuba, moyen aussi de replacer les X-Men dans le contexte de leurs origines (ils ont été crées en 1963). L'ambiance du film est résolument années 60, les premiers films de James Bond avec les gadgets un peu extravagants, et les héros avec les costumes rétros aujourd'hui kitschs. Une ambiance basée sur le fun, qui ne se prend pas au sérieux (mais ce n'est qu'une apparence, il y a en fait énormément derrière) et qui n'hésite pas à exhiber fièrement son univers un peu kitsch, mais à le rendre attachant et en aucun cas ridicule.
Vaughn a réussi à s'imprégner de cette ambiance et la retranscrire magnifiquement, avec un vrai parti-pris d'auteur. Plus encore, sa réalisation est magistrale, avec des tonnes d'idées qui parsèment le film, narratives comme visuels. On peut citer par exemple un usage intelligent du fan-service: il y a des caméos, mais jamais gratuits, toujours dans des contextes qui s'y appliquent. Deux acteurs de la trilogie originale (je ne dirais pas lesquels) font également chacun une petite apparition mythique, dans des contextes originaux et inventifs.
La manière qu'il a de montrer la montée en tension du conflit de Guerre Froide, l'entrainement des jeunes mutants, les scènes d'action dynamiques et incroyablement bien filmées... Vaughn est un excellent réalisateur avec de vraies idées de mise en scène qui nourrissent l'originalité et la richesse de son univers filmique.
Le film s'ouvre sur un remake plan par plan de la scène d'ouverture du premier film, dans les camps d'extermination, où Magnéto révèle pour la première fois ses pouvoirs. La scène s'attarde plus loin que le film original pour décupler la colère et la tristesse du personnage et justifier pleinement sa quête de vengeance.
En parallèle, nous découvrons un jeune Xavier lors de sa rencontre avec le jeune Mystique qui va devenir son amie la plus proche, une petite soeur même.
Deux enfances différentes pour deux adultes radicalement différents. Digne d'un agent secret, Lensherr traque les anciens nazis de par le monde, mais sa colère est telle qu'il n'hésite pas à se mettre en danger dans le feu de l'action. Xavier, lui, est un jeune professeur un peu prétentieux et très décontracté qui utilise ses pouvoirs pour impressionner les jolies étudiantes.
En joignant leurs forces pour aider la CIA, les deux hommes vont subir une évolution remarquable. On les voit devenir de vrais leaders emblématiques au fur et à mesure du film, l'un acceptant finalement de reconnaître le monstre qu'il est au fond (se voyant lui-même comme la créature de Frankenstein qui recherche son créateur), l'autre devenant un homme respectable et prêt à mettre du sien pour défendre ses convictions.
Michael Fassbender est spectaculaire dans le rôle de Magnéto, donnant une humanité fulgurante au personnage dont nous assistons à la montée en puissance, tandis que James McAvoy est excellent dans le rôle de Xavier. L'alchimie entre les deux acteurs et la relation d'amour fraternel sincère qui unit les personnages alors même qu'ils commencent à emprunter des routes séparées y sont pour énormément dans la réussite du film.
A côté d'eux, on trouve les jeunes mutants, Mystique et Le Fauve étant les plus développés, qui se cherchent eux-mêmes, entre leur nature et l'appréhension qu'ils en ont. Tous sont troublés, certains finiront par l'accepter pleinement, d'autres pas. Mais il y a avant tout une vraie sincérité et, sans le paraître directement, Vaughn met sans cesse ces jeunes mutants dans des situations où, rien que par la manière dont ils se comportent, il y a déjà un parti-pris de leur part et une évolution qui se manifestent (sans avoir pour autant à tout expliquer par les dialogues, suivez mon regard !). On assiste ainsi, par exemple, à une scène d'action où, en dépit de leurs pouvoirs, on voit avant tout des jeunes gens normaux, terrorisés et incapables de lutter.
Et surtout, le film soulève intelligemment les questionnements de la saga: l'acceptation de soi (notamment dans la relation entre Raven et Hank) et l'intégration de leur existence dans une société qui n'est pas prête à les accepter.
Sur ce point, il est d'ailleurs intéressant de voir Raven soulever les propres ambiguités de Xavier, pas forcément si différent des humains. Son comportement initial vis à vis des mutants est même profondément malsain au début du film, avec une attitude moqueuse vis à vis de sa propre espèce et donc de ses semblables. Même plus tard, alors qu'il commence à se prendre pour une sorte de prophète, il conserve un certain ego et des idées ambigu qui font qu'il pourrait très bien lui-même devenir un tyran s'il se laisse aller à ses propres dérives.
A l'inverse, Lensherr les accepte tous pour ce qu'ils sont et les encourage à faire de même, plus noble dans l'idée, mais lui par contre est nettement plus soumis à l'appel de ses propres dérives par la colère qu'il porte en lui, une colère qui se mue en haine et qui risque de le transformer en monstre de destruction.
A la manière des films de Bryan Singer (même si l'ambiance de First Class est radicalement différente), il y a une véritable âme dans ce film, les mutants ont vraiment un coeur (en paix, dans le doute ou torturé) et ils ont la générosité de nous en faire profiter dans plusieurs scènes. Des scènes intelligentes qui servent toujours à mettre en avant leurs personnages et à exprimer leur évolution personnelle.
Malheureusement, les adversaires du film sont, eux, plus en retrait. Si Sebastian Shaw (excellent Kevin Bacon !) est bien développé et dispose d'une présence incroyable et qu'Emma Frost (magnifique January Jones !) remplit magnifiquement son rôle de Bond girl du clan des méchants avec grâce (elle tient en fait un peu le même rôle que Mystique dans X-Men 2), les autres ne servent que de sous-fifres, un peu à la manière de Dents-de-Sabre et du Crapaud dans le tout premier X-Men.
L'alchimie entre les personnages de Lensherr et de Shaw est également excellente, une relation ambigu entre amour et haine, entre rage et affection. Shaw voit Magnéto de la même manière que Stryker voyait Wolverine dans X-Men 2: le créateur prit d'admiration pour son propre génie à travers sa créature. Et Magnéto est pris dans une étrange sorte de complexe oedipien: pendant une bonne partie, il refuse de reconnaître qu'il est la "création" de cet homme et le hait plus que tout, mais il y a malgré tout une étrange forme d'attirance. Il est autant la créature qui recherche son créateur pour se venger que l'enfant qui recherche son père.
Cette relation ambigu culmine lors d'un face à face mythique, dans une salle entourée de vitres, où des émotions fortes sont véhiculées et où la réalisation de Vaughn suffit à exprimer toute la force et toute la violence de ce moment charnière. Pris entre l'ange qui tente de le raisonner et le démon qui le pousse à accepter sa véritable nature, Magnéto est amené à faire un choix définitif qui décidera de son destin et de sa relation future avec Xavier.
Et ce qui est fantastique, c'est qu'avec tout ce qu'ils ont vécu, avec tout ce qui s'est passé entre eux et malgré le cours que prennent les événements, la relation fraternelle et l'amour qui unissent les deux hommes sont plus fortes que jamais. Ils comprennent parfaitement l'autre et regrettent qu'il ne voit pas les choses à leur manière, mais ils sont malgré tout toujours présents pour le protéger, de lui-même et des autres. On retrouve là bien la dynamique entre leurs versions futures, incarnées par Patrick Stewart et Ian McKellen.
Quant au final du film, que je n'évoquerais pas pour ne pas spoiler, il est intense, d'une puissance émotionnelle incroyable et illustrant magnifiquement la dynamique du conflit qui prend place et qui domine la trilogie. Magistral tout simplement, avec Michael Fassbender qui transcende vraiment l'écran par sa présence incroyable !
La musique, quant à elle, sans être fabuleuse, elle colle assez bien à l'action et exprime bien cette ambiance années 60. J'adore particulièrement le thème de Magnéto qui évoque les tout premiers James Bond avec Sean Connery.
Au final, X-Men: First Class est un excellent film de divertissement, original et intelligent, qui s'avère particulièrement réussi. Très différent des précédents films dans le ton, il permet une vision différente de la saga tout en la complétant magnifiquement en nous révélant une partie méconnue de son histoire et dont tout le reste découle pourtant.
Xavier et Magnéto étaient déjà très intéressants dans les deux premiers films, mais là ils prennent une toute autre ampleur. Plus que des mentors, on les voit comme des jeunes gens aux passés et aux personnalités différents qui se construisent durant le film en leaders idéologiques charismatiques. Le personnage de Mystique est aussi beaucoup plus approfondi que dans la trilogie (où elle est importante mais où on ne sait que peu de choses de son personnage) et très crédible dans ses émotions et ses doutes, ressentant un amour fraternel sincère pour Xavier sans toujours être en accord avec ce dernier, et venant à admirer la personnalité charismatique qui entoure Magnéto.
Rétrospectivement, il est du coup dommage que ces trois personnages n'aient pas vraiment eu l'occasion de faire le point sur leurs évolutions respectives dans la conclusion de la trilogie: Xavier qui aurait reconnu ses propres dérives (d'autant que c'était présent dans le film en plus), Magnéto qui se serait aperçu du tyran qu'il est devenu et qui le regretterait tout en étant déterminé à aller jusqu'au bout, et même ne serait-ce qu'une scène entre Xavier et Mystique (les deux ne s'étant jamais croisés dans la trilogie).
En tout cas, pour un nouveau départ à la saga, X-Men: First Class la fait littéralement ressurgir de ses cendres et en devient même le meilleur opus. Un divertissement de très grande qualité, avec une histoire forte et efficace et des thèmes traités avec intelligence !
PS: A noter toutefois que, si le film prend en compte les deux premiers X-Men (à un ou deux caméos près, anecdotiques cela dit), il entre par contre en contradiction avec les événements évoqués dans X-Men: L'Affrontement Final. Mais on s'en fout de toute manière ! L'important, c'est le film même et, vu le niveau, ça serait dommage de bouder son plaisir avec ce genre de considérations.
"-Tu as abandonné la chance d'avoir une vie paisible. Pourquoi ? Je vais demander une dernière fois. Est-ce que je trouve qu'être avec Haruhi et d'avoir que des problèmes est amusant ? Réponds !
-Bien sûr que oui ! Bien sûr que c'est amusant ! Peu importe le nombre de fois où tu le demanderas, ma réponse restera la même: "Bien sûr !"