Je ne vais évidemment pas évoquer TOUT dans le premier post du topic, car c'est un sujet très vaste, je complèterai ce topic au fur et à mesure, il s'enrichira au fil des mois. En écrivant ce topic, je vais considérer que mes lecteurs ont plus ou moins testé la série, au moins la première saison ou une partie des épisodes de la première (lorsque j'évoquerai des éléments spoilants sur la seconde, je l'indiquerai) mais au cas où certains novices arriveraient ici, je rappelerai en début de topic certains fondamentaux sur la série. Si vous voulez éviter les spoilers et souhaitez découvrir la série un jour je vous déconseille cependant de commencer à lire ce topic tant que vous n'êtes pas en fin de saison 2.
Pour ce qui est du plan du topic : il n'y en aura pas, ce sera un peu anarchique. Quand une idée intéressante vient, je l'écrirai. Mais grosso modo, le topic suivra l'ordre des épisodes (du premier aux plus récents) pour éviter de spoiler trop vite ceux qui commenceraient à lire, en n'ayant pas vu les épisodes tardifs. Dans ce premier post je reviendrai surtout sur les épisodes 1 et 2, les thèmes phares, et la symbolique du logo de la série.
Avant de démarrer nous allons rappeler quelques fondamentaux sur la série : Comme vous le savez Westworld est une sorte de remake (en série) de l'ancien film des années 70 Mondwest (avec Yul Brynner), film qui avait lui-même donné lieu à une suite : Futureworld

scénario de Mondwest :
Un parc d'attraction peuplé de robots propose aux visiteurs de se replonger dans plusieurs époques. Lancés dans l'ouest sauvage, deux amis se retrouvent plongés en plein cauchemar quand l'un des androïdes se détraque et les prend en chasse...
ce que le résumé n'indique pas c'est qu'il y avait d'autres parcs en plus du parc western (avec des ambiances différentes), mais beaucoup moins exploités. Ainsi, on retrouvait déjà dans ce film l'idée de plusieurs parcs à thème où des visiteurs fortunés pouvaient venir vivre des expériences au milieu de robots-cowboys (pour le parc western) ou des robots incarnant d'autres types de personnages dans les autres parcs.
Le film évoquait un peu aussi un parc médiéval, ainsi qu'un parc sur la Rome antique. Les visiteurs pouvaient ainsi s'amuser avec les robots, vivre des expériences inspirées du far west, jouer aux cowboys et aux indiens, se livrer au vice, baiser avec de jolies robotes cow girls, flinguer à tout va ou simplement visiter ce monde, ses saloons, ses paysages en s'imprégnant tout simplement de l'expérience. La grande particularité évidemment est que les humains peuvent tirer à balle réelle sur les robots (et donc les "tuer", ils cessent alors de fonctionner et sont emmenés en coulisse par les équipes de maintenance du parc chargées de les réparer et les remettre en état, avec les mêmes personnalités et boucles narratives (ou d'autres)
En revanche, bien évidemment les robots ne peuvent pas tuer les humains et leurs balles ne leur font rien !!
Il est intéressant de noter que le réalisateur et scénariste de ce film était le grand romancier Michael Crichton, qui est bien connu aussi pour son célèbre Jurassic Park (on peut dire qu'il aime bien les parcs à thèmes coupés du monde lui


Et histoire de finir les présentations rappelons aussi que cette superbe série est produite par J.J.Abrams (réalisateur de certains Star Wars récents),
les showrunners sont Lisa Joy et son époux Jonathan Nolan, le frère de Christopher Nolan (the dark knight) et à la musique nous avons un grand nom aussi puisqu'il s'agit du désormais très courtisé Ramin Djawadi (bien connu aussi pour l'excellente bande son de la série Game of Thrones) mais nous aurons l'occasion de reparler du score en détail dans le topic.

La série TV Westworld (dont la diffusion a commencé en 2016) reprend l'idée du film de 1973 avec Yul Brynner, mais elle a le mérite de profondément approfondir l'univers, et de changer certains éléments scénaristiques.
Tout d'abord on peut noter que dans le film ancien, le robot Cowboy qui se détraque (et qui va attaquer les humains réellement en créant beaucoup de morts et de dommages) était un cowboy habillé de noir assez inquiétant incarné par le célèbre acteur Yul Brynner (il avait un petit côté Terminator dans ce film


En revanche dans la série TV, l'homme en noir est un visiteur humain, assez âgé (et incarné par Ed Harris) ce n'est pas un robot.
Si on voulait voir un équivalent du personnage de Yul Brynner dans la série, ce serait plutôt quelqu'un d'autre : Dolorès (ou Maeve) mais pas le personnage incarné par Ed Harris qui joue un tout autre rôle (et qui est magistral dans la série, soit dit en passant)
Ed Harris (L'homme en noir) dans la série Westworld

Ce rôle est d'ailleurs à mes yeux le plus beau rôle qu'ait jamais tourné Ed Harris (pour l'avoir pourtant vu dans pas mal de films) et n'est pas sans rappeler au niveau de son look celui qu'il avait dans le film Appaloosa (avec Viggo Mortensen)
La grande idée de Mondwest à savoir la recréation d'un parc imitant le Far West est reprise (pour le plus grand plaisir autant des fans d'ambiances westerns que des amateurs de science-fiction et de robots, il faut avouer que c'était assez osé !!)




Mais notons parmi les différences avec le film des années 70 que (pour le moment du moins, après 3 saisons au moment où j'écris ces lignes) aucun parc médiéval n'a été aperçu, en revanche la saison 2 de la série fait la part belle au Japon féodal avec "samouraï world". De plus, un parc indien est aperçu à quelques reprises, même s'il est moins développé. C'est aussi ce qui est beau, rigolo et assez fascinant avec la série Westworld, beaucoup de déclinaisons sont possibles (pour ma part j'aimerais voir des parcs avec de toutes autres ambiances que le western, le film des années 70 Futureworld - qui faisait suite à Mondwest - nous montrait d'ailleurs un parc futuriste avec des références à la conquête de l'espace, entre autre. Et parmi les fantasmes des fans sur la toile, certains ont parfois rêvé d'un parc Game of Thrones (simulant l'univers de l'autre série phare de la chaine HBO !!) cette idée folle malgré quelques vagues rumeurs à une époque n'a pas été mise en oeuvre à l'heure actuelle mais on peut noter tout de même un petit clin d'oeil à ceci dans un des épisodes de Westworld avec un gros dragon qui n'est pas sans rappeler les créatures de Daenerys dans GOT !!
Bref, je disgresse, mais on voit à travers ceci que s'ils le voulaient les scénaristes pourraient faire durer leur série très longtemps sur bon nombre de saisons aux ambiances très différentes. Le virage que prend cependant la série dès la saison 3 est assez différent (et très intéressant aussi).
Quelques images du parc samouraï dans la série (samouraï World)


On peut d'ailleurs y apercevoir l'acteur japonais Hiroyuki Sanada (jadis super connu notamment pour son rôle phare dans la série San Ku kaï, et qui fait aujourd'hui une belle carrière à l'international)

Le thème de la créature robotique qui échappe à ses créateurs humains et qui va se retourner contre eux, est un classique de la science-fiction. Mais la force de la série Westworld est d'enrichir ce thème en proposant une déclinaison bien à elle et singulière, tout en mélangeant à cette histoire l'idée des parcs à thèmes, et bien d'autres réflexions et idées ou concepts encore.
Difficile de ne pas penser à des oeuvres comme Terminator, Blade Runner, et d'autres. Et au mythe de Frankenstein (lui-même inspirateur de beaucoup de ces histoires SF) ou (en remontant encore plus dans le temps), le mythe Juif du Golem de Prague bien évidemment.

Et au-delà de ça, on peut penser à certains récits bibliques et mythologiques où des enfants se rebellent contre leurs parents (Zeus et les olympiens contre Chronos etc) Dans l'épisode 1 de la série le personnage d'Ashley Stubs (chef de la sécurité du parc) prédit à Bernard Lowe, l'un des principaux ingénieurs et concepteurs des robots incarné par Jeffrey Wright, que les enfants finissent toujours par se rebeller contre les parents ...
Mais parallèlement à ces réflexions sur l'Intelligence Artificielle échappant au contrôle de ses créateurs humains, la série Westworld constitue aussi une réflexion sur le monde du cinéma et du divertissement, et une critique acerbe (bien que voilée et en sous-texte) de nombreuses créations actuelles, notamment à Hollywood, à l'instar de ces films qui jouent sur les bas instincts humains (recherche du sexe, de la violence) pour faire de l'audience. Indéniablement, quand on lit la série entre les lignes, elle prône un autre type de spectacle, plus artistique, plus ... subtil.
Comme le souligne d'ailleurs très bien le youtubeur Captain Popcorn (qui soit-dit en passant, a livré de très belles et profondes analyses de cette série) nous avons une profonde symétrie entre l'univers de la série Westworld, et le monde de l'industrie cinématographique.
Il n'est sans doute pas un hasard, par exemple, que le grand démiurge de ce monde, celui qui a co-créé les robots (et incarné par Anthony Hopkins) soit nommé Robert Ford.

Robert Ford est le même nom que celui de l'assassin dans le film L'assassin de Jesse James par le lâche Robert Ford (film de 2007 avec Brad Pitt et Sam Sheppard)
Mais Robert Ford est très probablement aussi une allusion au grand cinéaste américain John Ford, bien connu pour ses westerns comme Les raisins de la colère ou encore L'homme tranquille.

Ainsi, si John Ford était créateur de westerns pour divertir le public, dans la série Westworld Robert Ford est créateur de robots, inventeur de scénarii pour ces derniers, c'est lui qui donne vie à ce parc aux allures de western et de far west dans lequel les visiteurs évoluent (et qu'on pourrait comparer à une version futuriste du divertissement cinématographique : un peu comme une expérience en 3D en taille réelle où on serait, en quelque sorte, carrément plongé dans le scénario !) En un sens, Ford invente des westerns interactifs avec des personnages et décors bien réels où les spectateurs sont plongés, et interagissent !
En pensant : futur et expériences interactives, on est aussi tentés de penser aux réalités virtuelles, et à des films comme Tron, ou Passé Virtuel.
Il en va évidemment différemment dans Westworld puisque ces parcs sont réels et tangibles, recréés en dur. Mais (je spoile un peu la saison 3) il se trouve que dans la série Westworld nous avons également un parc entièrement virtuel (et reconstituant la Seconde Guerre Mondiale et la domination des nazis) Considérant ceci, le parallèle entre les parcs et l'industrie du divertissement (y compris celle des jeux vidéos interactifs) est d'autant plus flagrante.

Dans l'épisode 1 de la série, un petit dialogue entre Theresa (personnage faisant partie de l'équipe d'élite du parc), et Lee Sizemore (réalisateur de scénarii, et qu'on pourrait donc comparer aux scénaristes pour les films) nous montre qu'il y a des tensions et des divergences de point de vue selon les personnes qui vivent l'expérience de ces parcs à thème.
L'expérience des visiteurs qui viennent pour vivre des expériences, n'est pas la même que celle des créateurs, des ingénieurs, ou encore des investisseurs.
A cet instant de la série d'ailleurs, nous devinons que derrière ce but premier (proposer à des touristes fortunés des expériences vivifiantes), se cachent probablement d'autres raisons plus profondes qui justifient l'existence de ces parcs. A nouveau je spoile un peu les saisons suivantes : Nous apprendrons notamment que plus que simplement proposer au public un divertissement, ces parcs sont là pour étudier aussi la nature humaine, et donc finalement, pour observer, scruter les gens, et constituer des bases de données.
Difficile de ne pas penser à Facebook et certains réseaux sociaux de nos jours qui derrière le but premier (proposer aux gens d'échanger et de partager des choses) servent surtout à étudier les comportements, proposer de la pub, et in fine, assouvir des buts à la fois commerciaux voire de contrôle des masses, comme l'estime notamment Edward Snowden.
Mais je ne vais pas m'étendre trop sur ce point là pour le moment, qui est développé plus tard dans la série (notamment en saison 3 avec le super ordinateur Rehoboam successeur de l'ordinateur Salomon - encore un nom biblique chargé de sens - inventé par le personnage joué par Vincent Cassel) , nous y reviendrons.

Le dialogue entre Theresa et Lee Sizemore dans l'épisode pilote vient en tout cas souligner (en parallèle) les tensions qui peuvent exister au cinéma entre : les perceptions du public, les intentions du réalisateur (ou d'autres membres de l'équipe, scénaristes, acteurs), ainsi que les producteurs, investisseurs ..
On peut y voir une critique profonde de l'industrie hollywoodienne actuelle dans ses dérives, et notamment de tous ces blockbusters jouant sur la violence et bourrés de scènes voyeuristes comme je l'ai dis, mais qui en viennent au final à être extrêmement formatés et fades. Une scène de l'épisode 2 fait beaucoup échos à ceci, lorsque Lee Sizemore, le scénariste du parc, présente son nouveau scénario Odyssée sur le fleuve rouge, avec les différents robots protagonistes (cowboys, indiens etc)

A l'inverse Robert Ford qui assiste à cette scène insistera sur le sens des petits détails pour plaire au public. Même s'ils n'en ont pas souvent conscience, les gens aiment être surpris par de petites subtilités ; Ford incarne donc ici plutôt la valorisation d'une forme de spectacle plus artistique, et qui nous élève en quelque sorte. On a ici deux visions radicalement opposées (et qui rappellent ce qui se passe avec le cinéma et certains débats houleux sur la toile, le public lui-même semblant parfois divisé à ce sujet ^^ )
Pour revenir d'ailleurs au personnage de Robert Ford (incarné par Anthony Hopkins), le créateur des robots, on peut le comparer à Dieu, à l'Architecte dans le film Matrix, à un démiurge. Je ne vous cacherais pas que c'est un personnage que j'adore (et le charisme de l'acteur n'y est pas pour rien !

A plusieurs reprises, dès le premier épisode, certains dialogues ne trompent pas, notamment lorsque Ford évoque les robots qui buggent, et les compare aux erreurs dans la nature qui sous-tendent le mécanisme de l'évolution : Sans infimes erreurs constamment dans le monde naturel au sein du code génétique, les espèces animales et végétales n'auraient jamais évolué. Point de mutations génétiques, point de diversité. Notre bon vieux démiurge Ford qui n'est pas né de la dernière pluie a bien compris que tenter de reproduire ce mécanisme (par d'infimes petites touches nommées les rêveries) avec ses robots, les ferait évoluer et c'est ce qu'il s'est employé à faire, tout ceci en douce bien sûr, au nez et à la barbe des élites financières du Parc pour qui au contraire l'intérêt est que les robots n'évoluent pas et restent bien dociles, pour assouvir les bas instincts des humains.
Avec cette comparaison évolutionniste, Ford s'inscrit vraiment dans une métaphore divine par rapport à son monde de robots.
La scène où il fait une petite incursion dans le parc pour discuter avec le jeune garçon androïde et où il arrive à commander les mouvements d'un serpent avec de simples mouvements de sa main et avec sa voix, est plus que parlante


Le dialogue entre Ford et Peter Abernathy (le "père" de la robote Dolorès dans le scénario de début de l'histoire) lorsque ce dernier annonce qu'il aimerait rencontrer son créateur pour se venger de lui, n'est pas sans rappeler le dialogue entre Roy Batty (incarné par Rutger Hauer) avec son créateur Eldon Tyrell dans le film Blade Runner, de Ridley Scott. ( lien vers cette scène )

Comme autre métaphore que l'on sent poindre dans la série Westworld, et ce, dès les tous premiers épisodes, il y a celle de l'enfer de Dante. Voire .. de l'holocauste et de certains génocides terribles de l'humanité. Les scènes de la série qui font terriblement penser à ça sont en particulier ces scènes où l'on voit des robots (ne fonctionnant plus), nus, et mis au rebut dans un immense hangar, ou encore cette autre scène où l'une des robotes (Maeve) parvient à se réveiller dans le "monde réel hors parc", et s'échappe de sa salle de réparation, pour apercevoir le sort qui est fait aux siens. Cette scène, assez terrible où Maeve, nue (dans une scène de nudité cohérente scénaristiquement d'ailleurs et non pas destinée à assouvir les bas instincts du spectateur comme souvent) aperçoit une salle où les corps des robots sont jetés comme de vulgaires objets, n'est pas sans rappeler les visions les plus terribles de la Shoah.
Certaines scènes font aussi penser à ces âmes souvent dénudées et en peine qui errent dans le purgatoire ou d'autres lieux des enfers dans la divine comédie de Dante.
Je reviendrai plus tard sur ce parallèle avec Dante notamment à l'occasion d'un épisode très beau et important de la saison 2 avec deux androïdes indiens (contenant une émouvante allusion au mythe d'Orphée et Eurydice)

Westworld est aussi une série qui multiplie les petites phrases et allusions tantôt à la philosophie, à la littérature, à la poésie. Ce topic me servira à les lister aussi de temps à autre. Shakespeare revient souvent, notamment en début de série avec cette étrange phrase : "These Violent Delights Have Violent Ends' (ces désirs violents auront une fin violente) phrase tirée de Roméo et Juliette et que les androïdes se répètent les uns après les autres (comme un virus). Phrase qui semble à chaque fois déclencher l'évolution des robots qui se mettent à ressentir des choses qu'ils ne ressentaient pas, à se souvenir de leurs vies antérieures, et ainsi, progressivement, à voir une forme de conscience émerger en eux. Cette phrase semble agir comme une commande informatique déclenchant un processus. Mais symboliquement, elle fait évidemment référence au déchainement de viles passions et de violence des visiteurs à l'égard des robots dans le parc, qui ne pourra qu'aboutir à un retournement désastreux !
On peut y voir aussi une critique de notre monde actuel, avec ses dérives hédonistes évidemment.

William Shakespeare
Le robot Peter Abernathy ne cite pas que Shakespeare d'ailleurs, mais également la poète et romancière américaine Gertrude Stein (1874-1946) lorsque Robert Ford le questionne sur son nom dans une scène de l'épisode pilote.
Sa réponse très énigmatique en apparence : "Rose, est une rose, est une rose" est un extrait du poème Sacred Emily de 1913 et cette célèbre répétition est souvent interprétée comme signifiant "les choses sont ce qu'elles sont".

Gertrude Stein
L'androide Peter Abernaty (dans cette scène)

Pour en revenir à l'homme en noir incarné par Ed Harris. Personnage assez fascinant de la série qui (contrairement à celui du film Mondwest) n'est pas un robot mais un humain dont les intentions sont mystérieuses au début de la série et qui semble chercher un niveau caché dans le jeu (un peu comme un gamer explorant un jeu vidéo à la recherche d'indices pour accéder à certains niveaux du jeu)

L'homme en noir (un peu comme un spectateur cinéphile ou un gamer un peu blasé) apparaît ici comme la métaphore de ceux qui aiment aller chercher des niveaux un peu "méta" dans une oeuvre, quelque part on pourrait se dire : à l'image de ce topic et de ce que je suis en train de faire ici avec la série ou de certains youtubeurs qui aiment décortiquer pour chercher un éventuel niveau de lecture caché

L'homme en noir ne cessera durant toute la première saison d'imaginer le parc Westworld comme un immense labyrinthe et dont il cherche le centre.
Ce centre existe t'il quelque part, ou bien est-ce métaphoriquement autre chose ? ça, la série nous le dira en fin de première saison (je ne spoilerai pas à ce stade) ; Au niveau de l'imagerie utilisée, on peut voir que la représentation d'un labyrinthe est gravée à l'intérieur du crâne des robots (c'est le scalpe de l'un des androïdes qu'il a torturé et massacré qui mettra d'ailleurs l'homme en noir sur cette piste d'un labyrinthe)

L'idée de cet étrange schéma qui est gravé à l'intérieur de la tête des robots provient d'un jouet qui appartenait au jeune fils (décédé) de l'ingénieur Arnold, co-créateur des robots avec Robert Ford ; C'est d'ailleurs ce jouet qui l'incitera à envisager la construction de la conscience des robots comme une quête labyrinthique à l'intérieur de soi-même (comme Arnold l'explique d'ailleurs à Dolorès lors d'un flashback).

On peut voir que cette représentation du labyrinthe nous montre même un humain à l'intérieur de lui, similaire à ces représentations que l'on voit à plusieurs reprises (lorsque les androïdes sont fabriqués à partir de l'espèce de liquide à allure laiteuse)


Représentation qui n'est pas sans rappeler le Christ sur la croix, mais aussi l'homme de Vitruve, de l'artiste italien Léonard de Vinci, comme vous l'aurez sans doute reconnu.

Ce célèbre dessin est censé représenter les proportions idéales du corps humain, s'inscrivant parfaitement dans un cercle (dont le centre est le nombril) et un carré (centre : les organes génitaux), l'Homme de Vitruve est un symbole allégorique emblématique de l’Humanisme, de la Renaissance, du rationalisme, de « L'Homme au centre de tout / Homme au centre de l’Univers », de la mesure et de la représentation du monde.
L'homme de Vitruve a aussi pour vocation de mettre en avant le nombre d'or, souvent utilisé par les artistes recherchant des proportions parfaites, notamment en architecture. Dans la série, Robert Ford apparaît ainsi comme le grand architecte, le Léonard de Vinci du parc, pourrait-on dire.
Ce symbole inspire aussi le logo du parc (et logo de la série) et l'enfermement dans le cercle rappelle le fait que l'Homme (ou plutôt les robots si on replace dans le contexte westworld) restent soumis à un déterminisme implacable, leur liberté n'étant qu'apparente, ils sont enfermés dans des boucles narratives, condamnés à revivre inlassablement certains scénario préécrits, et à revivre les mêmes scènes de souffrance, de torture, de tuerie, destin tragique qui n'est pas sans rappeler le personnage de Sisyphe dans la mythologie grecque, condamné à rouler un gros rocher jusqu'au sommet d'une montagne des enfers avant de le voir inlassablement retomber pour recommencer la même tâche.

Parmi les autres petites allusions dans l'épisode 2, nous avons l'évocation de Guillaume d'Ockham à travers une réplique de Robert Ford (Anthony Hopkins) en discussion avec Bernard Lowe lorsque tous deux s'interrogent sur les raisons des modifications récentes des androïdes, Bernard imaginant une ingérence extérieure, hypothèse qui lui paraît plus simple que l'hypothèse selon laquelle la photo trouvée par Abernathy dans l'épisode 1 (et provenant du monde moderne extérieur) aurait pu à elle seule provoquer les bugs de comportements du robot. "C'est la solution la plus simple" dit Bernard. Ce à quoi, Robert Ford répond "ahhh .. monsieur Ockham et son rasoir !"

c'est au philosophe et moine Guillaume d'Ockham que l'on doit le célèbre principe du rasoir d'Ockham , aussi appelé principe de simplicité, principe d'économie ou principe de parcimonie et que l'on pourrait résumer par « les hypothèses suffisantes les plus simples doivent être préférées ».
C'est un principe heuristique qui est très souvent utilisé dans la recherche scientifique même s'il n'est pas à proprement parler un résultat scientifique.
notons pour l'anecdote que c'est Guillaume d'Ockham qui a inspiré le personnage de Guillaume de Baskerville dans le roman Le nom de la rose (d'Umberto Ecco, adapté au cinéma par J.J.Annaud)

Le petit dialogue entre Bernard et Ford se poursuit, Ford essayant de détourner Bernard de l'idée d'un sabotage, en évoquant l'extrême complexité de leurs travaux de fabrication de robots. "On crée la vie à partir du chaos ! Guillaume d'Ockham était un moine du 13ème siècle, aujourd'hui il ne peut rien pour nous ! On aurait fini sur le bûcher à cause de lui !"
On peut d'ailleurs se dire que la science d'aujourd'hui et de demain passerait facilement pour de la magie (ou de la sorcellerie) aux yeux de nos ancêtres lointains ! Lorsque l'on ne comprend pas un phénomène il est tentant de penser que c'est de la magie. C'est aussi le cas apparemment de certains robots primitifs comme le petit garçon qui dialogue avec Robert Ford dans l'épisode 2, dans la scène où Ford contrôle le serpent d'un doigt. "Comment faites-vous ? c'est de la magie !" s'exclame le petit garçon-robot

scène qui n'est d'ailleurs pas sans faire penser au magicien d'Oz ici.
Je vais terminer ce post introductif sur les premiers épisodes de la série en évoquant ce train à vapeur (qui revient de manière récurrente dans les premières saisons, et qui permet de passer du monde extérieur au parc) , ce train si emblématique du Far West et de la conquête de l'Ouest, et qui (dans les deux cas) permet de repousser les frontières et de passer d'un monde à l'autre ... tout un symbole !
